Importation illégale : la Douane malgache saisit une cargaison de cigarettes contrefaites estimée à plusieurs milliards d’ariary
- TAHINISOA Ursulà Marcelle
- il y a 4 heures
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Une vaste opération douanière menée le 22 septembre au port de Mahajanga a mis au jour l’une des plus importantes affaires de contrefaçon de cigarettes enregistrées à Madagascar ces dernières années. Les agents des douanes y ont intercepté un conteneur de 40 pieds contenant plus de 57 600 cartouches de cigarettes de la marque “Good Look”, pour une valeur marchande estimée à près de 4 milliards d’ariary. L’enquête a révélé qu’il s’agissait d’une cargaison frauduleuse importée en violation des lois en vigueur sur le commerce du tabac et la protection des marques. Les droits et taxes éludés s’élèveraient à environ 2 milliards d’ariary, tandis que les amendes encourues dépassent 9 milliards.
Au-delà des chiffres, cette saisie illustre l’ampleur du trafic de produits contrefaits sur le territoire malgache et les pertes considérables qu’il inflige aux finances publiques. Elle met également en lumière les risques sanitaires liés à la consommation de produits non conformes et la détermination des autorités à renforcer la lutte contre la contrebande.

Une opération d’envergure au port de Mahajanga
C’est à l’issue d’un contrôle ciblé effectué par les services des douanes que le conteneur suspect a été intercepté. Selon le rapport établi par la direction régionale des douanes de Mahajanga, le chargement contenait plus de 57 600 cartouches de cigarettes “Good Look”, accompagnées de deux cartons de rubans siglés “Imperial Tobacco” et de 94 cartons de serviettes usagées, vraisemblablement destinées à dissimuler la marchandise illicite.
L’opération a été conduite dans le strict respect des procédures légales, avec le concours des services de sécurité portuaire. Les premières analyses ont confirmé qu’il s’agissait de produits contrefaits, importés sans autorisation officielle et sans respect des réglementations douanières. La cargaison a immédiatement été placée sous scellés dans l’attente de sa destruction.
Les autorités ont estimé la valeur totale de la marchandise frauduleuse à environ 4 milliards d’ariary, soit plusieurs centaines de milliers d’euros. Les taxes et droits non perçus s’élèvent quant à eux à près de 2 milliards d’ariary, un manque à gagner conséquent pour le Trésor public. Selon Ernest Lainkana Zafivanona, directeur général de la Douane, les auteurs de cette fraude encourent des sanctions financières pouvant atteindre plus de 9 milliards d’ariary, conformément au Code des douanes.
Cette affaire met une fois de plus en évidence les efforts accrus de la Douane malgache pour renforcer le contrôle des importations maritimes, particulièrement dans les grands ports du pays. Les autorités ont rappelé que la surveillance des flux commerciaux constitue un enjeu majeur pour lutter contre l’économie souterraine et la perte de recettes fiscales.
Un manque à gagner colossal pour l’État et les entreprises légales
Au-delà de cette saisie spectaculaire, la Douane souligne que la contrefaçon de cigarettes constitue un fléau économique de grande ampleur. “Ces produits illicites échappent totalement aux droits et taxes, privant l’État de ressources essentielles destinées au financement des services publics”, a expliqué le directeur général Ernest Lainkana Zafivanona.
Selon les estimations officielles, le commerce de tabac illicite fait perdre chaque année plusieurs milliards d’ariary au Trésor public. Ces pertes affectent directement la capacité de l’État à financer des secteurs clés tels que la santé, l’éducation ou les infrastructures. En parallèle, la circulation de produits non déclarés perturbe la concurrence et affaiblit les acteurs économiques respectueux de la législation.
Les fabricants et distributeurs agréés, qui s’acquittent de leurs obligations fiscales, se retrouvent ainsi confrontés à une concurrence déloyale. Cette situation nuit à la stabilité du marché et à la confiance des investisseurs. Dans le cas de la marque “Good Look”, la société Promodim, détentrice exclusive de l’autorisation de fabrication et de distribution à Madagascar, a immédiatement réagi en appelant ses partenaires à la vigilance.
L’entreprise a rappelé que toute acquisition en dehors du réseau officiel constitue une infraction susceptible d’entraîner des poursuites. Elle encourage ses distributeurs à vérifier la traçabilité de leurs produits et à signaler toute irrégularité aux autorités compétentes. Cette mise en garde souligne l’importance de la coopération entre le secteur privé et l’administration pour lutter contre la contrefaçon et protéger l’économie nationale.
Des risques sanitaires majeurs pour les consommateurs
Si les conséquences économiques de la contrefaçon sont considérables, ses répercussions sur la santé publique sont tout aussi préoccupantes. Les cigarettes contrefaites échappent à toute réglementation et à tout contrôle de qualité. Elles peuvent contenir des substances extrêmement nocives, issues de procédés de fabrication clandestins ne respectant aucune norme sanitaire.
“Ces produits, dépourvus de tout contrôle sur les taux de goudron, de nicotine ou de métaux lourds, représentent un risque réel pour la santé publique”, a alerté Francis Rabarijohn, directeur général d’Imperial Tobacco. Selon lui, certaines analyses effectuées par le groupe ont révélé la présence de contaminants dangereux dans des cigarettes illicites saisies sur le marché, notamment du plomb et de l’arsenic, dont les effets sur la santé sont dévastateurs.
La consommation de produits contrefaits multiplie ainsi les risques de maladies respiratoires, de cancers et de troubles cardiovasculaires. De plus, ces produits, vendus à bas prix, ciblent souvent les populations les plus modestes, accentuant les inégalités sanitaires.
Pour prévenir tout danger, les autorités malgaches ont confirmé que la cargaison saisie sera détruite par enfouissement sous la supervision d’experts et de représentants des services compétents. Cette mesure vise à empêcher toute réintroduction de ces cigarettes sur le marché. Elle marque également la volonté du gouvernement d’affirmer une tolérance zéro à l’égard des produits illégaux susceptibles de mettre en péril la santé publique.
La Douane, en collaboration avec le ministère de la Santé, prévoit également de renforcer les campagnes de sensibilisation sur les dangers des produits contrefaits. L’objectif est d’informer les consommateurs et de les encourager à privilégier les circuits légaux.
Une coopération renforcée entre la Douane et le secteur privé
La lutte contre la contrebande et la contrefaçon de tabac nécessite une coordination étroite entre les pouvoirs publics et les acteurs économiques. Dans cette affaire, la Douane malgache a travaillé en étroite collaboration avec le groupe Imperial Brands Madagascar, filiale du géant britannique Imperial Tobacco, afin d’identifier l’origine des produits saisis et de retracer les circuits de distribution illégaux.
Cette coopération s’inscrit dans un partenariat durable visant à renforcer les contrôles douaniers et à mettre en place des outils de traçabilité plus efficaces. Des formations conjointes sont régulièrement organisées pour sensibiliser les agents sur les méthodes de dissimulation utilisées par les trafiquants. L’objectif est de doter les autorités malgaches de moyens techniques et logistiques adaptés à la complexité croissante des réseaux de contrebande.
De son côté, la société Promodim, en tant que représentant exclusif de la marque “Good Look”, s’engage à intensifier les contrôles internes et à collaborer pleinement avec les autorités. “Nous devons unir nos efforts pour éradiquer ce fléau qui menace à la fois notre économie, notre santé publique et notre réputation internationale”, a déclaré un porte-parole de l’entreprise.
La coopération entre la Douane et le secteur privé constitue ainsi une stratégie essentielle pour freiner la prolifération des produits contrefaits. En partageant leurs informations et leurs expertises, ces partenaires espèrent identifier plus rapidement les filières de fraude et démanteler les réseaux opérant dans les ports et sur les axes de transport.
Des mesures de contrôle et de prévention appelées à se renforcer
À la suite de cette saisie, la Douane a annoncé une intensification de ses opérations de contrôle sur l’ensemble du territoire. Des dispositifs de surveillance plus stricts seront déployés dans les principaux ports, aéroports et points frontaliers. L’objectif est de mieux détecter les cargaisons suspectes avant leur mise en circulation.
Les services douaniers entendent également moderniser leurs outils de suivi et de traitement des données commerciales. L’utilisation de technologies de traçabilité numérique et de scanners à haute performance permettra de renforcer l’efficacité des inspections et de réduire les possibilités de fraude.
Par ailleurs, un projet de réforme du Code des douanes est en cours d’étude afin d’adapter le cadre juridique aux nouvelles formes de criminalité économique. Il prévoit notamment des sanctions plus sévères contre les auteurs de contrefaçons et les importateurs illégaux.
Les autorités malgaches envisagent aussi de collaborer davantage avec les pays voisins pour mettre en place un réseau régional de lutte contre le commerce illicite de produits du tabac. Cette approche transfrontalière vise à mieux contrôler les flux logistiques entre Madagascar et les autres États de la région de l’océan Indien, souvent utilisés comme zones de transit par les trafiquants.
Enfin, la Douane souhaite renforcer la sensibilisation du grand public. Une campagne d’information sera lancée pour rappeler que l’achat de cigarettes de contrebande ne constitue pas seulement une infraction, mais contribue aussi à fragiliser les finances publiques et à mettre en danger la santé des consommateurs.
Une bataille économique et morale pour l’État malgache
L’affaire du conteneur de Mahajanga ne se limite pas à une question de fraude commerciale : elle illustre les défis économiques, sociaux et éthiques auxquels fait face Madagascar dans sa lutte contre la contrefaçon. Les produits illicites sapent les efforts du gouvernement pour instaurer une économie transparente, réduire la pauvreté et financer les services essentiels.
Au-delà des pertes fiscales, ce trafic alimente des circuits criminels et favorise la corruption. Il affaiblit la confiance des citoyens dans les institutions et compromet les engagements du pays en matière de bonne gouvernance. C’est pourquoi la répression de la contrefaçon est désormais considérée comme une priorité nationale.
Les autorités malgaches entendent poursuivre et intensifier cette lutte dans le cadre d’une stratégie globale de sécurisation des échanges commerciaux. L’enjeu dépasse la simple protection des marques : il s’agit de défendre l’intégrité du marché intérieur, la santé publique et l’image du pays sur la scène internationale.
Cette affaire, emblématique de la lutte contre l’importation frauduleuse, rappelle que chaque cargaison illégale interceptée est une victoire non seulement pour l’État, mais aussi pour l’ensemble des citoyens. Elle témoigne de la volonté du gouvernement de renforcer la légalité économique et de protéger les consommateurs face à des réseaux de plus en plus sophistiqués.