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L'ACTUALITÉ DE LA GRANDE ÎLE DEPUIS 1929

Crise à Madagascar : le général Nonos Mbina Mamelison prend la tête de la gendarmerie au cœur de la tourmente nationale

La crise politique et institutionnelle qui secoue actuellement Madagascar vient de franchir une étape décisive. Ce lundi matin, un changement majeur s’est opéré au sein de la gendarmerie nationale : le général Nonos Mbina Mamelison a officiellement pris la tête de l’institution, en présence des ministres de la Défense, de la Gendarmerie nationale et du nouveau chef d’état-major des armées. Cet événement intervient à la suite d’un week-end marqué par une mutinerie inédite au sein des forces de l’ordre, révélant la profondeur du malaise au sein de l’appareil sécuritaire du pays. La nomination de ce nouveau commandant, qui s’était auto-proclamé à ce poste 24 heures plus tôt, marque un tournant dans la gestion de la contestation populaire et redéfinit les équilibres au sein de l’État.

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Une nomination inattendue dans un climat explosif

La matinée de lundi a été marquée par une scène d’une rare intensité symbolique : le général Nonos Mbina Mamelison, jusque-là commandant du FIGN (Force d’Intervention de la Gendarmerie Nationale), a été officiellement installé comme nouveau commandant de la gendarmerie nationale. La cérémonie, sobre mais lourde de sens, s’est tenue en présence de hauts responsables militaires et politiques. Elle intervient à un moment où Madagascar traverse une crise politique sans précédent, alimentée par des contestations sociales et institutionnelles d’une ampleur croissante.

La veille encore, le général Mamelison avait surpris la classe dirigeante en annonçant publiquement que son unité entrait en mutinerie. Dans une déclaration solennelle, il affirmait rallier le mouvement de protestation national, estimant que les forces de l’ordre ne pouvaient plus « continuer à réprimer le peuple ». Son discours, diffusé sur plusieurs réseaux sociaux et médias locaux, a eu l’effet d’une déflagration au sein de l’armée et de la gendarmerie.

En quelques heures, celui qui était considéré comme un officier loyaliste est devenu le symbole d’une rupture au sein des institutions de sécurité. Son ralliement au mouvement contestataire a bouleversé la donne politique, forçant les autorités à réagir rapidement. Dès le lendemain, le gouvernement a entériné sa nomination à la tête de la gendarmerie, officialisant un changement qui aurait semblé impensable quelques jours auparavant.

Cette passation de pouvoir, intervenue dans un contexte tendu, traduit l’urgence de restaurer une forme de stabilité et de cohésion au sein des forces armées. Mais elle soulève aussi de nombreuses questions : s’agit-il d’un compromis politique pour apaiser la situation, ou d’un signe que le pouvoir tente d’intégrer les contestataires pour éviter une fracture totale de l’État ?

Le FIGN, épicentre d’une mutinerie historique

Pour comprendre la portée de cet événement, il faut revenir sur le rôle central du FIGN dans la structure sécuritaire malgache. Le FIGN, ou Force d’Intervention de la Gendarmerie Nationale, est une unité d’élite, réputée pour sa discipline et sa capacité à intervenir lors des crises majeures. C’est cette même unité qui, jusqu’à récemment, était en première ligne dans la répression des manifestations à travers le pays.

Lorsque le général Nonos Mbina Mamelison, à la tête de cette unité, a annoncé que ses hommes refusaient désormais d’obéir aux ordres de répression, le choc a été immense. La mutinerie, un mot rarement prononcé dans l’histoire récente de la gendarmerie, a résonné comme un signal fort d’un malaise profond au sein des forces de sécurité. Selon plusieurs témoins, le général aurait réuni ses troupes avant de leur expliquer qu’il n’était plus possible de se dresser contre la population qu’ils étaient censés protéger. Ce message, empreint de patriotisme et de conscience nationale, a trouvé un écho immédiat parmi les gendarmes, mais aussi dans la société civile.

Le ralliement du FIGN au mouvement de protestation a eu un effet domino. Dans plusieurs régions du pays, des unités locales ont exprimé leur solidarité avec leurs camarades, refusant de participer à de nouvelles opérations de dispersion des manifestants. Ce phénomène, inédit depuis les années 2009, témoigne d’une fracture entre la base et la hiérarchie militaire.

Les autorités ont rapidement compris que la situation pouvait dégénérer en affrontement interne. En officialisant la nomination du général Mamelison, le gouvernement a cherché à contenir la contagion en reconnaissant de facto la légitimité du mouvement au sein des forces de l’ordre. Ce geste a été interprété comme une tentative d’apaisement, mais aussi comme une reconnaissance implicite de la nécessité de changement dans la gouvernance sécuritaire.

Une gendarmerie au cœur de la contestation nationale

Jusqu’à ce week-end, la gendarmerie nationale incarnait la ligne de fermeté du gouvernement face à la montée de la contestation. Présente dans toutes les grandes villes, elle avait été déployée massivement pour disperser les manifestations qui réclamaient des réformes politiques et la démission de plusieurs responsables jugés incompétents. Son rôle dans la répression avait été vivement critiqué par les organisations de défense des droits humains, qui dénonçaient un usage excessif de la force.

L’annonce de la mutinerie du FIGN a donc bouleversé cet équilibre. Pour la première fois, une partie des forces de l’ordre choisissait de se ranger du côté de la population. Ce renversement symbolique a immédiatement modifié le rapport de force sur le terrain. Dans plusieurs villes, les manifestants ont salué cette décision en scandant le nom du général Mamelison, désormais perçu comme un homme de courage et de conviction.

La gendarmerie, qui était jusqu’alors divisée entre devoir d’obéissance et conscience morale, se trouve aujourd’hui à un tournant historique. Sous la nouvelle direction du général Mamelison, elle pourrait redéfinir sa mission, passant d’une logique de répression à une logique de protection. Ce changement de paradigme, s’il se confirme, marquerait un tournant dans la relation entre les forces de l’ordre et la population.

Toutefois, la situation demeure fragile. Des tensions internes subsistent entre les officiers favorables au maintien de la ligne gouvernementale et ceux qui soutiennent la nouvelle orientation du commandement. Le défi du nouveau chef de la gendarmerie sera donc de restaurer la cohésion interne tout en répondant aux attentes de la population, de plus en plus méfiante envers les institutions.

Les implications politiques d’un changement majeur

Le remplacement du commandant de la gendarmerie nationale ne saurait être interprété comme un simple ajustement administratif. Dans le contexte actuel, il s’agit d’un acte profondément politique, porteur d’enjeux stratégiques majeurs. À Madagascar, la gendarmerie occupe une place centrale dans l’appareil d’État : elle est à la fois force de sécurité, instrument d’ordre public et garant de la stabilité territoriale. Son positionnement dans la crise actuelle peut donc déterminer l’avenir du pays à court terme.

La décision du gouvernement de valider la nomination du général Mamelison peut être vue sous deux angles. D’un côté, elle constitue un geste d’ouverture, une manière de désamorcer la tension et de montrer que le pouvoir reste à l’écoute des revendications. D’un autre côté, certains analystes y voient une manœuvre politique visant à neutraliser la contestation en intégrant ses figures les plus influentes dans la hiérarchie.

Ce changement à la tête de la gendarmerie pourrait également avoir des répercussions sur le rapport entre l’armée et la classe politique. Le nouveau chef d’état-major des armées, présent lors de la cérémonie de passation, a souligné la nécessité de « rétablir la confiance et l’unité nationale ». Une déclaration qui traduit la conscience aiguë du risque de désintégration institutionnelle. Dans ce contexte, le rôle du général Mamelison ne se limite plus à la gestion d’une institution : il devient un acteur clé du rétablissement de l’ordre républicain.

Sur le plan diplomatique, la communauté internationale suit de près cette évolution. Les partenaires étrangers de Madagascar, notamment l’Union africaine et plusieurs pays européens, s’inquiètent d’une possible dérive militaire. Le spectre d’une crise comparable à celle de 2009, marquée par une transition chaotique, hante encore les esprits. Le nouveau commandant devra donc composer entre la pression politique interne et les attentes internationales, tout en préservant la neutralité de l’institution qu’il dirige.

Un pays en quête de stabilité et de confiance

La nomination du général Nonos Mbina Mamelison intervient dans un contexte où la population malgache exprime une lassitude profonde face aux crises à répétition. Depuis plusieurs semaines, des manifestations massives secouent le pays, alimentées par la dégradation du pouvoir d’achat, les accusations de corruption et la perte de confiance dans les institutions. Le mouvement de protestation, initialement mené par des organisations civiles, a progressivement gagné le soutien de certaines composantes des forces de sécurité, signe d’un malaise généralisé.

Pour beaucoup, la mutinerie du FIGN et le changement à la tête de la gendarmerie traduisent une fracture entre la base et le sommet de l’État. La population, souvent victime des violences policières, voit dans ce tournant une lueur d’espoir. Certains manifestants ont salué ce qu’ils considèrent comme « un acte de patriotisme », estimant que la gendarmerie, en refusant d’obéir à des ordres jugés injustes, se rapproche enfin du peuple.

Mais la route vers la stabilité reste semée d’embûches. La crise actuelle ne se limite pas à un problème de commandement : elle révèle des dysfonctionnements profonds dans la gouvernance du pays. L’absence de dialogue entre les autorités et les citoyens, la politisation des forces de sécurité et la méfiance généralisée envers les institutions ont créé un climat explosif. Pour restaurer la confiance, il faudra bien plus qu’un changement de chef : c’est tout un système de gestion publique et de sécurité qu’il faudra repenser.

Le général Mamelison, désormais figure de proue de cette recomposition, porte sur ses épaules une lourde responsabilité. S’il parvient à rétablir la discipline au sein de la gendarmerie tout en préservant son indépendance vis-à-vis du pouvoir politique, il pourrait devenir un acteur central du retour à la stabilité. À l’inverse, toute erreur d’appréciation pourrait rallumer les tensions et plonger le pays dans une crise encore plus profonde.

Entre espoir et incertitude : quel avenir pour la gendarmerie malgache ?

Le changement à la tête de la gendarmerie nationale ne clôt pas la crise, mais il en redéfinit les contours. Dans les jours et semaines à venir, plusieurs scénarios sont envisageables. Le premier, optimiste, verrait le général Mamelison réussir à instaurer un dialogue entre le gouvernement, les forces armées et la société civile, conduisant à une désescalade progressive. Le second, plus pessimiste, redoute une scission durable au sein de la gendarmerie, voire une confrontation ouverte entre factions rivales.

Pour l’heure, le ton du nouveau commandant semble apaisant. Lors de sa première allocution officielle, il a déclaré vouloir « rétablir la confiance entre la gendarmerie et le peuple » et « garantir la sécurité de tous sans distinction ». Des propos salués par certains observateurs comme un signe d’ouverture, mais accueillis avec prudence par d’autres, qui rappellent que les crises institutionnelles à Madagascar ont souvent été suivies de retours en arrière.

L’avenir de la gendarmerie dépendra également de sa capacité à rester une institution républicaine, indépendante des luttes de pouvoir. La ligne de crête est étroite : entre loyauté envers l’État et fidélité à la population, le risque de dérive est réel. Les prochaines semaines seront donc cruciales pour déterminer si ce changement marque le début d’un renouveau ou une simple parenthèse dans une crise plus large.

Conclusion : un tournant historique dans la crise malgache

La nomination du général Nonos Mbina Mamelison à la tête de la gendarmerie nationale représente bien plus qu’un simple changement de commandement. Elle incarne un tournant décisif dans une crise qui dépasse largement le cadre militaire. En officialisant la prise de fonction d’un officier qui s’était publiquement rallié au mouvement de contestation, les autorités malgaches reconnaissent implicitement l’ampleur du malaise au sein de l’appareil d’État.

Cette décision, si elle est bien gérée, pourrait ouvrir la voie à un apaisement et à une reconstruction institutionnelle fondée sur le dialogue et la responsabilité. Mais si elle se limite à un ajustement de façade, elle risque au contraire d’accentuer la méfiance et de prolonger la crise.

Dans un pays où les forces armées ont souvent joué un rôle déterminant dans les transitions politiques, le geste du général Mamelison restera dans l’histoire comme un acte audacieux, voire fondateur. Il symbolise la possibilité d’un sursaut moral au sein des institutions. Reste à savoir si cette étincelle suffira à rallumer la flamme de la stabilité et de la confiance dans un Madagascar en quête d’équilibre.

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