Qui est Mohamed Abdoulkader Moussa Helem ?

À Djibouti, les portefeuilles ministériels se lisent souvent comme un baromètre des priorités nationales : infrastructures, urbanisme, commerce, sécurité, puis, de plus en plus, environnement. Dans ce paysage, Mohamed Abdoulkader Moussa Helem occupe une place singulière. Son nom revient au fil des décrets, des déplacements internationaux et des séquences de négociation où se joue désormais une part du futur économique et stratégique de la Corne de l’Afrique.

Ministre de l’Environnement et du Développement durable depuis 2021, il appartient à cette génération de responsables qui tiennent ensemble deux lignes de crête. D’un côté, la contrainte immédiate d’un pays exposé aux sécheresses, au stress hydrique, aux épisodes de pluies extrêmes, à la pression urbaine et littorale. De l’autre, la nécessité de parler le langage des forums mondiaux où se négocient financements, instruments juridiques, mécanismes de marché carbone, coopération technique. Le profil de Mohamed Abdoulkader Moussa Helem s’inscrit dans cette intersection : la gestion publique domestique, la diplomatie climatique, et la recherche d’opportunités économiques à travers la transition.

Le paradoxe djiboutien structure son action. Le pays pèse peu dans les émissions mondiales, mais il se trouve en première ligne des impacts. Il doit composer avec une géographie exigeante, une urbanisation rapide, une économie connectée aux routes maritimes et, désormais, des attentes croissantes en matière de protection de la nature et de lutte contre les pollutions. Dans ce cadre, Mohamed Abdoulkader Moussa Helem apparaît comme une figure de continuité gouvernementale, mais aussi comme un opérateur de projection extérieure, chargé de traduire les vulnérabilités nationales en arguments politiques et, surtout, en dossiers finançables.

Un ministre confirmé par les textes, une fonction à forte exposition

La trajectoire institutionnelle de Mohamed Abdoulkader Moussa Helem est d’abord une affaire de textes officiels. Sa nomination comme ministre de l’Environnement et du Développement durable figure dans le décret de composition gouvernementale du 24 mai 2021, acte qui installe l’équipe gouvernementale et attribue à chacun son périmètre de responsabilité. Dans un pays où l’exécutif donne le tempo, l’inscription dans un décret est plus qu’un détail administratif : c’est l’acte fondateur de la légitimité d’action, l’ouverture d’un champ de décision et de représentation.

Le portefeuille qu’il détient est, par nature, transversal. Il touche aux ressources naturelles, à l’aménagement, aux risques, aux normes, à la santé environnementale et aux engagements internationaux. Il est également au carrefour des agendas : développement urbain, attractivité économique, tourisme, préservation des écosystèmes, adaptation au changement climatique. Cette transversalité explique que la fonction soit autant technique que politique. Elle exige une capacité à arbitrer, à coordonner, à porter des messages, mais aussi à négocier des appuis.

Sur le plan international, sa position est renforcée par les rôles de représentation qui lui sont attribués dans certaines enceintes. Il est notamment mentionné comme point focal national pour la Convention sur la diversité biologique, ce qui le place au centre de la relation entre Djibouti et l’architecture multilatérale de la biodiversité. Ce type de responsabilité n’est pas seulement protocolaire : il implique de suivre des dossiers, de structurer une position nationale, d’assurer le lien avec les mécanismes et les obligations de rapportage, et de dialoguer avec les partenaires techniques.

La reconnaissance institutionnelle passe aussi par des séquences symboliques. En 2025, la Primature rapporte qu’il a été élevé au grade d’Officier de l’Ordre national du 27 juin, distinction présentée comme une reconnaissance de services rendus et d’engagement au service de l’intérêt général. Dans les codes politiques locaux, ces décorations valident une stature de “grand commis” et renforcent la visibilité publique d’un ministre qui opère souvent sur un terrain où les résultats ne se mesurent pas immédiatement.

D’un portefeuille à l’autre : transports, urbanisme, environnement, une continuité d’État

Pour comprendre qui est Mohamed Abdoulkader Moussa Helem, il faut remonter avant 2021. Son nom apparaît dans des fonctions ministérielles antérieures, ce qui éclaire une continuité : il a occupé des portefeuilles liés aux infrastructures, à la mobilité et à l’aménagement, avant de se concentrer sur l’environnement au sens strict. Cette progression n’est pas anodine. À Djibouti, les politiques publiques se croisent en permanence : une route, un port, une zone urbaine, une ligne aérienne ont des impacts environnementaux ; et, inversement, la stratégie climatique influence les choix d’investissement.

Dès 2017, l’Agence Djiboutienne d’Information le présente comme ministre de l’Équipement et des Transports lors d’une rencontre avec un responsable de la Banque islamique de développement. Le compte rendu insiste sur les “grands projets” de modernisation des infrastructures ferroviaires et terrestres, et sur l’ambition de faire de Djibouti une place commerciale régionale incontournable. Cette séquence illustre un point essentiel : avant même d’être identifié comme ministre “de l’environnement”, Mohamed Abdoulkader Moussa Helem se situe au cœur de l’État bâtisseur, celui qui structure les corridors, la logistique, l’intégration régionale.

En 2018, son nom est associé à un rapprochement concret entre Djibouti et la Somalie sur les questions de transport. Un texte de l’ADI rapporte qu’un accord entre les deux États doit permettre aux compagnies désignées d’exploiter la ligne Djibouti–Mogadiscio sur une base de réciprocité, et souligne l’intérêt pour la compagnie nationale Air Djibouti. Là encore, le message est clair : la mobilité, la connectivité et la diplomatie sectorielle constituent des marqueurs de son action.

En 2019, il est présenté comme ministre de l’Urbanisme, de l’Environnement et du Tourisme dans plusieurs séquences publiques, dont la participation de Djibouti au segment ministériel de la COP25 à Madrid. Une autre dépêche de l’ADI le situe à Ankara lors de la Journée mondiale de lutte contre la désertification et la sécheresse. Cette période est instructive : le ministère réunit alors urbanisme, environnement et tourisme, trois domaines qui, dans un pays littoral et volcanique, se répondent et se contraignent mutuellement. On y voit déjà une articulation entre l’aménagement et les sujets climatiques, entre attractivité et conservation, entre projets et limites écologiques.

Ce passage par des portefeuilles “durs” (transport, équipement, urbanisme) peut se lire comme une préparation. Quand il devient ministre de l’Environnement et du Développement durable en 2021, il n’arrive pas sur une page blanche : il connaît les logiques d’investissement, les contraintes d’infrastructure, les enjeux de corridor, et il sait que la transition ne se décrète pas sans alignement avec les politiques de développement. Pour un pays dont l’économie dépend fortement de sa position géostratégique et de ses infrastructures, cette expérience antérieure pèse dans la manière de concevoir l’environnement : non pas comme un simple registre de protection, mais comme un champ de souveraineté et d’opportunités.

Dans les arènes internationales : COP, ONU, conventions et négociations

L’une des facettes les plus visibles de Mohamed Abdoulkader Moussa Helem est son rôle de représentant de Djibouti dans les enceintes multilatérales. Sur ce terrain, l’exercice est double : plaider la cause d’un pays vulnérable et obtenir des résultats concrets, qu’il s’agisse d’accès à des financements, de reconnaissance des besoins d’adaptation ou de soutien aux projets nationaux.

En mars 2022, il participe à la cinquième session de l’Assemblée des Nations Unies pour l’Environnement (UNEA-5) et à la célébration du cinquantième anniversaire du Programme des Nations Unies pour l’Environnement. Le compte rendu met en avant le thème de la session, centré sur le renforcement des actions en faveur de la nature pour atteindre les objectifs du développement durable, ainsi que l’adoption d’une décision relative à la création d’un comité intergouvernemental de négociation destiné à préparer un instrument juridiquement contraignant contre la pollution plastique. Cette séquence internationale est structurante : elle inscrit la question des plastiques dans un calendrier mondial, et elle situe Djibouti dans un mouvement qui relie environnement, santé et climat.

En novembre 2024, il est présent à l’ouverture de la COP29 à Bakou, et il préside un événement parallèle organisé par Djibouti en marge de la conférence. Le récit insiste sur la vulnérabilité de Djibouti au changement climatique et sur la nécessité de mobiliser un financement international, y compris du secteur privé, pour mettre en œuvre des actions d’atténuation et d’adaptation. Derrière cette formulation, une bataille bien connue se joue : faire entendre que l’adaptation n’est pas une dépense optionnelle, mais une condition de stabilité sociale et de continuité économique.

Son activité internationale ne se limite pas aux COP. En octobre 2024, il participe à Djeddah à des réunions ministérielles arabes sur l’environnement, où sont évoqués les défis climatiques, la désertification, la biodiversité et la coopération régionale. Ces espaces sont moins médiatisés que les COP, mais ils servent souvent à aligner des positions, à structurer des coalitions et à partager des expériences politiques. Pour Djibouti, qui se situe à la jonction des mondes arabe et africain, cette double appartenance diplomatique est un levier.

En 2025, il est à Genève pour la cinquième session de négociation sur une convention internationale juridiquement contraignante visant à lutter contre la pollution plastique, y compris dans le milieu marin. La délégation qu’il conduit échange avec des partenaires, aborde des projets conjoints régionaux, et réaffirme l’urgence de protéger l’environnement et la santé contre la pollution plastique. Le cadre genevois est révélateur d’une diplomatie plus technique : il ne s’agit plus seulement de déclarations, mais de la construction d’un instrument mondial, avec des définitions, un périmètre, des obligations, des mécanismes de mise en œuvre.

Ce parcours international dessine le portrait d’un ministre dont l’agenda est autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Dans ces enceintes, il doit parler au nom d’un pays, mais aussi traduire les attentes du pays en langage diplomatique : vulnérabilité, besoin de financement, nécessité d’outils, recherche de partenariats. Le défi est permanent : être audible parmi les grands émetteurs et les puissances financières, sans réduire l’expérience djiboutienne à une posture de victime. Il s’agit au contraire de présenter Djibouti comme un acteur qui propose, innove et réclame la cohérence entre les promesses internationales et les réalités locales.

L’Initiative Carbone Souveraine : un pari djiboutien, une vitrine politique

Ces dernières années, un thème revient avec insistance dans les prises de parole et les déplacements : l’Initiative Carbone Souveraine. Dans des forums africains sur le climat, Djibouti met en avant ce mécanisme comme une démarche pionnière sur le continent, destinée à structurer une stratégie nationale autour du carbone, des crédits et des financements liés à l’action climatique.

Lors du Sommet africain sur le climat à Addis-Abeba, une dépêche de la presse djiboutienne rapporte que Mohamed Abdoulkader Moussa Helem présente l’expérience du pays et la qualifie de première initiative carbone souveraine d’Afrique, en échangeant avec d’autres responsables du continent sur les conditions de réussite et les perspectives de financement. Dans ce récit, la souveraineté est un mot-clé. Elle signifie que le pays cherche à encadrer lui-même la manière dont ses ressources et ses projets climatiques peuvent se traduire en instruments financiers, plutôt que de laisser le champ aux seuls acteurs externes.

L’idée est politiquement puissante, mais elle est aussi techniquement exigeante. Une initiative carbone, pour être crédible, suppose des cadres de mesure, de vérification, de gouvernance, et une articulation claire avec les objectifs nationaux. Elle implique également une prudence : dans les marchés carbone, la réputation se construit lentement et se perd vite. Pour un petit État, l’enjeu est d’autant plus grand qu’il doit démontrer rigueur et transparence, tout en évitant que la logique carbone ne devienne un substitut à l’action réelle sur les politiques publiques.

Dans les discours liés aux COP, Djibouti insiste sur la nécessité de mobiliser des financements internationaux et privés. L’Initiative Carbone Souveraine apparaît alors comme un outil de traduction : transformer la vulnérabilité et les projets d’adaptation en flux financiers, ou au moins en instruments susceptibles d’attirer des partenaires. Pour Mohamed Abdoulkader Moussa Helem, ce dossier devient une vitrine de l’action environnementale, mais aussi un champ de négociation avec les acteurs internationaux, qui regardent de près la solidité des cadres.

Ce pari révèle une tendance plus large de la diplomatie climatique contemporaine : l’environnement n’est plus seulement un domaine de normes et de contraintes, c’est un espace de stratégie économique. La transition est devenue un marché, un terrain de compétition, un langage commun pour accéder à des fonds. Dans ce contexte, l’initiative djiboutienne vise à éviter un piège : rester cantonné au rôle de pays vulnérable qui demande, sans capacité à proposer un mécanisme structuré. Le ministre, lui, se retrouve au centre de cette ambition : convaincre à l’extérieur, organiser à l’intérieur.

Gouverner l’environnement à Djibouti : urgence climatique, eau, littoral et coopération régionale

Reste la question la plus concrète : que signifie être ministre de l’Environnement et du Développement durable à Djibouti ? Les dépêches et les prises de parole donnent des indices, sans toujours détailler l’ensemble des politiques publiques. Elles montrent toutefois une réalité : le pays se dit régulièrement frappé par des sécheresses, et confronté à un stress hydrique croissant, tandis que la pression sur les écosystèmes et la pollution deviennent des sujets de santé publique et de stabilité sociale.

Dans son intervention lors de l’Assemblée des Nations Unies pour l’Environnement, il est rapporté que le ministre évoque le changement climatique comme un défi central, en citant des phénomènes extrêmes, et en soulignant que l’Afrique ressent déjà durement les impacts, avec des conséquences sur les populations et les écosystèmes. Le texte mentionne explicitement que Djibouti est régulièrement frappé par des sécheresses et soumis à un stress hydrique de plus en plus aigu. Ce rappel structure la politique environnementale nationale : dans un pays aride, l’eau est un enjeu de sécurité.

L’autre front, de plus en plus visible, est celui des pollutions, notamment plastiques. Le fait que Djibouti participe activement aux négociations d’un instrument mondial sur les plastiques n’est pas anodin pour un État côtier, connecté aux flux maritimes et dont les écosystèmes marins ont une valeur écologique et économique. Les textes insistent sur une approche “cycle de vie” du plastique, de la production à l’élimination, ce qui renvoie à des politiques publiques concrètes : gestion des déchets, infrastructures de collecte, réglementation, sensibilisation, coopération avec les municipalités et le secteur privé.

La coopération régionale apparaît aussi comme une dimension importante, y compris avec la Somalie. Des rencontres ministérielles bilatérales sont rapportées, et des discussions sur des projets conjoints à soumettre à des mécanismes internationaux de financement environnemental sont mentionnées. Dans la Corne de l’Afrique, ces coopérations ont un sens évident : les écosystèmes, les littoraux, les dynamiques de sécheresse et les flux de pollution ne s’arrêtent pas aux frontières.

Enfin, la fonction ministérielle s’inscrit dans une logique d’État où la diplomatie et la politique intérieure se répondent. Un exemple frappant : en 2024, le ministère des Affaires étrangères de Djibouti rapporte une mission au Cameroun dans laquelle M. Helem transmet un message écrit du président djiboutien à son homologue camerounais, dans le cadre d’une campagne diplomatique liée à une candidature à la Commission de l’Union africaine, et aborde des thématiques d’intérêt commun. Cet épisode rappelle qu’un ministre n’est pas seulement un gestionnaire sectoriel : il peut devenir un messager politique, mobilisé sur des objectifs stratégiques dépassant son portefeuille.

Au total, le portrait qui se dessine est celui d’un responsable politique à la fois technicien de l’action publique, diplomate de la transition et acteur de la continuité gouvernementale. Son parcours traverse des domaines clés pour Djibouti : transports, urbanisme, environnement, relations internationales. Et c’est précisément cette continuité qui éclaire sa place : dans un pays fortement dépendant de ses infrastructures et de sa géographie, la politique environnementale ne peut pas être dissociée du développement. Mohamed Abdoulkader Moussa Helem incarne cette jonction, dans un moment où l’environnement, à Djibouti comme ailleurs, est devenu un dossier d’État.

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