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L'ACTUALITÉ DE LA GRANDE ÎLE DEPUIS 1929

Cnam Madagascar : une université internationale qui relie études, expérience et emploi

Depuis le début des années 2000, l’enseignement supérieur malgache s’est enrichi d’un acteur particulier : le Cnam Madagascar, représentation locale du Conservatoire national des arts et métiers français. Installé au cœur d’Antananarivo et déployé dans plusieurs grandes villes de l’île, le centre attire à la fois des jeunes bacheliers en quête d’un diplôme international et des professionnels désireux de renforcer leur employabilité. À l’heure où Madagascar doit relever le défi de la qualification de sa main-d’œuvre et de l’adaptation aux mutations technologiques, le Cnam propose une voie singulière : suivre des formations françaises, reconnues à l’international, sans quitter le pays. Retour sur l’histoire, le fonctionnement et les enjeux d’une institution qui revendique une mission simple mais ambitieuse : former pour transformer.


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Un centre né en 2003, au croisement des besoins locaux et du réseau international du Cnam


Le Cnam est une institution publique française fondée en 1794, historiquement tournée vers la diffusion des savoirs scientifiques et techniques et la promotion sociale par la formation tout au long de la vie. Son déploiement international s’est accéléré au fil des décennies, avec une stratégie de centres partenaires installés à l’étranger, chargés d’implanter les diplômes du Cnam au plus près des besoins locaux. Madagascar fait partie de ces pays où le Cnam a choisi de s’ancrer durablement.


Le centre Cnam Madagascar est créé en 2003, dans un contexte où l’île cherche à élargir son offre d’enseignement supérieur, mais aussi à mieux articuler formation et emploi. Dès l’origine, l’idée est d’offrir aux étudiants malgaches un accès direct au catalogue national du Cnam, avec la promesse d’un diplôme français obtenu localement. Le centre se positionne comme une passerelle entre deux systèmes universitaires : celui, très professionnalisant, du Cnam en France, et le marché du travail malgache en forte demande de compétences techniques et managériales.


Au fil des ans, le Cnam Madagascar a élargi ses domaines d’intervention et ses outils pédagogiques. Les responsables du centre mettent en avant la diversification des filières, la création de contenus adaptés au contexte de l’île, et surtout le développement de partenariats avec les autorités malgaches et les établissements français présents sur place. Cette logique permet d’ancrer l’offre de formation dans les réalités économiques locales, tout en conservant la rigueur académique des diplômes du Cnam.


Ce centre malgache s’intègre pleinement au réseau international du Cnam, qui revendique une expertise en alternance, formation à distance, validation des acquis et ingénierie de formation. L’établissement joue donc un rôle de relais, mais aussi de laboratoire : une partie de ses parcours sont conçus ou ajustés pour répondre aux contraintes et opportunités propres à Madagascar, notamment en termes de modularité, de rythme et d’accès régional.


Une implantation nationale et une pédagogie hybride pour toucher un public large


Le siège du Cnam Madagascar est installé à Antananarivo, dans le quartier des 67 Ha, au sein de la Maison des Produits. Mais l’ambition du centre ne s’arrête pas à la capitale. Pour réduire les inégalités géographiques d’accès à l’enseignement supérieur, le Cnam s’est progressivement étendu en régions. Aujourd’hui, il dispose de représentations à Diégo-Suarez (Antsiranana), Mahajanga, Toamasina, Fianarantsoa et Toliara, en plus du siège central. Cette présence territoriale fait du Cnam l’un des rares établissements proposant des diplômes français dans plusieurs régions de l’île.


Ce déploiement s’accompagne d’un choix pédagogique central : la formation hybride. Les cours sont dispensés en présentiel, en distanciel, ou dans des formats combinés. Les unités d’enseignement sont accessibles “à la carte”, capitalisables, et permettent à chaque auditeur de construire un parcours progressif vers un diplôme, qu’il s’agisse d’une reconversion, d’un complément de compétences ou d’une formation initiale. Cette modularité est un marqueur fort de l’ADN du Cnam, et se révèle particulièrement adaptée au public malgache, où nombreux sont ceux qui doivent concilier études, emploi et contraintes familiales.


L’inscription a également été modernisée : préinscription en ligne, dépôt de dossier au centre le plus proche, accompagnement administratif pour les candidats. Le dispositif se veut souple, sans renoncer aux exigences académiques. Les documents demandés, classiques pour l’enseignement supérieur, incluent diplômes antérieurs, CV, lettre de motivation et justificatifs d’identité. Cette procédure permet de capter une diversité de profils, des bacheliers aux cadres confirmés.


Autre particularité : toutes les formations sont dispensées en français. Pour les étudiants dont la maîtrise de la langue peut représenter un frein, le centre a mis en place, avec l’Alliance Française d’Antananarivo, des cours de français langue étrangère. La question linguistique devient ainsi un enjeu pédagogique à part entière : elle garantit l’accès aux ressources du Cnam, principalement francophones, et prépare à d’éventuelles poursuites d’études en France.


Des filières centrées sur l’emploi, du bâtiment à la cybersécurité


Le cœur du modèle Cnam repose sur des filières orientées métiers. À Madagascar, près d’une trentaine de parcours sont ouverts, couvrant cinq grands domaines : bâtiment et travaux publics, informatique et numérique, innovation et management, comptabilité et finance, stratégie et commerce. Cet équilibre reflète à la fois l’histoire du Cnam, fondé sur les métiers techniques, et l’évolution des besoins économiques malgaches, marqués par la croissance des services, du numérique et des grands projets d’infrastructures.


Dans le secteur du bâtiment, l’offre va du certificat professionnel aux diplômes d’ingénieur, avec des parcours en technologie de la construction, éco-construction, conduite de travaux, génie civil et travaux publics. L’objectif est double : former des techniciens et cadres capables de gérer les chantiers et répondre aux normes modernes, mais aussi accompagner l’urbanisation rapide du pays.


En informatique, le Cnam Madagascar mise sur des formations très actuelles : intégration web, développement, systèmes d’information, application mobile, architectures réseaux, cybersécurité, business intelligence. Plusieurs cursus mènent à des titres RNCP (répertoire national français de certification professionnelle), reconnus en Europe. Pour Madagascar, où le secteur numérique est devenu stratégique, ces filières jouent un rôle de levier social et économique. L’enjeu est visible dans les chiffres : l’informatique regroupe à elle seule près d’un quart des inscrits.


Les domaines “innovation” et “stratégie” rassemblent des parcours en gestion, commerce, marketing digital, management opérationnel ou encore gestion des ressources humaines. Des certifications permettent aux étudiants de viser des postes de manager de proximité, chargé commercial, attaché de vente, ou assistant RH. Un accent particulier est mis sur le e-business et le marketing numérique, signe de la montée en puissance du commerce en ligne et des nouveaux modes de consommation dans l’île.


En comptabilité, le centre s’appuie sur un partenariat majeur avec l’Intec, institut du Cnam spécialisé dans les techniques économiques et comptables. Les étudiants peuvent ainsi suivre à Madagascar des cursus menant au Diplôme de Gestion et de Comptabilité, au Diplôme Supérieur de Gestion et de Comptabilité, voire au Diplôme d’Expertise Comptable. Cette filière répond à une demande constante d’experts financiers, en entreprise comme dans le secteur public.


Enfin, la possibilité de poursuivre ses études en France est régulièrement mise en avant. Les parcours sont conçus pour être compatibles avec le système LMD français. Les meilleurs étudiants, ou ceux qui le souhaitent, peuvent ainsi prolonger leur cursus dans un centre Cnam en métropole ou dans un autre pays du réseau international. Cette perspective crée une ouverture internationale sans exiger une mobilité immédiate, souvent coûteuse.


Diplômes français, reconnaissance malgache et validation des acquis : un modèle de promotion sociale


L’un des principaux attraits du Cnam Madagascar réside dans la nature des diplômes délivrés. Les certifications proposées sont des diplômes d’État français (licence générale, master), des titres d’ingénieur, ainsi que des diplômes d’établissement et des certificats professionnels. Ces diplômes sont accrédités par le ministère français de l’Enseignement supérieur et reconnus au niveau international. Leur valeur ne s’arrête toutefois pas aux frontières françaises : ils sont aussi habilités par les autorités malgaches, avec des arrêtés d’équivalence permettant l’intégration dans la fonction publique ou la reconnaissance sur le marché local.


Cette double légitimité est un argument puissant dans un pays où la concurrence entre établissements privés, publics et étrangers est forte. Le Cnam occupe une place intermédiaire : public français, mais implanté localement ; rigoureux académiquement, mais flexible pédagogiquement ; international, mais connecté aux entreprises malgaches.


Autre élément structurant : la validation des acquis. Fidèle à la philosophie du Cnam, le centre malgache propose plusieurs dispositifs permettant d’obtenir tout ou partie d’un diplôme sur la base de l’expérience antérieure. La VAE permet de valoriser des compétences professionnelles ; la VAPP autorise l’accès à une formation supérieure sans les prérequis académiques classiques ; la VES reconnaît des études déjà suivies ailleurs. Ces voies sont essentielles à Madagascar, où de nombreux adultes ont construit leurs compétences sur le terrain sans avoir pu terminer un cursus universitaire.


Dans les faits, le candidat à la VAE ou à la VAPP prend rendez-vous avec un conseiller, constitue un dossier détaillant ses expériences, et le soumet à un jury. Le centre accompagne cette démarche, en miroir de ce qui se fait en France. Pour les entreprises, c’est un outil de gestion des compétences : faire certifier un salarié, c’est sécuriser son parcours et augmenter la performance globale.


Ce modèle de promotion sociale par la reconnaissance des acquis séduit autant les jeunes que les actifs. Il installe un dialogue concret entre formation et emploi, en offrant des voies de rattrapage ou d’ascension professionnelle. Le Cnam Madagascar, dans ce cadre, devient un acteur d’égalité des chances, en particulier pour ceux qui n’auraient pas accès autrement à un diplôme de niveau licence, master ou ingénieur.


Enjeux actuels : répondre aux mutations économiques et renforcer l’ancrage régional


Après plus de deux décennies d’existence, le Cnam Madagascar se trouve à un tournant. L’île connaît des mutations profondes : urbanisation accélérée, montée du numérique, besoin de cadres intermédiaires dans les collectivités, transformation du tissu entrepreneurial, mais aussi défis structurels comme le chômage des jeunes et l’inadéquation entre formation et emploi. Dans cette équation, le centre revendique un rôle d’ajustement permanent. Les formations sont dites “actualisées”, conçues pour coller aux besoins des entreprises et aux métiers émergents.


Les dernières actualités du centre illustrent cette orientation. Des séances d’information sur les parcours, la promotion de formations courtes professionnalisantes ou encore des initiatives en responsabilité sociale sont régulièrement mises en avant. À Mahajanga ou Fianarantsoa, les équipes du Cnam multiplient les rencontres avec les chambres de commerce locales, signal d’une volonté d’ancrage régional et de co-construction des compétences.


L’autre enjeu est quantitatif. Avec environ 475 inscrits recensés sur une année-type récente, le Cnam Madagascar reste une structure à taille humaine. Mais cette taille offre aussi une agilité : possibilité d’ouvrir de nouvelles filières, de développer des antennes digitales, ou de mutualiser certains cours entre régions. L’accroissement des inscriptions pour l’année universitaire 2025-2026 montre que la demande demeure soutenue.


Le défi le plus visible est celui de la compétition. Madagascar accueille aujourd’hui une pluralité d’offres universitaires et professionnelles, parfois moins coûteuses, parfois plus spécialisées. Le Cnam doit donc maintenir son attractivité, notamment par la qualité de ses enseignants issus du monde professionnel et par ses parcours hybrides. C’est tout l’équilibre entre excellence académique et accessibilité qui se joue, dans un pays où le coût des études reste un frein majeur.


Enfin, l’établissement doit répondre à une question plus large : quelle place pour l’enseignement supérieur international dans la souveraineté éducative malgache ? Pour ses responsables, la réponse passe par la complémentarité. En formant localement à des standards internationaux, le Cnam Madagascar contribue à éviter une fuite des talents trop précoce, tout en préparant ceux qui le souhaitent à circuler dans l’espace francophone. Il agit comme un outil de montée en compétences nationale plutôt que comme un simple guichet vers l’étranger.


Dans un paysage en recomposition, le Cnam Madagascar conserve donc une singularité : être une institution française ancrée dans les réalités malgaches, et porter la promesse d’un savoir-faire directement convertible en emploi. La formule, résumée dans son slogan, “Former pour transformer”, donne le ton. Reste à savoir jusqu’où cette transformation pourra aller dans les années à venir, au rythme des besoins d’un pays jeune, dynamique, mais encore confronté à de fortes inégalités d’accès à la qualification.

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