Malgré une façade séduisante, le baromètre de l'attractivité économique en France, publié par le cabinet EY le 2 mai dernier, cache des nuances importantes quant aux impacts réels sur l'emploi. Cette année, la France affiche 1 194 projets d'investissements étrangers, devançant ainsi le Royaume-Uni et l'Allemagne. Cependant, l'analyse approfondie révèle une situation bien moins encourageante.
L’attrait de l’investissement étranger : une fausse victoire
Le dernier baromètre EY a hissé la France en tête des pays européens pour le nombre de projets d’investissements étrangers, la plaçant devant ses voisins, le Royaume-Uni et l’Allemagne. Cette nouvelle a été rapidement relayée par les éditorialistes économiques, qui s'en sont réjouis en soulignant l’efficacité des politiques gouvernementales pour attirer les investisseurs internationaux. Les responsables politiques, quant à eux, ont interprété ces chiffres comme une validation de leurs choix économiques, allant des réductions fiscales à la réforme controversée des retraites.
Toutefois, cette interprétation repose sur une utilisation trompeuse des statistiques. En effet, le nombre de projets n’est pas nécessairement révélateur de leur impact économique. Pour comprendre l'effet réel de ces investissements, il est essentiel de se pencher sur le nombre d'emplois qu'ils génèrent, directement ou indirectement.
Les limites du modèle : une création d’emploi en demi-teinte
Selon le baromètre EY, les investissements étrangers en France en 2023 ont engendré 39 773 emplois. Bien que ce chiffre puisse sembler important, il doit être relativisé. En réalité, il place la France derrière le Royaume-Uni et l’Espagne en termes de création d’emplois liés aux investissements étrangers. De plus, ce chiffre masque une réalité préoccupante : la création nette d’emplois reste largement insuffisante.
En 2023, la France a enregistré 142 000 chômeurs supplémentaires, soit 3,5 fois plus de nouveaux chômeurs que d'emplois créés par les investissements étrangers. Ce décalage illustre le déséquilibre structurel du marché du travail français et montre que ces investissements ne suffisent pas à pallier les pertes d’emplois.
Les enjeux politiques d’un baromètre
La présentation du baromètre EY reflète davantage un enjeu politique qu’une réalité économique. Les chiffres sont utilisés par le gouvernement pour justifier ses réformes, telles que les allègements fiscaux pour les entreprises et la réforme des retraites. Toutefois, une telle lecture ne tient pas compte du contexte économique global. Les politiques qui visent principalement à attirer les investissements étrangers doivent être accompagnées d’autres mesures favorisant la création d’emplois locaux et durables.
Une stratégie à repenser
Il devient crucial de repenser la stratégie économique nationale en prenant en compte les résultats du baromètre EY. Plutôt que de s’appuyer uniquement sur l’attraction d’investissements étrangers, la France doit se concentrer sur la promotion de ses industries locales, le soutien aux PME innovantes, et la formation de sa main-d’œuvre pour répondre aux besoins futurs.
Le baromètre EY dresse un portrait séduisant mais trompeur de l’attractivité économique française. Si la France domine en nombre de projets d’investissements, son impact réel sur l’emploi reste insuffisant. Pour faire face aux défis du chômage et de la compétitivité, une stratégie économique équilibrée, centrée sur le développement des talents locaux et la diversification de l’économie, est essentielle.
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