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L'ACTUALITÉ DE LA GRANDE ÎLE DEPUIS 1929

Vanille à Madagascar : la dissolution du CNV ouvre la voie à un ambitieux plan de redressement de la filière

Le gouvernement malgache a décidé de dissoudre le Conseil National de la Vanille (CNV) à l’issue d’une réunion stratégique tenue à Mahazoarivo, sous la direction du Premier ministre Herintsalama Andriamasy Rajaonarivelo. Cette décision marque un tournant majeur pour un secteur emblématique de l’économie nationale, fragilisé par des années de gestion contestée, de surproduction, de désorganisation et de perte de compétitivité sur le marché international. Le gouvernement a annoncé la mise en œuvre d’un plan de redressement de 12 à 18 mois, censé restaurer la crédibilité de la vanille malgache et rétablir la confiance entre les différents acteurs de la filière.

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Un organisme dissous après des critiques répétées

Créé en 2021, le Conseil National de la Vanille (CNV) avait pour mission d’encadrer et de réguler la filière vanille, l’un des produits phares de l’exportation malgache. Mais en trois ans d’existence, l’organisme a accumulé les critiques. Les professionnels du secteur, qu’ils soient producteurs, collecteurs ou exportateurs, ont régulièrement dénoncé le manque de transparence dans la gestion des autorisations, l’opacité des décisions administratives et l’absence de résultats concrets sur le terrain.

Les reproches se sont intensifiés au fil des campagnes, dans un contexte de surproduction et d’effondrement des prix à l’exportation. Les opérateurs ont souligné les lenteurs administratives et la complexité des démarches pour obtenir des agréments ou valider des dossiers d’exportation. Le CNV, censé être un instrument d’accompagnement et de régulation, est ainsi devenu le symbole des dysfonctionnements structurels du secteur.

La réunion de Mahazoarivo a scellé le sort de cette institution. Le gouvernement a jugé que sa dissolution était inévitable afin de repartir sur des bases saines. La décision, annoncée à l’issue des discussions entre les représentants de l’État et ceux du secteur privé, a été accueillie comme un signal fort d’un changement de cap dans la gouvernance du secteur.

Un diagnostic partagé sur la crise de la vanille malgache

La vanille est depuis longtemps une ressource stratégique pour Madagascar. Première productrice mondiale, l’île a bâti une grande partie de sa réputation internationale sur la qualité exceptionnelle de sa vanille Bourbon. Pourtant, les dernières années ont mis en lumière une crise profonde : volatilité extrême des prix, tensions entre opérateurs, spéculation, et perte de confiance des acheteurs internationaux.

Les acteurs réunis à Mahazoarivo ont dressé un diagnostic sans concession. Ils ont pointé du doigt la désorganisation du marché, la prolifération d’intermédiaires, le manque de coordination entre les autorités et les exportateurs, ainsi que les dérives dans la gestion des autorisations et des quotas. À cela s’ajoute une concurrence accrue sur le marché mondial, notamment en provenance d’Indonésie et d’Ouganda, qui ont profité des faiblesses malgaches pour gagner des parts de marché.

Le gouvernement a reconnu la nécessité d’une refonte complète du dispositif. Selon les autorités, la dissolution du CNV n’est pas une fin en soi, mais une étape vers une réorganisation profonde de la filière. Les discussions ont mis en avant la volonté commune de restaurer la réputation de la vanille malgache, mise à mal par plusieurs années d’instabilité et d’inefficacité administrative.

Vers une nouvelle gouvernance fondée sur la transparence

L’un des points centraux de la réforme annoncée concerne la gouvernance du secteur. Le gouvernement a promis que toutes les gestions antérieures seraient soumises à un audit complet. Cette opération visera à identifier les dysfonctionnements, les abus éventuels et les failles du système d’autorisation mis en place sous la tutelle du CNV.

Les conditions d’obtention d’autorisations seront désormais publiées de manière transparente, afin d’éviter toute confusion ou suspicion de favoritisme. Le ministère du Commerce et de l’Industrie, appuyé par le Premier ministre, prévoit de créer un guichet unique chargé de centraliser l’ensemble des démarches administratives liées à la filière. Cet outil doit simplifier les procédures et réduire les délais qui pénalisaient jusqu’ici les opérateurs.

Les représentants du secteur privé, qui ont longtemps dénoncé la lourdeur administrative, ont salué cette initiative. Ils estiment qu’un système clair et équitable permettra non seulement de restaurer la confiance, mais aussi d’encourager les investissements et d’améliorer la compétitivité des producteurs locaux.

Ce virage vers la transparence constitue un enjeu majeur pour redonner à Madagascar sa position dominante sur le marché mondial de la vanille, tout en garantissant une meilleure répartition des bénéfices entre les différents maillons de la chaîne.

Un plan de redressement sur 18 mois pour relancer la filière

Le plan de redressement annoncé s’étendra sur une période de 12 à 18 mois. Il s’articulera autour de plusieurs axes prioritaires : la réorganisation institutionnelle, la restructuration de la production, la valorisation de la qualité, et la restauration de la confiance auprès des partenaires commerciaux étrangers.

L’objectif principal est de rendre à la vanille malgache sa compétitivité et sa valeur ajoutée. Le gouvernement souhaite redéfinir les mécanismes de fixation des prix afin d’assurer une rémunération plus équitable pour les producteurs, tout en maintenant un niveau de qualité conforme aux standards internationaux.

Le plan prévoit également la mise en place d’un cadre réglementaire modernisé, qui simplifiera les conditions d’exportation et encouragera la traçabilité des produits. L’idée est de créer un environnement plus prévisible pour les acteurs économiques, en réduisant les incertitudes liées aux autorisations et aux contrôles administratifs.

Sur le plan social, les autorités entendent mieux répartir les bénéfices le long de la filière. Aujourd’hui, les petits producteurs sont souvent les premiers touchés par les crises de prix, sans pouvoir bénéficier des périodes de prospérité. Le redressement visera donc à corriger ces déséquilibres, en favorisant des mécanismes plus justes de partage des revenus.

Enfin, le gouvernement souhaite engager un dialogue constant avec les opérateurs, afin d’assurer un suivi régulier de la mise en œuvre du plan et d’adapter les mesures aux réalités du terrain. Cette concertation permanente sera essentielle pour éviter les erreurs du passé et consolider les bases d’une relance durable.

Une filière stratégique au cœur de l’économie nationale

La vanille n’est pas seulement un produit d’exportation ; elle incarne une part importante de l’identité économique et culturelle de Madagascar. Des milliers de familles dépendent directement de sa culture, particulièrement dans les régions de Sava, d’Analanjirofo et d’Atsinanana.

Le secteur contribue de manière significative aux recettes d’exportation du pays et à la stabilité des communautés rurales. C’est pourquoi sa restructuration dépasse la simple question économique : elle constitue un enjeu social et territorial majeur.

La crise actuelle a révélé la vulnérabilité du modèle existant, reposant sur une forte dépendance à un produit soumis aux aléas du marché mondial. Le plan de redressement devra donc aussi intégrer des mesures de diversification économique et d’appui technique aux producteurs, afin de renforcer leur résilience face aux variations de prix.

Le gouvernement malgache espère que cette réforme globale marquera le début d’une nouvelle ère pour la vanille, fondée sur la transparence, la compétitivité et la durabilité. L’ambition affichée est claire : faire de la vanille malgache un modèle d’excellence, à la fois reconnu et respecté sur les marchés internationaux.

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