L’Afrique du Sud a changé de visage à la tête de son ministère du commerce et de l’industrie. Depuis l’été 2024, Mpho Parks Franklyn Tau, figure bien connue de la politique sud-africaine, a pris les rênes du ministère du Trade, Industry and Competition (DTIC), l’un des portefeuilles les plus stratégiques pour la deuxième économie du continent. Nommé officiellement ministre à partir du 3 juillet 2024, il succède à Ebrahim Patel et devient l’un des principaux artisans de la politique économique industrielle du pays au sein du gouvernement de coalition mis en place après les élections générales de 2024.
Né en 1970 à Orlando West, dans le township de Soweto, Tau est loin d’être un novice. Ancien maire de Johannesburg, ex-ministre provincial de l’Économie dans la province de Gauteng et plusieurs fois vice-ministre de la Gouvernance coopérative et des Affaires traditionnelles, il arrive au DTIC avec une solide expérience de la gestion territoriale et de la planification des politiques publiques.
À la tête du ministère, il doit affronter simultanément plusieurs fronts : ralentissement de la croissance, désindustrialisation progressive, chômage de masse, tensions commerciales avec les États-Unis et exigence de transformation structurelle héritée de la période post-apartheid. Son portefeuille couvre un vaste champ qui va du soutien aux industries locales à la politique de concurrence, en passant par l’accompagnement des investissements, la régulation des standards techniques, ainsi que la mise en œuvre de politiques de transformation économique.
Dans un contexte de coalition fragile et de pressions sociales fortes, chaque déplacement, chaque visite d’usine et chaque négociation commerciale de Parks Tau est scruté. Entre relance industrielle, défense de l’emploi et repositionnement de l’Afrique du Sud dans les chaînes globales de valeur, le nouveau ministre se trouve aujourd’hui au centre d’un jeu d’équilibres particulièrement délicat.
Un parcours forgé dans la politique locale et la gouvernance urbaine
Avant d’accéder au gouvernement national, Mpho Parks Franklyn Tau a construit l’essentiel de sa légitimité politique dans les institutions locales. Son histoire est intimement liée à celle de Johannesburg, métropole économique du pays dont il deviendra maire de 2011 à 2016, soit le deuxième maire post-apartheid de la ville.
Issu de Soweto, symbole de la lutte contre le régime de l’apartheid, Tau rejoint le conseil métropolitain de Johannesburg dès la création de la municipalité unifiée, en décembre 2000. Il y siège comme conseiller de l’African National Congress (ANC) pendant près de deux décennies, jusqu’en 2019. Durant cette période, il occupe différentes responsabilités au sein de la municipalité, participant à la transformation d’une ville marquée par de fortes inégalités sociales et spatiales.
Son mandat de maire, à partir de mai 2011, se déroule dans un contexte de forte attente citoyenne en matière de services publics, d’infrastructures et de lutte contre la pauvreté urbaine. Certains observateurs soulignent alors son profil de « technocrate », attaché à la planification et à l’investissement à long terme, tandis que d’autres lui reprochent une gestion jugée trop éloignée d’un quotidien marqué par les pannes d’électricité, les défis de transport ou l’insécurité.
Sous sa direction, la ville met en avant plusieurs programmes destinés à améliorer la qualité de vie des habitants : extension de l’accès à l’électricité, accélération de l’équipement en éclairage public, investissements dans la gestion des déchets, modernisation du réseau de transport urbain ou encore programmes de logements et d’infrastructures routières dans les quartiers populaires. Ces chantiers participent à la transformation progressive de Johannesburg en centre économique régional, en lien avec les grandes ambitions de la municipalité en matière d’investissement dans les infrastructures.
Pour autant, les élections locales de 2016 marquent une rupture. L’ANC perd la majorité à Johannesburg, dans un contexte national de mécontentement croissant face à la corruption et à la stagnation économique. Tau cède alors son fauteuil de maire à Herman Mashaba, issu de l’Alliance démocratique (DA). Cette défaite électorale ne met pas fin à sa carrière : il demeure une figure respectée dans les cercles de gouvernance urbaine et continue d’être impliqué dans des réseaux internationaux, notamment à travers Metropolis, une association de grandes villes dont il a été coprésident.
Cette expérience municipale a façonné son approche des politiques publiques : une combinaison d’urbanisme, d’investissement structurel et de recherche de partenariats avec le secteur privé. Elle constitue aujourd’hui un socle important pour sa lecture des enjeux industriels et commerciaux à l’échelle nationale, où la question des villes, des zones industrielles et des corridors logistiques reste centrale.
De la gouvernance coopérative au portefeuille économique : la montée en puissance nationale
Après son passage à la tête de Johannesburg, Parks Tau se rapproche progressivement du gouvernement national. En mai 2019, il est nommé vice-ministre de la Gouvernance coopérative et des Affaires traditionnelles (Cooperative Governance and Traditional Affairs, COGTA). Il occupe ce poste une première fois jusqu’en décembre 2020, aux côtés de la ministre Nkosazana Dlamini-Zuma, avant d’être nommé au gouvernement provincial de Gauteng comme membre du Conseil exécutif (MEC) chargé du Développement économique.
Dans cette fonction provinciale, il se trouve en première ligne sur les dossiers de développement économique régional, de soutien aux petites et moyennes entreprises, de promotion de l’investissement et de transition vers des industries plus durables. Gauteng, qui regroupe Johannesburg et Pretoria, est le cœur économique de l’Afrique du Sud : la province concentre une grande partie du PIB national et abrite des secteurs stratégiques comme la finance, l’industrie automobile, la logistique et les services avancés. La gestion de ce portefeuille renforce ainsi l’image de Tau comme responsable politique spécialisé dans l’économie et l’industrie.
En 2023, il revient à la scène nationale. Le 7 mars, le président Cyril Ramaphosa procède à un remaniement et le nomme de nouveau vice-ministre de la Gouvernance coopérative et des Affaires traditionnelles. Il occupe ce poste jusqu’en juin 2024, dans un contexte politique marqué par les tensions au sein de l’ANC et la préparation des élections générales de 2024.
Ces élections marquent un tournant pour la démocratie sud-africaine : pour la première fois depuis 1994, l’ANC perd sa majorité absolue au Parlement. Un gouvernement de coalition est alors négocié, rassemblant l’ANC et plusieurs partis, dont l’Alliance démocratique (DA). Parks Tau, lui, est initialement placé trop bas sur la liste de son parti pour obtenir un siège de député, mais il entre finalement à l’Assemblée nationale en juin 2024 lorsqu’une vacance se libère.
Quelques jours plus tard, le président Ramaphosa annonce la composition de son nouveau gouvernement. Tau est nommé ministre du Trade, Industry and Competition, portefeuille clé au cœur de la stratégie économique du pays. Deux vice-ministres sont désignés à ses côtés, Andrew Whitfield (DA) et Zuko Godlimpi (ANC), incarnation des compromis de la coalition.
Sur le plan académique, Tau est décrit comme un responsable disposant d’une solide formation. Il a suivi des études en gestion publique à la Regenesys Business School et détient un master en politique publique et management de l’Université de Londres, un profil qui alimente sa réputation de dirigeant attentif à la planification stratégique et aux données.
La trajectoire de Parks Tau illustre ainsi un mouvement continu de la politique locale vers la politique nationale, avec un fil directeur : la volonté de lier gouvernance, développement économique et transformation sociale. À la tête du DTIC, il dispose désormais d’outils plus larges pour mettre cette vision en œuvre, mais aussi d’une exposition bien plus importante aux turbulences économiques mondiales.
Un ministère stratégique : industrialisation, concurrence et transformation économique
Le ministère du Trade, Industry and Competition occupe une place singulière dans l’architecture institutionnelle sud-africaine. Créé en 2019 par la fusion de l’ancien ministère du Commerce et de l’Industrie avec celui du Développement économique, il est chargé de piloter la politique industrielle, la concurrence et une partie importante de la politique de commerce extérieur.
Concrètement, le ministère supervise dix-sept organismes publics qui couvrent des domaines variés : financement industriel, application de la législation sur la concurrence, promotion de l’investissement, élaboration des normes techniques, sécurité des produits, politique de soutien aux petites entreprises, ou encore promotion du commerce extérieur. Ces institutions jouent un rôle crucial dans l’accompagnement des secteurs industriels, la régulation des marchés et la protection des consommateurs.
À la tête de cette structure, Parks Tau doit naviguer entre plusieurs objectifs parfois contradictoires. D’un côté, il est attendu sur la relance de l’industrialisation, alors que de nombreuses branches – notamment l’automobile, la sidérurgie ou le textile – subissent une concurrence internationale accrue et une faible croissance interne. De l’autre, il doit veiller à la politique de concurrence, qui vise à limiter les positions dominantes et à protéger les consommateurs contre les abus de prix, tout en encourageant l’émergence de nouveaux acteurs, y compris issus de communautés historiquement marginalisées.
Le ministère est également un acteur clé de la politique de transformation économique. L’Afrique du Sud porte depuis la fin de l’apartheid une stratégie de « Black Economic Empowerment » destinée à corriger les déséquilibres raciaux dans la propriété des entreprises, l’accès au crédit, aux marchés publics et aux postes de direction. Le DTIC est l’un des principaux instruments de cette stratégie, en lien avec les politiques de développement industriel, de financement des entreprises et de régulation des marchés.
Depuis son arrivée, Parks Tau a insisté sur la dimension à la fois « constitutionnelle et morale » de l’agenda de transformation, rappelant que la réduction des inégalités n’est pas seulement un choix politique, mais une exigence ancrée dans la Constitution sud-africaine. Cette approche place explicitement la justice sociale au cœur des débats sur l’industrialisation et le commerce, dans un pays toujours marqué par des écarts de richesse considérables.
Le ministère intervient aussi sur les grands dossiers sectoriels. L’industrie automobile, par exemple, fait l’objet d’une attention particulière via l’Automotive Masterplan 2035, qui fixe des objectifs en termes de production locale, de contenu local et d’exportations. Parks Tau a ainsi été amené à commenter publiquement la situation d’un secteur en difficulté, confronté à des fermetures d’entreprises et à des pertes d’emplois, et à ajuster les dispositifs de soutien, notamment en étendant les incitations à la production de véhicules électriques et de leurs composants.
À travers ces différents leviers, le ministère du Trade, Industry and Competition apparaît comme l’un des centres névralgiques de l’action gouvernementale en matière d’économie réelle. La manière dont Parks Tau arbitre entre les impératifs de compétitivité, d’emploi, d’équité et de transition écologique sera déterminante pour l’orientation de l’économie sud-africaine dans les années à venir.
Tensions commerciales avec les États-Unis : un test pour la diplomatie économique sud-africaine
Parmi les défis immédiats du mandat de Parks Tau, la dégradation des relations commerciales avec les États-Unis occupe une place centrale. Washington a annoncé la mise en place de droits de douane de 30 % sur une large gamme d’importations en provenance d’Afrique du Sud, ce qui menace des dizaines de milliers d’emplois selon les autorités sud-africaines.
Ces tarifs visent en particulier des secteurs à forte intensité d’exportation comme l’automobile et l’agriculture. Leur impact potentiel est considérable : une part importante des exportations sud-africaines vers les États-Unis pourrait être affectée, dans un pays où le chômage global dépasse encore 30 %, avec un taux de chômage des jeunes supérieur à 40 %.
La crise s’inscrit dans un contexte politique tendu entre Pretoria et Washington, marqué par des désaccords sur des questions diplomatiques et de politique intérieure. Le gouvernement sud-africain a critiqué certaines décisions de l’administration américaine, tandis que les États-Unis ont réagi à la réforme foncière sud-africaine et à la position du pays sur certains dossiers internationaux.
En tant que ministre du Commerce, de l’Industrie et de la Concurrence, Parks Tau se retrouve au premier plan de la réponse sud-africaine. Il a participé à des discussions à Washington avec le représentant américain au Commerce, Jamieson Greer, dans le cadre d’efforts visant à obtenir un allègement de ces tarifs. Selon les informations disponibles, ces rencontres se sont déroulées dans un climat décrit comme « cordial et productif », avec la définition d’une feuille de route pour renforcer la coopération et tenter de préserver les échanges bilatéraux, qui représentaient plus de 15 milliards de dollars en 2024.
Sur le plan interne, la crise a conduit le gouvernement à réviser certaines offres commerciales adressées aux États-Unis et à élargir ses dispositifs de soutien à l’industrie, notamment dans l’automobile. L’objectif affiché est de stimuler la localisation de la production, en augmentant la part de composants fabriqués localement dans les véhicules assemblés en Afrique du Sud. Parks Tau a souligné qu’une hausse de cinq points du contenu local pourrait générer des dizaines de milliards de rands de nouveaux marchés pour les fournisseurs sud-africains, tout en consolidant des chaînes de valeur régionales.
La diplomatie économique du pays cherche également à diversifier ses débouchés. Face à la menace de dépendance excessive à un unique partenaire, les autorités évoquent la recherche de nouveaux marchés en Asie, au Moyen-Orient ou encore sur le continent africain. Dans ce cadre, le ministère de Parks Tau joue un rôle clé pour négocier des accords, faciliter les missions commerciales et adapter les dispositifs de soutien à l’exportation.
Au-delà des chiffres, ce bras de fer avec Washington est un test de crédibilité pour la politique économique sud-africaine. Il met à l’épreuve la capacité de Parks Tau à défendre les intérêts industriels du pays, à préserver l’emploi et à éviter que les tensions diplomatiques ne se traduisent par une crise durable dans des secteurs stratégiques.
Relance industrielle, transformation et emploi : les priorités affichées
En parallèle des dossiers internationaux, le ministre du Commerce, de l’Industrie et de la Concurrence doit répondre à des attentes très fortes sur le terrain intérieur. L’Afrique du Sud fait face à une désindustrialisation progressive, à une croissance molle et à un chômage structurel, notamment chez les jeunes. Dans ce contexte, l’industrialisation et la transformation économique sont au cœur du programme défendu par Parks Tau.
L’une des priorités consiste à soutenir les investissements destinés à renforcer les capacités productives locales. Le ministère a ainsi mis en avant la réouverture de l’usine ACTOM Pretoria Power Transformers, présentée comme un élément clé pour les objectifs de politique industrielle, notamment en matière de localisation, de maintien des capacités et de préservation des emplois. Ce type de projet illustre la volonté des autorités de consolider des filières industrielles jugées stratégiques pour la transition énergétique et la sécurité d’approvisionnement en électricité.
Le secteur de l’électronique et de l’électroménager, quant à lui, offre un autre exemple de cette stratégie. À l’automne 2024, Parks Tau a visité le parc industriel de Hisense en Afrique du Sud, saluant le partenariat de longue date entre le groupe et le gouvernement sud-africain. Ce site est présenté comme un symbole de collaboration entre investisseurs internationaux et État pour stimuler la croissance, créer des emplois et contribuer au développement des communautés locales.
Au-delà des cas particuliers, la ligne stratégique du ministère repose sur quelques axes structurants : encourager la localisation des chaînes de valeur, soutenir les industries capables de créer massivement des emplois, promouvoir l’innovation et favoriser l’émergence d’entreprises issues de groupes historiquement défavorisés. Dans le secteur automobile, par exemple, l’accent est mis sur l’augmentation du contenu local et sur l’intégration de nouvelles technologies, notamment autour des véhicules électriques.
La transformation économique, dimension que Parks Tau décrit comme une « obligation constitutionnelle et morale », reste le fil rouge de ces interventions. Cela se traduit par des politiques de soutien à l’entrepreneuriat noir, des objectifs de représentation dans les conseils d’administration et la direction des entreprises, ainsi que par des programmes de formation et de montée en compétences. Le ministère, à travers ses agences, joue un rôle d’intermédiaire entre les besoins des entreprises, les contraintes sociales et les objectifs de réduction des inégalités.
La question de l’emploi demeure néanmoins un défi majeur. Malgré les incitations à la localisation et les aides à l’investissement, l’Afrique du Sud a perdu des milliers d’emplois industriels ces dernières années, notamment dans l’automobile, en raison du recul des ventes locales, de la concurrence des importations et des difficultés à atteindre les objectifs fixés par les plans sectoriels. Le ministère doit donc arbitrer entre la protection de l’emploi existant et l’accompagnement des reconversions, notamment dans un contexte de transition énergétique qui transforme de nombreux secteurs, des mines à l’industrie lourde.
Parks Tau cherche également à inscrire son action dans une perspective de développement durable. Son engagement antérieur dans des réseaux internationaux sur les questions urbaines et climatiques, ainsi que sa mise en avant de la notion de résilience, nourrissent une vision qui associe industrialisation, durabilité et justice sociale. Cela ne se traduit pas encore par un grand plan unique, mais plutôt par une série de mesures ciblées : soutien aux industries liées aux énergies renouvelables, encouragement à l’efficacité énergétique, réflexion sur le rôle des villes dans la transition industrielle.
Dans l’ensemble, les priorités affichées par Parks Tau dessinent une ambition claire : utiliser la politique industrielle non seulement pour relancer la croissance, mais aussi pour corriger les déséquilibres historiques et préparer l’économie sud-africaine aux mutations technologiques et écologiques.
Un ministre sous pression dans un gouvernement de coalition
Si les défis économiques et sociaux sont importants, le contexte politique ne l’est pas moins. Le gouvernement dans lequel siège Parks Tau est le produit d’un compromis inédit depuis la fin de l’apartheid. L’ANC, pilier du système politique sud-africain depuis 1994, a dû accepter une coalition après avoir perdu sa majorité absolue en 2024.
Dans ce cadre, certains ministères clés, dont celui du Trade, Industry and Competition, incarnent la nécessité de collaboration entre partis aux orientations différentes. La nomination d’Andrew Whitfield, membre de l’Alliance démocratique, comme vice-ministre aux côtés de Zuko Godlimpi, issu de l’ANC, symbolisait cette volonté de co-gouvernance dans un portefeuille hautement stratégique.
Cette cohabitation n’a toutefois pas été exempte de tensions. En juin 2025, le président Cyril Ramaphosa a limogé Andrew Whitfield de son poste de vice-ministre du Trade, Industry and Competition, une décision qui a provoqué de vives réactions au sein de la DA, partenaire clé de la coalition. Si les raisons officielles de ce limogeage n’ont pas été détaillées, cet épisode illustre la fragilité des équilibres politiques autour du ministère.
Pour Parks Tau, ces dynamiques se traduisent par une double exigence. D’un côté, il lui faut maintenir la cohérence des politiques industrielles et commerciales dans un environnement où les priorités des partis de la coalition ne sont pas toujours alignées, notamment sur les questions de transformation économique, de participation de l’État dans certains secteurs ou de rythme de la libéralisation des échanges. De l’autre, il doit préserver la crédibilité externe du pays auprès des investisseurs et des partenaires internationaux, qui observent de près les tensions au sein de la coalition.
Le ministère qu’il dirige est par ailleurs en interaction constante avec d’autres départements : Finances, Transports, Énergie, Relations internationales, Travail. La mise en œuvre d’une stratégie industrielle cohérente nécessite une coordination étroite, par exemple lorsque des incitations fiscales doivent être alignées sur les objectifs de localisation, ou lorsque des négociations commerciales doivent tenir compte des engagements climatiques et sociaux. Dans ce jeu inter-ministériel, la capacité de Parks Tau à s’imposer comme arbitre crédible est un élément déterminant.
La pression vient aussi de l’opinion publique. Les Sud-Africains attendent des résultats tangibles en matière d’emploi, de pouvoir d’achat et de réduction des inégalités. Le ministère du Trade, Industry and Competition se trouve souvent en première ligne lorsqu’il s’agit d’annoncer des plans de sauvegarde d’emplois, des mesures d’aide aux entreprises en difficulté ou des investissements industriels. Chaque fermeture d’usine, chaque annonce de licenciements, notamment dans des secteurs emblématiques comme l’automobile, met le gouvernement sous le feu des critiques et interroge l’efficacité des politiques mises en place.
Malgré ces contraintes, Parks Tau dispose d’atouts : une connaissance fine de la gouvernance locale, une expérience des politiques économiques à l’échelle provinciale, ainsi qu’une formation académique reconnue en politiques publiques. Ces éléments lui permettent d’aborder les dossiers avec une approche structurée, même si l’ampleur des défis laisse planer de nombreuses incertitudes sur la capacité du gouvernement à inverser rapidement les tendances économiques lourdes.
Un mandat décisif pour l’économie sud-africaine
La nomination de Mpho Parks Franklyn Tau au ministère du Trade, Industry and Competition intervient à un moment charnière pour l’Afrique du Sud. Le pays doit simultanément affronter une crise sociale liée au chômage de masse, une pression internationale accrue sur ses exportations, la nécessité d’accélérer la transition énergétique et les exigences internes de transformation héritées de l’histoire de l’apartheid.
Le parcours du ministre, de Soweto à la mairie de Johannesburg, puis aux responsabilités provinciales et nationales, témoigne d’une trajectoire marquée par la gouvernance locale, la réflexion stratégique et l’attention portée aux questions d’équité. Ses prises de position récentes sur la transformation économique, présentée comme une exigence constitutionnelle et morale, confirment la centralité de cette question dans son approche du développement.
À la tête d’un ministère qui supervise 17 agences et intervient dans des domaines aussi variés que la politique industrielle, la concurrence, la régulation des standards techniques, la promotion du commerce extérieur et le soutien aux entreprises, Parks Tau dispose d’un levier essentiel pour infléchir la trajectoire économique du pays.
Les premières années de son mandat ont déjà été marquées par des dossiers lourds : tensions commerciales avec les États-Unis, révision des politiques de soutien à l’industrie automobile, réouverture de sites stratégiques comme l’usine ACTOM Pretoria Power Transformers, et mise en avant de partenariats industriels comme celui avec Hisense. Autant de chantiers qui dessinent le contour d’une action centrée sur la relance industrielle, la protection de l’emploi et la recherche de nouveaux équilibres commerciaux.
Reste que la réussite de ce programme dépendra aussi de facteurs dépassant le seul périmètre du ministère : stabilité politique de la coalition, capacité de l’État à maîtriser la crise énergétique, crédibilité de la politique budgétaire, mais aussi climat social et confiance des investisseurs. Dans cet environnement complexe, le rôle de Parks Tau apparaît à la fois déterminant et exposé.
Son mandat pourrait ainsi être l’un des plus décisifs de l’histoire récente du ministère du Commerce et de l’Industrie sud-africain. Il devra prouver que la combinaison entre transformation économique, justice sociale et intégration dans l’économie mondiale peut constituer une voie réaliste pour relancer une économie en quête de nouveau souffle.



