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L'ACTUALITÉ DE LA GRANDE ÎLE DEPUIS 1929

Coopération économique : Madagascar resserre ses liens avec la BAD et le FMI au lendemain d’un changement de gouvernance

Dans le bureau du ministère de l’Économie et des Finances, à Antaninarenina, l’agenda de la fin novembre a pris un accent résolument international. Ce vendredi 28 novembre 2025, le Ministre Dr Herinjatovo Ramiarison a reçu successivement deux acteurs majeurs de la coopération financière multilatérale : le représentant résident de la Banque africaine de développement (BAD), Adam Amoumoun, puis le représentant résident du Fonds monétaire international (FMI) à Madagascar, Kodjovi Mawulikplimi Eklou. Deux rendez-vous distincts, mais un même mot d’ordre : consolider les partenariats, clarifier les priorités et préparer les prochaines étapes techniques. À travers ces échanges, le gouvernement affiche sa volonté de donner une impulsion à sa stratégie de développement, tout en s’assurant que les appuis des bailleurs restent pleinement alignés sur les orientations nationales. Les discussions ont aussi remis au centre les enjeux de coordination entre partenaires, à la veille d’annonces importantes sur l’organisation d’une Grande Conférence Nationale Économique et de futures assises nationales pour la relance.


Une prise de contact à forte portée politique et institutionnelle


La première séquence de cette journée a été consacrée à la BAD. Les mots d’ouverture ont donné le ton. Adam Amoumoun a félicité le ministre pour sa nomination à la tête du ministère de l’Économie et des Finances, rappelant que cette charge fait de lui, de facto, le gouverneur de la BAD pour Madagascar. La formule n’est pas qu’honorifique : elle traduit la place centrale du ministère dans la relation avec l’institution panafricaine. En recevant le représentant résident peu après sa prise de fonction, Dr Herinjatovo Ramiarison envoie un signal de continuité, mais aussi de réaffirmation des priorités.


Le rappel du rôle de la BAD dans la Grande Île s’inscrit dans cette logique. L’institution se présente comme un partenaire de développement économique et social, avec un positionnement multisectoriel. Cet ancrage a été souligné lors de la réunion : infrastructures (transport, énergie), agriculture et élevage, agro-industrie, gouvernance, climat, gestion des catastrophes, renforcement des capacités, changement climatique et gestion des risques naturels. La liste, dense, est à la fois un constat et une feuille de route. Elle illustre la variété des domaines dans lesquels la coopération peut s’inscrire, mais laisse aussi entrevoir la nécessité de prioriser, de séquencer les actions et d’assurer une cohérence d’ensemble.


Dans cet échange, la BAD a, selon les éléments communiqués, réaffirmé sa disponibilité à accompagner Madagascar dans les chantiers structurants. Les infrastructures de transport et d’énergie, citées en premier, apparaissent comme des leviers déterminants de l’action publique : elles conditionnent la connectivité du territoire, l’accès aux services et la circulation des biens. L’insistance sur l’agriculture, l’élevage et l’agro-industrie renvoie à un enjeu de transformation économique : mieux valoriser les filières, renforcer les capacités productives et soutenir la montée en gamme. Quant aux thèmes de gouvernance, de climat et de gestion des catastrophes, ils rappellent que le développement se pense aussi en termes de résilience, de qualité institutionnelle et d’anticipation des chocs.


Cette étape protocolaire a donc pris une dimension stratégique. Dans un contexte de changement de gouvernance au sein de l’exécutif, la BAD affirme sa confiance et sa volonté de poursuivre le partenariat, tandis que le ministère se place en pilote des réformes et des investissements soutenus par l’institution. L’objectif, à ce stade, est de préparer des réunions techniques à venir, qui devront traduire cette vision en programmes, en calendriers et en mécanismes de suivi.


La BAD, partenaire historique aux priorités élargies


L’entretien avec la BAD a permis de clarifier le périmètre d’intervention de l’institution à Madagascar, tel qu’il est perçu aujourd’hui par les deux parties. Le représentant résident a rappelé que la BAD n’est pas seulement un bailleur de projets ponctuels mais un acteur qui se positionne sur des domaines structurants. Sa contribution s’inscrit ainsi dans une approche mêlant investissements matériels et appui à la gouvernance.


Le Ministre de l'économie et des Finances Malgache, Dr Herinjatovo Ramiarison avec les représentants de la Banque africaine de développement (BAD)
Le Ministre de l'économie et des Finances Malgache, Dr Herinjatovo Ramiarison avec les représentants de la Banque africaine de développement (BAD)

Le champ des infrastructures, cœur historique de la banque, a été réaffirmé. Transport et énergie sont associés dans le discours, comme deux composantes d’un même besoin d’intégration. Les infrastructures de transport facilitent la circulation des personnes et des marchandises, réduisent les distances économiques et renforcent l’accès aux marchés. L’énergie, elle, conditionne l’activité économique et la modernisation des services, tout en posant la question de la durabilité. Si la réunion n’a pas détaillé de projets spécifiques, le fait de placer ces secteurs en tête montre qu’ils restent considérés comme prioritaires dans le partenariat.


L’accent mis sur l’agriculture, l’élevage et l’agro-industrie illustre un élargissement des priorités. La BAD se positionne, selon les termes évoqués, sur l’appui aux filières productives et aux transformations locales. Le tandem agriculture-agro-industrie suggère une approche intégrée : soutenir la production tout en favorisant la transformation, afin de créer davantage de valeur ajoutée sur place. L’élevage, explicitement cité, renvoie à la diversification des activités rurales et à la sécurisation des revenus des ménages.

La banque a également rappelé son engagement sur les volets de gouvernance et de renforcement des capacités. Cette mention est importante car elle signale que la coopération ne se limite pas aux financements d’infrastructures ou de production. Elle inclut aussi des appuis techniques visant à améliorer la qualité de la gestion publique, la transparence, la planification et la capacité d’exécution. Dans une logique de développement à long terme, ces dimensions sont présentées comme des conditions de réussite des investissements.


Enfin, les thématiques de climat, de changement climatique et de gestion des risques naturels ont pris une place notable dans l’échange. Le représentant résident a précisé que la BAD intervient aussi sur la gestion des catastrophes, montrant que la banque intègre la question de la vulnérabilité et de la résilience. L’ensemble forme une vision qui cherche à concilier croissance, responsabilité environnementale et préparation aux aléas.

À l’issue de cette séquence, le ministère et la BAD se sont accordés sur la nécessité de réunions techniques. L’enjeu, pour la partie malgache, sera d’inscrire les appuis dans le programme national de développement, tout en veillant à l’articulation entre secteurs. Pour la banque, il s’agira de traduire ses domaines d’intervention en initiatives opérationnelles partageant des objectifs communs avec l’État.


Le FMI et les programmes FEC/FRD, au cœur d’une coopération à recalibrer


La deuxième réunion de la journée a rassemblé le ministre et le représentant résident du FMI à Madagascar, Kodjovi Mawulikplimi Eklou. L’entretien s’est concentré sur les axes de coopération en cours, en particulier deux instruments : le programme FEC/FRD, articulant la Facilité Élargie de Crédit (FEC) et le Fonds pour la Résilience et la Durabilité (FRD).


Le Ministre de l'économie et des Finances Malgache, Dr Herinjatovo Ramiarison avec le représentant du Fonds monétaire international (FMI) à Madagascar, Kodjovi Mawulikplimi Eklou
Le Ministre de l'économie et des Finances Malgache, Dr Herinjatovo Ramiarison avec le représentant du Fonds monétaire international (FMI) à Madagascar, Kodjovi Mawulikplimi Eklou

La mention précise de ces deux cadres montre que le dialogue avec le FMI se situe à la fois sur le terrain du soutien financier et sur celui de l’accompagnement des politiques. La FEC, par nature, s’inscrit dans une logique de programme, c’est-à-dire d’appui conditionné à des orientations macroéconomiques et à un calendrier de réformes. Le FRD, quant à lui, est présenté comme un outil axé sur la résilience et la durabilité, ce qui le rend complémentaire au programme de crédit. La discussion ne s’est pas étendue aux détails techniques, mais l’accent mis sur ces instruments indique qu’ils structurent aujourd’hui l’essentiel de la coopération entre Madagascar et le FMI.


Un point clef ressort : une mission technique est déjà prévue pour janvier 2026. Son objet est double. D’abord, examiner la coopération en cours. Ensuite, garantir son alignement avec le programme de développement du Gouvernement de la Rénovation dans tous les secteurs concernés. Cette formulation donne une indication politique : l’exécutif souhaite que les appuis du FMI accompagnent la stratégie nationale telle qu’elle est définie par le gouvernement.


La mission devra aussi, selon les termes annoncés, envisager une potentielle recalibration des projets, afin de mieux s’aligner sur les objectifs du Gouvernement de la Refondation. L’idée de recalibrage suggère que certaines composantes du partenariat pourraient être ajustées, réorientées ou réordonnées. Cela peut concerner le contenu, les priorités ou le rythme des actions. Sans entrer dans des détails non fournis, on comprend que le gouvernement souhaite éviter tout décalage entre les exigences du programme et les orientations qu’il entend porter au niveau national.


Cette perspective annonce une phase technique intense. Les missions du FMI sont généralement des moments de dialogue approfondi, où les équipes évaluent l’état d’avancement des engagements, le contexte économique et les perspectives de politique publique. Ici, l’accent mis sur l’alignement et le recalibrage renforce l’idée d’une coproduction des priorités : le gouvernement expose son programme, le FMI examine la cohérence et l’adéquation de la coopération. L’objectif affiché est simple : que la coopération soutienne la trajectoire nationale, sans s’en éloigner.


Pour le ministère, cette séquence est aussi l’occasion de réaffirmer que le partenariat avec le FMI s’inscrit dans une logique de soutien à la relance. En liant la mission de janvier à l’ensemble des secteurs concernés, l’exécutif indique que la coopération financière et technique doit irriguer non seulement la politique macroéconomique mais aussi les priorités sectorielles jugées essentielles à la Rénovation et à la Refondation.


Vers une coordination renforcée des partenaires autour de la relance


Au-delà des échanges bilatéraux, le ministère de l’Économie et des Finances a profité de cette journée pour rappeler une échéance nationale majeure : l’organisation prochaine d’une Grande Conférence Nationale Économique. Cette annonce complète les discussions avec la BAD et le FMI en leur donnant un horizon collectif.


Selon les éléments présentés, la conférence aura pour vocation d’engager des discussions et d’élaborer des plans d’action, tout en impliquant l’ensemble des partenaires au développement. La formulation souligne la volonté d’ouverture. Elle indique que l’État ne souhaite pas traiter les partenaires de façon isolée, mais créer un cadre commun de dialogue, de convergence et de coordination. La conférence apparaît comme un outil de gouvernance économique : elle doit permettre de partager un diagnostic, de mettre en cohérence les contributions et d’aboutir à des plans opérationnels.


L’intérêt de ce type de rendez-vous est de faire se rencontrer les priorités nationales et les dispositifs des partenaires internationaux. Dans le texte communiqué, la BAD et le FMI sont implicitement concernés, au même titre que l’ensemble des bailleurs. Les domaines évoqués lors des réunions bilatérales — infrastructures, agriculture, gouvernance, résilience, programmes financiers — se retrouveront sans doute au cœur des échanges collectifs.


Le ministère a également insisté sur l’importance de prochaines assises nationales pour la relance économique. L’objectif annoncé est de privilégier le dialogue et de définir un plan auquel participeront tous les partenaires internationaux. Cette mention vient renforcer l’idée que la relance n’est pas seulement un enjeu de financement, mais un chantier stratégique qui appelle une discussion nationale élargie. Les assises, par leur nature, doivent servir de cadre à une mise en commun des analyses et à l’adoption d’une trajectoire partagée.


En reliant ces annonces à la visite des représentants de la BAD et du FMI, le ministère donne à voir une stratégie de méthode. D’abord, consolider les relations bilatérales et clarifier les instruments. Ensuite, organiser une coordination plus large afin de garantir l’alignement des appuis avec la vision nationale. L’enjeu est celui de la cohérence : éviter la dispersion, réduire les chevauchements, et faire converger les interventions vers un objectif de relance durable.


Cette dynamique implique aussi une attente envers les partenaires. Le ministère sollicite explicitement leur participation. En conséquence, la BAD, le FMI et d’autres bailleurs se trouvent invités à inscrire leurs appuis dans un cadre commun où les priorités seront discutées et hiérarchisées. Pour l’État, il s’agit d’un levier pour renforcer la maîtrise nationale de l’agenda de développement, tout en maintenant la confiance et l’engagement des institutions internationales.


Une séquence charnière pour la trajectoire économique du Gouvernement de la Rénovation


À la lumière des informations disponibles, la journée du 28 novembre 2025 constitue une séquence charnière. D’un côté, elle marque la continuité d’une coopération essentielle avec deux institutions phares du financement multilatéral. De l’autre, elle traduit une volonté politique de reprendre l’initiative, de réaffirmer des priorités et de préparer un nouveau cycle de travail technique.


Le ministre Dr Herinjatovo Ramiarison, récemment nommé, se trouve à l’intersection de plusieurs responsabilités : conduire la politique économique nationale, coordonner les partenaires, et assurer la place de Madagascar au sein des instances internationales, notamment en tant que gouverneur de la BAD. La réception des représentants résidents en début de mandat s’inscrit dans une logique de prise de contact rapide et structurante. Elle permet de poser des bases relationnelles et de donner un cadre aux étapes suivantes.


La BAD a présenté un panorama d’intervention très large, allant des investissements structurants aux enjeux de gouvernance et de résilience climatique. Ce rappel relève autant de l’état des lieux que de l’anticipation : il offre au gouvernement une grille de coopération où les chantiers peuvent être inscrits. La mention des réunions techniques à venir laisse entendre que la phase suivante consistera à traduire les ambitions en mécanismes concrets, éventuellement avec une priorisation plus nette des secteurs.


Le FMI, de son côté, a centré le dialogue sur les programmes FEC et FRD. L’annonce d’une mission technique en janvier 2026 et la notion de recalibrage témoignent d’une volonté de réajuster la coopération pour l’aligner étroitement sur les objectifs gouvernementaux. Le Gouvernement de la Rénovation et le Gouvernement de la Refondation, cités dans le texte, apparaissent comme des cadres politiques devant guider l’action des partenaires. Le message est clair : l’aide internationale est attendue comme un soutien à la stratégie nationale, non comme une trajectoire parallèle.


Enfin, l’annonce de la Grande Conférence Nationale Économique et des assises nationales pour la relance inscrit cette coopération dans un calendrier national. Elle donne une dimension collective à des échanges bilatéraux, et prépare un espace où les priorités seront discutées en présence de tous les partenaires. L’État envisage donc une relance structurée autour du dialogue et de la coordination, en cherchant à mobiliser les institutions internationales dans une approche concertée.


En somme, cette séquence diplomatique et technique révèle une ambition : faire de la coopération un outil d’accélération du développement national. Les étapes à venir — réunions techniques avec la BAD, mission du FMI en janvier 2026, organisation de la conférence économique et des assises de relance — constitueront autant de jalons dans la mise en œuvre de cette ambition. Le gouvernement joue ici une carte d’équilibre : s’appuyer sur les partenaires pour renforcer ses capacités et ses investissements, tout en réaffirmant la primauté de son programme. La réussite de cette démarche dépendra de la capacité à transformer ces échanges en actions concrètes, et à faire converger les engagements internationaux vers une trajectoire économique partagée et maîtrisée par Madagascar.

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