Secteur minier : Faux permis en circulation, l’État annonce des mesures strictes
- TAHINISOA Ursulà Marcelle
- il y a 12 heures
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Le 3 décembre 2025, le Ministère des Ressources Minières a publié un avertissement public au ton rare par sa netteté. Le message est simple, mais ses implications sont lourdes : aucun permis minier ni autorisation d’exploitation n’a été délivré à ce jour par l’Administration minière malgache, alors même que des documents se présentant comme tels circuleraient dans certains circuits. Cette mise au point intervient dans un contexte où la délivrance des permis est suspendue depuis de nombreuses années et où l’application du nouveau Code minier est annoncée comme imminente. Le Ministère rappelle que cette application ne pourra se faire qu’après la réouverture officielle de la délivrance des permis, étape préalable et indispensable pour garantir un cadre légal de travail aux acteurs du secteur.
Au-delà de l’éclaircissement administratif, l’avertissement reconnaît l’existence de « différents cas et informations recueillis récemment » au sein du Ministère. Sans donner de détails, l’institution affirme qu’elle ne tolérera aucune falsification et qu’elle prendra des mesures strictes contre toute personne enfreignant délibérément la loi. En filigrane, le message vise à couper court à une zone grise où se mêlent attentes économiques, impatience d’opérateurs, et risques d’arnaques. Cette communication officielle révèle à la fois l’état de transition du secteur minier et l’urgence de réaffirmer les repères légaux dans un pays riche en ressources mais confronté à une longue suspension des autorisations d’exploitation.

Une suspension longue et un secteur en attente de cadre légal
Le cœur de l’avertissement se situe dans un rappel historique et administratif : la délivrance des permis d’exploitation minière est suspendue « depuis de nombreuses années ». Cette phrase, volontairement générale, suffit à dessiner une réalité durable. Elle indique une pause profonde du mécanisme légal qui permet normalement à un opérateur de travailler en toute légitimité. Sans permis d’exploitation, un acteur minier ne peut pas prétendre à l’encadrement réglementaire prévu pour l’activité : aucune reconnaissance officielle, aucune protection juridique, aucune obligation formalisée, donc une fragilité pour toutes les parties.
Cette suspension prolongée a posé une situation paradoxale. D’un côté, un secteur qui continue d’exister dans l’économie et dans les territoires, porté par l’intérêt pour les ressources minières. De l’autre, un verrou administratif qui empêche l’ouverture d’un cadre normatif clair à travers l’octroi de permis. Dans ce genre d’équilibre instable, le risque est double : l’économie minière peut se déplacer vers l’informel, et les opérateurs sérieux peuvent se retrouver dans l’incertitude permanente, incapables de projeter des investissements ou d’assurer la conformité de leurs démarches.
C’est précisément cette tension que l’avertissement entend adresser. En rappelant que la suspension est toujours en vigueur, le Ministère reconnaît l’attente des acteurs et la nécessité de leur offrir un cadre légal de travail. Mais il insiste aussi sur le fait qu’aucune procédure ne peut être accélérée ou contournée tant que le verrou n’a pas été officiellement levé. Autrement dit, la suspension n’est pas un simple héritage administratif : elle est un état juridique actuel, dont les implications restent pleines et entières.
Ce rappel vise aussi à calmer les interprétations hâtives. Quand un nouveau Code minier est annoncé, certains peuvent croire qu’il s’applique automatiquement, ou que sa seule existence suffit à relancer les activités. Le Ministère affirme l’inverse : tant que la délivrance des permis demeure bloquée, l’application du Code ne peut pas être opérationnelle. Le message rétablit une chronologie incontournable : d’abord rouvrir la délivrance, ensuite appliquer le nouveau cadre. Cette hiérarchie est présentée come un préalable « indispensable avant toute procédure ».
Le nouveau Code minier : une application conditionnée à la reprise des permis
Le Ministère emploie des termes mesurés mais structurants : « l’application du nouveau Code Minier régissant les ressources minières nécessite d’abord l’ouverture de la délivrance des permis d’exploitation minière ». Cette phrase trace une ligne institutionnelle claire. Elle dit que le Code est prêt, ou en voie de l’être, mais qu’il ne peut pas vivre sans un mécanisme vivant de permis. En d’autres termes, un texte réglementaire, même complet, ne peut être un cadre légal effectif si l’acte central qui permet l’exercice de l’activité — le permis — reste gelé.
Cette logique administrative est essentielle dans la communication. Elle permet au Ministère de rappeler que la réforme ne se réduit pas à un texte, mais dépend d’une architecture complète : dispositions légales, procédures administratives, dispositifs de contrôle, et surtout un guichet qui fonctionne. On comprend alors que la suspension des permis n’est pas un détail technique, mais un nœud qui conditionne le redémarrage de la loi elle-même.
Le Ministère précise que les autorités travaillent « actuellement à l’amélioration de toutes les dispositions légales permettant d’avancer vers les démarches administratives y afférentes ». Cette formulation indique une phase de révision ou de finalisation. Elle souligne que la réforme en cours ne vise pas seulement à écrire un Code, mais à assurer sa cohérence et son applicabilité. Le choix des mots — amélioration, dispositions légales, démarches administratives — évoque un atelier réglementaire en pleine activité, où l’État s’efforce de consolider le terrain juridique avant d’actionner la reprise de délivrance.
Cette étape apparaît comme une forme de sécurisation. Le Ministère semble vouloir éviter une reprise précipitée qui relancerait le secteur sans garde-fous actualisés. En annonçant que cette amélioration est en cours, il demande implicitement patience et discipline aux acteurs. Il réaffirme une démarche progressive : d’abord terminer les ajustements, ensuite relancer le système de permis, puis déployer le Code. Cela positionne l’administration comme responsable de la transition, et rappelle que c’est la légalité qui doit guider la reprise, non l’urgence économique seule.
Cette articulation, annoncée publiquement, est aussi une manière de prévenir les conflits. Dans une période de réforme, les interprétations divergentes se multiplient : certains peuvent se prévaloir de textes en cours de révision, d’autres annoncer une reprise imminente, d’autres encore essayer de pouvoir se placer en avance sur une future ouverture. L’avertissement coupe court à toutes ces tentatives en établissant la règle du présent : le Code ne s’applique pas encore de manière opérationnelle tant que les permis ne sont pas délivrés. Il s’agit moins d’une promesse que d’un cadrage strict de la temporalité.
Aucun permis délivré : une mise au point contre la désinformation
La partie la plus explicite du message se formule ainsi : « à ce jour, aucune autorisation ni permis d’exploitation des ressources minières n’a été délivré ou signé par le Ministère ». C’est une phrase clé, qui fonctionne comme un démenti officiel. Elle ne laisse pas place à l’ambiguïté. Elle signifie que toute personne ou entreprise prétendant détenir un permis récent se place, de fait, hors du cadre légal ou dans la fraude.
Le Ministère justifie la publication de cet avertissement par des « différents cas et informations recueillis récemment ». Cette précision est courte, mais elle suffit à suggérer une réalité inquiétante. Des documents supposément officiels circulent, des annonces d’autorisations apparaissent, ou des démarches douteuses se multiplient. Le Ministère ne nomme pas les acteurs en cause, ne décrit pas les faits, et ne détaille pas les territoires concernés. Ce silence est cohérent avec la prudence d’une communication institutionnelle. Mais il n’empêche pas de comprendre l’objectif : prévenir le public, et surtout les opérateurs du secteur, contre tout acte sans valeur juridique.
Cette mise au point vise plusieurs audiences à la fois. D’abord les acteurs miniers eux-mêmes : entreprises, coopératives, entrepreneurs, intermédiaires. Ceux-ci sont invités à vérifier systématiquement toute information, et à ne pas engager de démarches fondées sur un permis supposé récent. Le message leur dit clairement où se situe la légalité : au Ministère, et nulle part ailleurs. Ensuite, le public plus large : communautés locales, autorités régionales, partenaires économiques, et toute personne susceptible d’être sollicitée ou persuadée par de faux documents. L’avertissement joue un rôle de protection collective.
En réaffirmant l’absence totale de permis délivrés, le Ministère protège également sa propre crédibilité et son autorité. À l’heure de transitions administratives, les rumeurs peuvent fragiliser l’action publique. Toute supposition de permis accordés en coulisse, ou d’autorisations délivrées à certains et pas à d’autres, alimente frustrations et soupçons. La déclaration officielle, brute et universelle, rétablit un principe d’égalité : personne n’a été autorisé à exploiter via un permis signé par l’État à ce jour. C’est un message d’équité aussi bien que d’ordre.
On peut lire ce passage comme une ligne rouge. Le Ministère annonce qu’il n’existe aucun espace pour l’approximation juridique. Un permis minier n’est pas un papier privé, ni un accord verbal, ni un document estampillé par une entité non habilitée. Dans la logique administrative rappelée, seul le Ministère peut délivrer ou signer. Et comme il ne l’a pas fait, toute prétention équivalente relève de l’illégalité.
Stop aux arnaques : la lutte annoncée contre la falsification
Le ton devient plus ferme encore dans la dernière partie de l’avertissement. Le Ministère « réaffirme qu’il ne tolérera aucune forme de falsification » et promet des « mesures strictes contre toute personne qui enfreindra délibérément la loi ». Cette déclaration porte un double message : moral et juridique. Moral, parce qu’elle stigmatise la tromperie comme une atteinte directe à l’intérêt général. Juridique, parce qu’elle annonce des sanctions sans en détailler le contenu.
Le visuel joint à l’avertissement renforce cette ligne. Le texte y martèle qu’aucun permis n’a été délivré, que le Ministère travaille encore à la finalisation de la révision réglementaire, et qu’il faut mettre fin à l’usage de faux documents. Le slogan « Stop aux arnaques » signale une situation de fraude concrète et ressentie. Dans une communication publique, ce type d’expression n’est jamais neutre : il indique que le Ministère juge la menace suffisamment sérieuse pour adopter un langage direct, immédiatement compréhensible, et orienté vers la protection du citoyen.
Pourquoi l’arnaque trouve-t-elle un terrain favorable ? L’avertissement lui-même fournit une partie de la réponse : la suspension prolongée des permis produit une attente, et cette attente peut être exploitée. Lorsque l’accès légal est fermé, certains contournent ou imitent. La période de transition vers un nouveau Code minier peut, elle aussi, être instrumentalisée : des individus peuvent se présenter comme des « facilitateurs », proposer des documents « provisoires », ou vendre l’illusion d’une autorisation anticipée. Le Ministère dit clairement que ces pratiques n’ont aucune valeur et tomberont sous le coup de la loi.
La promesse de mesures strictes est un signal dissuasif. Elle s’adresse à ceux qui fabriquent, vendent ou utilisent sciemment de faux permis, mais aussi à ceux qui seraient tentés de fermer les yeux sur l’origine de leurs documents. Le Ministère insiste sur la notion d’infraction « délibérée ». Cela signifie que la responsabilité sera recherchée chez ceux qui agissent en conscience, et que l’argument de la confusion ou de l’ignorance ne suffira pas à protéger les fraudeurs. C’est une manière d’appeler tous les acteurs à la vigilance active plutôt qu’à la passivité.
Ce passage a aussi une dimension de restauration de l’autorité. Quand une administration rappelle publiquement qu’elle ne tolérera pas la fraude, elle cherche à réaffirmer son monopole légal. Ici, ce monopole concerne la délivrance de permis. La falsification ne menace pas seulement des victimes individuelles : elle menace la capacité de l’État à organiser le secteur, à collecter les informations, et à préparer la reprise dans l’ordre. Le Ministère met donc en place, par la parole, une forme de verrou symbolique qui accompagne le verrou administratif déjà existant.
Enfin, le message se lit comme une démarche de transparence. Admettre la circulation de faux documents, même implicitement, et annoncer une réaction est une manière de dire au public : le problème est identifié, l’État est attentif, et l’action suivra. Cette transparence peut contribuer à réduire la méfiance, à condition qu’elle soit suivie d’effets visibles. Même sans détail immédiat, la simple annonce montre que l’Administration veut reprendre la main sur un segment où l’opacité profiterait aux irréguliers.
Les enjeux d’une reprise : entre confiance, légalité et responsabilité collective
L’avertissement du 3 décembre 2025 n’est pas seulement un démenti ou une mise en garde. C’est un acte politique au sens large : il prépare le terrain pour une reprise, tout en balisant l’espace légal. En rappelant la suspension des permis et en conditionnant l’application du nouveau Code à leur réouverture, le Ministère indique que la transition est en cours mais qu’elle doit rester maîtrisée. Ce choix de la maîtrise plutôt que de la précipitation révèle plusieurs enjeux.
Le premier enjeu est celui de la confiance. Une administration qui publie une mise au point aussi explicite veut restaurer ou consolider un lien entre l’État et les acteurs économiques. Les opérateurs honnêtes ont besoin de repères. Ils doivent savoir où se situe l’autorité, quelles procédures sont actives, et lesquelles ne le sont pas. Le message, en étant clair, contribue à éviter des investissements risqués et des conflits liés à des documents faux ou non valides. Il est aussi une réponse à ceux qui attendent une reprise et qui pourraient perdre confiance en voyant apparaître des acteurs prétendument autorisés. Le Ministère dit : il n’y a pas de passe-droit, il n’y a pas encore d’autorisations, et tout le monde est soumis aux mêmes règles.
Le deuxième enjeu est celui de la légalité comme condition du développement. Le Ministère insiste sur l’idée que les acteurs doivent pouvoir « travailler dans un cadre légal ». Cette expression est simple, mais elle contient une stratégie : la reprise ne vise pas seulement à relancer l’exploitation des ressources, mais à le faire sous un régime de droit. Dans cette perspective, la délivrance de permis n’est pas un obstacle bureaucratique : c’est la clé de voûte d’un secteur régulé. Sans permis, pas de règles applicables, pas de contrôle, pas de sécurité juridique. En plaçant la reprise des permis avant l’application du Code, le Ministère insiste sur l’architecture de la loi plutôt que sur une simple annonce de réforme.
Le troisième enjeu est celui de la responsabilité collective. Le message du Ministère est une alerte qui demande la coopération de tous : opérateurs, citoyens, communautés locales, autorités décentralisées. Lorsqu’une administration affirme que des faux circulent, elle invite le public à ne pas se laisser prendre, à vérifier, à signaler. Même si l’avertissement ne mentionne pas de mécanisme de plainte, sa seule existence fonctionne comme une invitation à la vigilance. Il ne s’agit pas seulement de réprimer les fraudeurs, mais de réduire leur espace d’action en tarissant la crédulité ou l’ambiguïté qu’ils exploitent.
Le quatrième enjeu est celui de la transition elle-même. Le Ministère dit travailler à la « finalisation de la révision du cadre réglementaire ». Cette phrase est un engagement : un nouveau Code minier doit être applicable, et la reprise des permis doit suivre. L’avertissement avertit contre les actes prématurés, mais il porte aussi une promesse implicite d’avancée. En annonçant l’amélioration des dispositions légales, l’État reconnaît que la réforme est une nécessité, et qu’elle est en cours. Cela place le secteur dans une trajectoire, même si la date de reprise n’est pas donnée.
Enfin, cet avertissement raconte un moment de bascule. Entre un passé de suspension, un présent de vigilance, et un futur de réforme, le pays se trouve à un carrefour. La richesse minière ne peut être une source de bénéfices partagés que si elle est encadrée, transparente et protégée de la falsification. Le Ministère, par ce texte, rappelle que la loi n’est pas un décor mais un chemin, et que la reprise du secteur ne se fera pas à travers des raccourcis.
Au terme de cette communication, une idée domine : la légalité d’abord. Pas de permis, pas d’exploitation reconnue. Pas de reprise de délivrance, pas d’application effective du nouveau Code. Et aucune tolérance pour ceux qui voudraient profiter de l’attente pour vendre du faux. Ce rappel solennel du 3 décembre 2025 s’adresse à une société entière qui attend la relance du secteur minier. Le Ministère insiste : cette relance ne pourra être durable que si elle se construit sur un socle juridique solide, partagé et respecté.