PLF 2026 : un budget en forte hausse pour l’Énergie, mais une chute spectaculaire pour le Tourisme
- TAHINISOA Ursulà Marcelle

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Le projet de loi de finances (PLF) pour l’année 2026, présenté par le gouvernement malgache, affiche une nette progression du budget global de l’État. Ce document budgétaire, essentiel pour la planification des politiques publiques du pays, met en lumière des choix politiques forts, notamment une orientation stratégique vers le secteur énergétique, au détriment apparent d’autres domaines, dont le tourisme. Selon les chiffres officiels, le budget général de Madagascar s’élèvera à 15 777 milliards d’ariary en 2026, contre environ 15 000 milliards en 2025. Une augmentation globale d’environ 5 %, traduisant la volonté de l’exécutif d’investir dans des secteurs jugés prioritaires pour le développement économique et social du pays.

Une enveloppe budgétaire globale en légère progression
Le budget global de 15 777 milliards d’ariary constitue un signal de continuité dans la politique budgétaire de Madagascar. L’augmentation, bien que modérée, traduit la volonté de soutenir des secteurs stratégiques tout en maintenant un certain équilibre des dépenses publiques.
Le PLF 2026 témoigne d’une redistribution des ressources entre ministères, selon des priorités fixées par le gouvernement. Si certains secteurs voient leur dotation augmenter de manière significative, d’autres subissent des réductions notables, voire drastiques. Ces réajustements budgétaires s’inscrivent dans un contexte économique mondial incertain, marqué par les défis énergétiques, les impératifs environnementaux et les difficultés de relance post-pandémie.
Ainsi, les autorités malgaches ont choisi d’axer leur effort sur des domaines jugés essentiels à long terme, notamment l’énergie et l’éducation, deux piliers d’un développement durable et inclusif.
L’Énergie, priorité nationale : un budget en hausse de 54 %
Le ministère de l’Énergie et des Hydrocarbures voit son budget bondir de 1 331 milliards d’ariary en 2025 à 2 049 milliards en 2026, soit une hausse impressionnante de 54 %. Ce choix illustre clairement la volonté du gouvernement de renforcer la sécurité énergétique du pays et de moderniser les infrastructures existantes.
Cette hausse considérable s’inscrit dans une logique de souveraineté énergétique, avec pour objectif de réduire la dépendance du pays aux importations et de favoriser la production locale. Madagascar dispose d’un potentiel important en matière d’énergies renouvelables – solaire, hydraulique, éolienne ou biomasse – et le gouvernement semble vouloir investir davantage dans ce domaine pour répondre à la demande croissante des ménages et des entreprises.
Le renforcement du budget pourrait également viser l’amélioration de la distribution électrique et la réhabilitation des réseaux existants, souvent vétustes. L’accès à l’électricité demeure un enjeu majeur dans les zones rurales, où une large partie de la population vit encore sans connexion au réseau national. Le PLF 2026 entend donc impulser une dynamique nouvelle pour combler ces retards structurels.
Cette réorientation budgétaire marque aussi un tournant politique : l’énergie devient un levier central du développement économique, capable de stimuler d’autres secteurs comme l’industrie, les transports ou encore l’agriculture.
L’effondrement du budget du Tourisme et de l’Artisanat : un recul préoccupant
À l’opposé de la progression du secteur énergétique, le budget du ministère du Tourisme et de l’Artisanat subit une réduction spectaculaire. Il passe de 961 milliards d’ariary à seulement 16 milliards, soit une baisse de plus de 98 %. Cette contraction budgétaire suscite de nombreuses interrogations quant à la stratégie du gouvernement dans un secteur pourtant vital pour l’économie nationale.
Le tourisme représente une source importante de devises pour Madagascar et constitue un moteur d’emplois directs et indirects. La chute d’un tel ordre de grandeur pourrait freiner les efforts de relance du secteur après les crises successives liées à la pandémie de Covid-19 et aux turbulences économiques mondiales.
Cette baisse brutale pourrait signifier une redéfinition du rôle du ministère ou un transfert de certaines compétences vers d’autres structures gouvernementales. Cependant, en l’absence d’explications officielles détaillées, il est difficile de déterminer les intentions exactes du gouvernement.
Les conséquences potentielles de cette réduction sont multiples : ralentissement des projets de développement touristique, gel des campagnes de promotion internationale, baisse du soutien aux artisans locaux, et affaiblissement de la compétitivité du pays sur le marché touristique mondial. Ce choix budgétaire, radical, traduit un changement d’orientation stratégique, au profit de secteurs jugés plus urgents ou prioritaires à court terme.
L’Éducation nationale, deuxième grand gagnant du PLF 2026
Outre l’énergie, le ministère de l’Éducation nationale bénéficie d’une augmentation notable de son budget. Il passe de 1 562 milliards d’ariary à 2 315 milliards, confirmant la place centrale de l’éducation dans les priorités de l’État. Cette hausse de près de 50 % témoigne d’une volonté affirmée de renforcer le système éducatif national, longtemps marqué par un manque de moyens matériels et humains.
L’investissement accru dans ce secteur pourrait permettre la construction de nouvelles infrastructures scolaires, la formation des enseignants et l’amélioration de la qualité de l’enseignement. Le gouvernement semble vouloir répondre aux défis d’un système éducatif confronté à la croissance démographique et aux disparités régionales.
Cette mesure s’inscrit également dans une vision à long terme : une population mieux formée représente un atout pour la croissance économique, la stabilité sociale et la lutte contre la pauvreté. L’accent mis sur l’éducation pourrait donc être perçu comme un investissement structurel dans le capital humain du pays.
Une baisse relative du budget de la Santé publique
Le ministère de la Santé publique voit son budget reculer légèrement, passant de 921 milliards à 856 milliards d’ariary. Cette baisse, bien que modérée, interroge dans un contexte où les besoins sanitaires restent importants, notamment en matière d’accès aux soins, de lutte contre les maladies endémiques et d’amélioration des infrastructures hospitalières.
Cette diminution pourrait s’expliquer par une réallocation des fonds vers d’autres priorités jugées plus urgentes ou par une rationalisation des dépenses internes. Toutefois, la santé demeure un secteur stratégique, et une baisse de moyens pourrait ralentir les programmes en cours, particulièrement dans les zones rurales où la couverture sanitaire est encore insuffisante.
La pandémie de Covid-19 a mis en évidence les fragilités du système de santé malgache. Le recul budgétaire risque donc d’être perçu comme un signal contradictoire, au moment où la résilience du système de santé reste une préoccupation majeure.
L’Eau et l’Assainissement, un secteur en progression
Le ministère de l’Eau, de l’Assainissement et de l’Hygiène voit son budget progresser sensiblement, passant de 306 milliards d’ariary à 474 milliards. Cette hausse reflète une volonté d’améliorer l’accès à l’eau potable et de renforcer les politiques publiques en matière d’hygiène.
L’accès à l’eau reste un défi pour une grande partie de la population malgache, notamment dans les zones rurales et périurbaines. Cette augmentation budgétaire permettra de soutenir des projets de construction de réseaux, de puits et de stations de traitement, essentiels à la santé publique et à la qualité de vie.
Elle traduit aussi une prise de conscience des enjeux environnementaux et sanitaires liés à la gestion durable des ressources en eau. Une politique efficace dans ce domaine peut avoir des effets positifs sur d’autres secteurs, comme la santé, l’éducation et l’agriculture.
Une réorientation stratégique marquée
Globalement, le PLF 2026 met en évidence une réorientation stratégique des priorités nationales. Le gouvernement malgache privilégie désormais les secteurs porteurs de croissance structurelle et de résilience, tels que l’énergie, l’éducation et l’eau. Ces choix traduisent la volonté d’investir dans des infrastructures de base et dans le capital humain.
Cependant, la chute spectaculaire du budget du tourisme suscite des interrogations. Ce secteur, historiquement vital pour l’économie du pays, pourrait pâtir d’un désengagement public, au moment même où la concurrence régionale s’intensifie.
Le PLF 2026, s’il marque une progression globale du budget de l’État, illustre avant tout des arbitrages économiques et politiques forts. Il témoigne d’une volonté d’adaptation aux défis actuels – énergétiques, sociaux et environnementaux – tout en posant la question de l’équilibre entre les impératifs de développement et la diversité des besoins nationaux.
Conclusion : entre ambition et déséquilibre
Le projet de loi de finances 2026 de Madagascar présente un visage contrasté. D’un côté, il affiche une ambition claire : renforcer les fondations du développement durable par l’investissement dans l’énergie, l’éducation et l’eau. De l’autre, il soulève des inquiétudes légitimes quant à la viabilité de certains secteurs négligés, en particulier le tourisme et la santé.
L’augmentation du budget global de l’État traduit un engagement en faveur du progrès, mais la répartition des ressources révèle des choix politiques assumés, parfois au détriment de domaines essentiels à court terme.
Ce PLF 2026 s’inscrit dans une logique de transformation structurelle. Il met en lumière les priorités d’un pays en quête d’autonomie énergétique, d’amélioration de ses infrastructures éducatives et sanitaires, et de modernisation de ses services publics. Toutefois, les effets concrets de ces orientations dépendront de la capacité du gouvernement à mettre en œuvre efficacement ces allocations et à maintenir un équilibre entre ambition économique et cohésion sociale.


