Qui est Soraya Mouloudji, la femme politique ?

Née le 8 octobre 1977, Soraya Mouloudji s’est imposée en quelques années comme une figure de l’exécutif algérien, appelée successivement à piloter deux portefeuilles aux logiques très différentes : d’abord la Culture et les Arts, puis la Solidarité nationale, la Famille et la Condition de la femme. Son parcours, marqué par l’université et la recherche en anthropologie sociale et culturelle, éclaire un profil souvent décrit comme celui d’une responsable issue du monde académique, propulsée au cœur de l’action gouvernementale.

Au-delà des intitulés, les deux séquences ministérielles racontent aussi une manière de gouverner et de communiquer : mise en avant d’une “feuille de route” et d’une culture “participative” au moment de son arrivée à la Culture, puis accent mis sur la protection de l’enfance, l’accompagnement des familles et la place des femmes lorsqu’elle rejoint la Solidarité nationale. Les articles d’agences, les comptes rendus d’activités et plusieurs entretiens donnent à voir une ministre présente sur des dossiers de politique publique, tout en restant relativement discrète sur l’affichage partisan, dans un système où la nomination et la rotation des portefeuilles relèvent d’abord de l’arbitrage présidentiel.

Un parcours académique ancré à Oran et dans la recherche en sciences sociales

La biographie publique de Soraya Mouloudji met d’abord en avant une trajectoire universitaire. Titulaire d’un doctorat en traduction et en anthropologie, elle a enseigné à l’université d’Oran entre 2003 et 2010, avant de poursuivre son activité dans la recherche.

Elle est associée au Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC), structure de référence en Algérie dans le champ des sciences sociales, où elle occupe un poste de chercheuse. Avant sa nomination au gouvernement, elle est également mentionnée comme directrice par intérim du CRASC, fonction exercée de septembre 2021 à février 2022.

Les éléments disponibles insistent aussi sur une production scientifique multilingue : des articles publiés en arabe, en français et en anglais, ainsi qu’un travail consacré aux recherches socio-anthropologiques de Pierre Bourdieu sur l’Algérie, comprenant un volet de traduction vers l’arabe.

Dans la mise en récit de son parcours, cette dimension académique joue un rôle central : elle nourrit l’image d’une responsable qui arrive au ministère avec des repères issus de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’analyse des sociétés. Plusieurs portraits publiés au moment de sa première nomination soulignent précisément cette transition du monde de la recherche vers l’appareil exécutif.

Il faut toutefois noter une difficulté classique dès que l’on veut aller plus loin : hors communications officielles et portraits de presse, les informations publiques restent relativement cadrées, centrées sur ses fonctions et moins sur sa trajectoire personnelle. On retrouve l’essentiel dans les présentations biographiques qui accompagnent sa prise de fonctions et dans les synthèses reprenant ces mêmes éléments.

Une entrée au gouvernement par la Culture et les Arts en 2022

Soraya Mouloudji entre au gouvernement en février 2022. L’agence Algérie Presse Service (APS) rapporte qu’elle prend ses fonctions de ministre de la Culture et des Arts le 19 février 2022, en remplacement de Wafaa Chaâlal, lors d’une cérémonie au siège du ministère à Alger.

Cette séquence d’arrivée est décrite avec un vocabulaire qui, dans les comptes rendus institutionnels, sert souvent à cadrer les priorités du nouveau titulaire. Dans le même article, APS indique qu’elle annonce vouloir mettre en place une “feuille de route” pour instaurer une culture “participative” et “dynamique”, tout en œuvrant à la “valorisation” de la culture dans ses expressions matérielles et immatérielles.

Toujours selon APS, l’accent est également mis, dès l’installation, sur l’entrepreneuriat culturel et sur l’idée que la culture peut être l’un des piliers de l’économie nationale et du développement durable. Cette approche, fréquemment mobilisée dans les politiques culturelles contemporaines, vise à dépasser la seule logique patrimoniale pour intégrer les secteurs créatifs dans une perspective d’activité, d’emploi et de structuration du marché artistique.

Les portraits publiés à cette période rappellent enfin que, dans l’organigramme gouvernemental, la Culture connaît alors une rotation rapide de titulaires. Certains articles relèvent que Soraya Mouloudji fait partie des femmes ayant occupé ce portefeuille dans une période de changements successifs, ce qui ajoute un enjeu de continuité : installer une méthode, des priorités, et une capacité à tenir une ligne dans un ministère soumis à des attentes fortes du monde artistique et culturel.

Entre 2022 et 2023, les synthèses biographiques disponibles indiquent qu’elle exerce la fonction de ministre de la Culture et des Arts dans le gouvernement Benabderrahmane, puis qu’elle est reconduite dans ce portefeuille en 2023, avant d’être ensuite appelée à d’autres responsabilités.

Culture : entre feuille de route, statut de l’artiste et diplomatie culturelle

Au ministère de la Culture et des Arts, les prises de parole relayées par la presse et les agences mettent en avant une vision d’organisation du secteur artistique. Dans un entretien publié par 24H Algérie, Soraya Mouloudji revient sur le statut de l’artiste et sur l’idée de structurer un marché du travail “organisé” pour les professionnels de la culture, en évoquant les conditions de reconnaissance des métiers artistiques et les dispositifs associés (carte d’artiste, cadre contractuel, protection).

Dans la communication institutionnelle, ces thématiques servent souvent à répondre à une critique récurrente formulée par les artistes : précarité, absence d’intermittence comparable à certains systèmes étrangers, faiblesse de la couverture sociale, manque de transparence des circuits de financement. Les contenus publics disponibles ne permettent pas toujours de mesurer l’application concrète des annonces, mais ils éclairent les priorités affichées : rendre le secteur plus lisible, encadrer les pratiques et clarifier les statuts.

Son passage à la Culture est également ponctué d’actions symboliques ou d’équipements. Une information souvent reprise est l’inauguration, en juin 2022, du Palais de la Culture à Oran après plusieurs années de travaux, événement présenté comme un signal de relance d’une infrastructure culturelle majeure dans l’ouest du pays.

À l’échelle internationale, la ministre est aussi associée à des séquences de diplomatie culturelle. APS relate par exemple des entretiens bilatéraux à Alger, en novembre 2024, avec le ministre de la Culture du Qatar, autour des moyens de renforcer les relations bilatérales dans le domaine des arts, dans un format typique de coopération culturelle (échanges, projets, coordination institutionnelle).

Un autre registre apparaît dans les entretiens accordés à des supports institutionnels, où la Culture est articulée à des thèmes de mémoire, d’identité nationale et de préservation du patrimoine. Un compte rendu d’actualité signale par exemple un entretien donné à une revue, dans lequel elle évoque l’importance du “devoir de mémoire” pour préserver l’identité nationale.

Il est important de rester prudent sur la portée exacte de ces déclarations : elles sont fréquentes dans les discours publics du secteur culturel et relèvent parfois d’un cadrage politique général. Mais elles aident à comprendre le positionnement affiché : la culture comme patrimoine et identité, la culture comme économie, et la culture comme secteur professionnel à organiser.

Novembre 2024 : bascule vers la Solidarité nationale, la Famille et la Condition de la femme

La deuxième grande séquence gouvernementale de Soraya Mouloudji s’ouvre à l’automne 2024. Le 18 novembre 2024, elle est nommée ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Condition de la femme.

La presse algérienne présente cette nomination comme s’inscrivant dans un remaniement ministériel. Plusieurs comptes rendus précisent qu’elle remplace Kaoutar Krikou à ce portefeuille et qu’elle prend officiellement ses fonctions le 19 novembre 2024.

Le changement de ministère n’est pas anodin : il la fait passer d’un secteur tourné vers la production culturelle, le patrimoine et l’économie créative à un champ social qui traite d’enfance, de protection sociale, de familles vulnérables, d’action associative, et de politiques publiques liées aux droits et à la place des femmes. La dénomination même du portefeuille, en Algérie, agrège plusieurs missions : solidarité nationale, famille, condition de la femme.

Dans les mois qui suivent, l’actualité de la ministre est documentée par des dépêches et comptes rendus d’activité. APS relate par exemple une visite au siège de l’Organe national de la protection et de la promotion de l’enfance (ONPPE), présentée comme s’inscrivant dans une politique nationale de promotion de l’enfance et de renforcement de la coordination institutionnelle entre les acteurs du domaine.

Sur le plan international et régional, d’autres séquences la montrent impliquée dans des rencontres et échanges. APS mentionne, fin octobre 2025, une réception à Alger d’une ministre soudanaise à l’occasion d’une assemblée générale d’une union d’institutions économiques et sociales arabes, illustrant le rôle protocolaire et diplomatique que conserve un ministère social dans les formats intergouvernementaux.

Enfin, la ministre prend aussi la parole dans des contextes économiques et de forum, comme l’illustre un article d’El Moudjahid, qui rapporte une intervention où elle met en avant le rôle de la diaspora africaine dans le développement du continent, en marge d’un forum lié à l’IATF 2025 et au Forum CANEX.

Une ministre souvent décrite comme “technicienne” : image publique, communication et enjeux

La question “Qui est Soraya Mouloudji ?” renvoie autant à une biographie qu’à une place dans le paysage politique. Plusieurs commentaires de presse évoquent, à son sujet, l’idée d’une ministre “technique”, issue de la société civile et du monde académique, davantage identifiée par ses compétences sectorielles que par une trajectoire partisane mise en avant publiquement.

Cette présentation n’empêche pas une réalité institutionnelle : être ministre est, par définition, exercer une responsabilité politique au sein d’un gouvernement, avec un agenda, des arbitrages budgétaires et des choix publics. Mais, dans la manière dont elle est introduite au grand public, le récit insiste sur l’expertise (anthropologie, traduction, recherche) et sur la capacité à gérer un portefeuille, plus que sur une identité partisane explicitée.

Ses prises de parole publiques, telles qu’elles ressortent des sources disponibles, privilégient généralement des thèmes de politique publique : structuration du secteur artistique, valorisation du patrimoine, rôle de la culture dans l’économie, puis protection de l’enfance, accompagnement des familles et promotion de la femme. Dans une interview rapportée par Horizons, elle détaille par exemple des mesures d’accompagnement des familles à l’occasion de la rentrée scolaire, ce qui inscrit sa communication dans un registre concret, centré sur l’action sociale.

La visibilité médiatique de Soraya Mouloudji est donc à la fois réelle et contenue : réelle, parce que ses fonctions l’exposent régulièrement lors de cérémonies, visites, rencontres bilatérales et annonces ; contenue, parce que le récit biographique public demeure relativement succinct, et parce que la communication reste souvent institutionnelle, cadrée par des dépêches et des comptes rendus.

Deux enjeux se dégagent de cette trajectoire récente.

Le premier concerne la continuité de l’action publique entre des portefeuilles très différents. Passer de la Culture à la Solidarité nationale implique un changement d’administration, de partenaires, de publics prioritaires et d’indicateurs d’action. Les sources disponibles montrent une ministre qui s’installe dans son nouveau champ par des gestes institutionnels (prise de fonctions, rencontres, visites d’organismes) et par une communication axée sur les familles, l’enfance et la place des femmes.

Le second enjeu concerne la place des femmes dans l’exécutif algérien, un thème régulièrement valorisé dans les communications officielles et dans certains comptes rendus de remaniements. La nomination de Soraya Mouloudji à un portefeuille explicitement lié à la condition de la femme s’inscrit dans ce cadre, même si les informations publiques disponibles dans les sources ici mobilisées portent davantage sur des activités et des déclarations que sur un bilan chiffré de politiques publiques.

Au final, Soraya Mouloudji apparaît comme une responsable dont la notoriété s’est construite par l’exercice gouvernemental. Les jalons sont clairs : un socle universitaire et scientifique à Oran, une entrée au gouvernement par la Culture en février 2022 avec l’affichage d’une feuille de route, puis une nomination à la Solidarité nationale en novembre 2024, sur fond de remaniement, et une activité ministérielle documentée par des visites, des rencontres et des prises de parole thématiques.

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