Qui est Carlos Monteiro, l’homme politique capverdien ?

Au Cap-Vert, archipel où la jeunesse pèse lourd dans le débat public et où le sport sert souvent de vitrine internationale, certains visages finissent par incarner une méthode de gouvernement autant qu’un secteur. Le Dr Carlos do Canto Monteiro fait partie de ces responsables dont la trajectoire épouse les lignes de force de la vie politique capverdienne récente : une progression depuis les cabinets, une spécialisation sur les politiques publiques, puis une exposition croissante à l’épreuve du terrain, des îles aux grandes scènes internationales.

Ministre adjoint du Premier ministre pour la Jeunesse et le Sport, juriste de formation, passé par les fonctions de direction de cabinet, il s’est imposé comme un acteur central de la diplomatie sportive capverdienne, de la structuration du haut niveau, mais aussi des programmes destinés aux jeunes. Son nom, longtemps associé aux coulisses de l’exécutif, s’est progressivement installé dans l’espace public à mesure que les dossiers sportifs se sont densifiés : compétitions internationales, lutte antidopage, coopérations universitaires, infrastructures, sport scolaire, mais aussi place de la jeunesse dans un pays qui conjugue ambitions et contraintes structurelles.

Un juriste passé par les cabinets : la trajectoire d’un profil technico-politique

Le point de départ de la carrière publique de Carlos do Canto Monteiro s’inscrit d’abord dans une identité professionnelle : celle du droit. Il est diplômé en droit (mention juridique), une formation qui, au Cap-Vert comme dans de nombreux pays lusophones, constitue un socle classique pour les carrières d’État, de conseil et de cabinet. Cette matrice juridique explique une partie de sa réputation de responsable “de méthode”, attaché aux dispositifs, aux cadres institutionnels et à la mécanique de la décision publique.

Avant d’apparaître comme une figure de premier plan dans les politiques de sport et de jeunesse, il a occupé des fonctions stratégiques au plus près du pouvoir exécutif. Il a été directeur de cabinet du Premier ministre, et également conseiller du chef du gouvernement pour les questions de jeunesse. Dans un système où l’architecture gouvernementale repose fortement sur la coordination interministérielle, un directeur de cabinet se situe au carrefour de l’administration, du politique et de l’arbitrage : c’est là que se nouent les priorités, que se gèrent les urgences, et que se fabrique une partie du calendrier d’action.

Sa trajectoire ne se limite pas au cercle strict des cabinets. Il a exercé comme avocat, ce qui renforce l’image d’un responsable formé à l’argumentation, à l’analyse des normes et aux équilibres institutionnels. Il a également été enseignant à l’Institut supérieur des sciences économiques et entrepreneuriales, signe d’un lien avec l’univers académique et de la transmission, dimension fréquemment mobilisée dans les discours sur la jeunesse et la formation.

À l’échelle locale, il a aussi été membre de la Commission permanente d’évaluation foncière de la municipalité de Praia. Cette expérience, plus technique en apparence, renseigne pourtant sur une familiarité avec les problématiques de gestion territoriale et d’administration municipale, dans un pays où la capitale concentre une part importante des enjeux démographiques et d’aménagement.

Enfin, sur le plan strictement gouvernemental, il a occupé la fonction de secrétaire d’État adjoint au Premier ministre lors de la IXe législature. Ce poste, situé à l’interface entre pilotage politique et coordination administrative, constitue souvent un tremplin vers des responsabilités ministérielles, en particulier lorsqu’un portefeuille requiert à la fois expertise sectorielle et capacité d’alignement avec l’agenda du chef du gouvernement.

Ministre adjoint pour la Jeunesse et le Sport : un poste d’exposition dans un pays-archipel

Devenir ministre adjoint du Premier ministre pour la Jeunesse et le Sport, c’est prendre en main un portefeuille à la fois populaire et sensible. Populaire parce que le sport traverse toutes les couches sociales et toutes les îles, et qu’il fonctionne comme un langage commun. Sensible parce qu’il touche à des attentes directes : infrastructures, compétitions, formation, encadrement, opportunités pour les jeunes, et image internationale du pays.

Carlos do Canto Monteiro prend la responsabilité de ce secteur au printemps 2021, date à partir de laquelle il est présenté comme nouveau titulaire du portefeuille de la Jeunesse et du Sport. Cette arrivée intervient dans un contexte où la performance sportive capverdienne cherche à franchir des paliers : mieux structurer le haut niveau, consolider le sport scolaire, organiser les filières de détection, moderniser les équipements, et transformer les succès ponctuels en trajectoires durables.

Le rôle de ministre adjoint rattaché au Premier ministre ajoute une dimension transversale : la jeunesse et le sport ne sont pas des politiques isolées. Elles croisent l’éducation, la santé, le tourisme, la diplomatie, l’emploi, l’aménagement et parfois même l’identité nationale, particulièrement dans un archipel dont la diaspora joue un rôle majeur. Le portefeuille devient ainsi un observatoire privilégié de la société capverdienne contemporaine : aspirations des jeunes, mobilité, création d’opportunités, besoin d’encadrement, mais aussi exigence de reconnaissance internationale.

Cette exposition s’observe aussi dans la fréquence des séquences publiques liées au sport de haut niveau. Dans un pays à la démographie limitée, chaque qualification, chaque tournoi, chaque grande compétition offre une caisse de résonance politique. Les autorités sont attendues sur l’accompagnement logistique, la valorisation de l’image, la capacité à mobiliser partenaires et secteurs économiques, et l’anticipation des besoins (préparation, stages, encadrement médical et scientifique).

Le ministre adjoint se retrouve alors sur un fil : soutenir l’élan national sans se contenter d’un registre symbolique. La politique sportive, aujourd’hui, se joue aussi sur des dispositifs techniques : protocoles avec universités, programmes de formation des entraîneurs, lutte antidopage, structuration des centres de performance, coopération internationale. C’est précisément sur ce terrain que Carlos do Canto Monteiro a multiplié les initiatives, souvent présentées sous l’angle de la coopération et du renforcement institutionnel.

Le sport comme diplomatie : Mondial de basket 2023, Jeux olympiques 2024, partenariats et visibilité

L’un des marqueurs de l’action publique récente autour du sport capverdien est la lecture “diplomatique” des compétitions. Le sport n’est pas seulement une affaire de résultats ; il devient une vitrine, un levier d’attractivité, un prétexte à des échanges et à une présence sur des scènes internationales.

En juin 2023, à l’approche du Mondial de basket organisé au Japon, Carlos do Canto Monteiro met en avant la dimension dépassant la simple compétition. Il organise une rencontre stratégique sur l’île de Sal avec des opérateurs touristiques afin de mobiliser des efforts autour d’une “participation digne” de la sélection nationale. Le message est clair : l’événement sportif est aussi une opportunité pour projeter l’image du Cap-Vert, attirer l’attention internationale et stimuler un secteur économique, en l’occurrence le tourisme. Dans le même cadre, il évoque un programme de préparation incluant des stages à Praia et Mindelo à partir de la mi-juillet, la participation à un tournoi international en Italie, puis des périodes de stage en Espagne et aux États-Unis. La séquence illustre une manière de gouverner le sport : articuler préparation sportive, mobilisation économique, et récit national.

En 2024, la présence capverdienne à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris devient un autre symbole de cette diplomatie sportive. Carlos do Canto Monteiro est annoncé comme chef de délégation gouvernementale pour représenter l’exécutif lors de la cérémonie du 26 juillet 2024, sur la Seine, et pour marquer le soutien aux athlètes nationaux. Dans un pays où l’accès à la scène olympique représente une étape importante de visibilité, la séquence relève autant du protocole que de la stratégie d’image : montrer que la performance sportive est portée par l’État, et que l’événement sert aussi de vecteur de représentation internationale.

À ce registre s’ajoutent les coopérations formelles, en particulier avec le Portugal. Fin mai 2024, une réunion à Lisbonne avec le ministre portugais des Affaires parlementaires, Pedro Duarte, met en avant un cadre de coopération stratégique : assistance technique pour la création du Centre de haut rendement sportif du Cap-Vert, formation de moniteurs et d’entraîneurs via des programmes dédiés, et réflexion autour du sport scolaire, avec l’idée d’une dynamique à l’échelle de la CPLP. Là encore, l’action publique se construit au croisement des réseaux lusophones, des échanges institutionnels et de la mise à niveau des structures sportives nationales.

L’automne 2024 prolonge cette orientation avec une visite officielle de quatre jours au Portugal, à partir du 7 octobre. La séquence, structurée autour d’un programme dense, prévoit notamment la signature d’un protocole de coopération entre l’Institut du sport et de la jeunesse (IDJ), l’Organisation nationale antidopage du Cap-Vert (ONAD-CV) et l’Université de Trás-os-Montes et Alto Douro (UTAD). Au menu figurent également des rencontres avec des équipes rectorales, des visites de laboratoires et d’installations sportives, et des échanges avec des institutions et clubs. La présence de la question antidopage dans ce schéma témoigne d’une volonté de professionnalisation et d’alignement sur les standards internationaux, dimension devenue incontournable dès lors qu’un pays cherche à inscrire ses athlètes dans des circuits mondiaux.

Derrière ces déplacements, se dessine une stratégie : se connecter à des ressources scientifiques, universitaires et institutionnelles, en assumant que l’archipel ne peut pas tout internaliser, mais peut organiser des passerelles. Cela renvoie aussi à une réalité capverdienne : la diaspora, les liens historiques avec le Portugal, la circulation des étudiants et des sportifs, et la place de la coopération lusophone comme cadre naturel d’action.

Jeunesse, formation, sport scolaire : un champ social plus vaste que les stades

Réduire l’action d’un ministre de la Jeunesse et du Sport à la seule compétition serait un contresens. Dans un pays où les attentes de la jeunesse recouvrent l’emploi, la formation, la mobilité, l’accès aux activités et le sentiment de perspective, la politique de jeunesse se joue aussi dans des programmes concrets et souvent moins visibles que les résultats d’une sélection nationale.

La question du sport scolaire apparaît comme l’un des axes récurrents associés à l’agenda du portefeuille. L’idée est simple : sans base large, sans écoles outillées, sans encadrement formé, les filières de haut niveau restent fragiles. Renforcer le sport scolaire, c’est donc agir sur la santé publique, la cohésion sociale, l’apprentissage des règles collectives, et la détection de talents. C’est aussi une réponse à des réalités sociales : offrir des activités structurantes, des espaces d’expression, des opportunités d’appartenance, et parfois un horizon pour des jeunes qui se projettent dans l’émigration faute de perspectives locales.

Le portefeuille Jeunesse et Sport renvoie également à des initiatives de formation et de certification. Dans des communications publiques, il est fait état de remises de certificats à des jeunes, par exemple dans des parcours liés à l’entrepreneuriat, montrant que la jeunesse n’est pas pensée uniquement sous l’angle des loisirs, mais aussi comme un champ de construction de compétences et d’autonomie.

Au niveau international, Carlos do Canto Monteiro a pris part à des rencontres ministérielles consacrées à la jeunesse, notamment un séminaire ministériel de la jeunesse africaine organisé au Maroc, qu’il a présenté comme important pour fixer des objectifs visant à améliorer la qualité de vie des jeunes sur le continent, tout en exprimant une inquiétude quant à l’avenir de la jeunesse africaine. Cette tonalité révèle un cadrage politique plus large : la jeunesse comme question de développement, d’inclusion et de stabilité, au-delà du strict périmètre national.

La jeunesse, au Cap-Vert, est également un enjeu de territoire. Les réalités d’une île à l’autre ne se recoupent pas complètement : accessibilité des infrastructures, densité associative, proximité des institutions, opportunités de compétition, dispositifs de formation. La politique nationale doit donc composer avec l’insularité et les écarts d’équipement. Dans cette logique, l’ouverture ou le renforcement de pôles d’entraînement, la modernisation de centres de stage ou l’appui à des projets locaux relèvent d’une stratégie de maillage, destinée à éviter que la capitale ne concentre l’essentiel des ressources.

Cette dimension territoriale s’observe aussi dans la façon dont la jeunesse est reliée au sport : le sport sert de structure de socialisation, mais aussi de levier d’équité si les politiques publiques parviennent à corriger les déséquilibres d’accès. C’est un défi constant pour un archipel : financer, maintenir et animer des équipements dispersés, former des encadrants, organiser des compétitions inter-îles, et garantir une continuité d’activité.

Dans le discours public, l’enjeu consiste souvent à lier jeunesse et sport à une promesse de projection : meilleure santé, plus d’opportunités, plus de visibilité, plus de dignité collective. Le danger inverse est connu : réduire la jeunesse à un symbole, sans capacité à transformer les conditions matérielles. Le bilan d’un responsable politique se lit alors dans l’écart entre l’affichage et les dispositifs, entre l’événementiel et la structuration. Dans le cas de Carlos do Canto Monteiro, la multiplication des coopérations, des protocoles et des projets de centres spécialisés traduit une volonté de s’inscrire dans le long terme, même si les résultats se mesurent sur plusieurs années.

Une figure du MpD : positionnement partisan et lecture politique de son ascension

La question “qui est-il ?” n’est jamais seulement biographique lorsqu’il s’agit d’un responsable politique. Elle renvoie aussi à son insertion partisane, à ses réseaux, à sa place dans la majorité, et à la manière dont son profil se prête à une lecture stratégique.

Carlos do Canto Monteiro apparaît lié au Mouvement pour la démocratie (MpD), formation politique majeure de l’archipel, notamment à travers sa présence au sein de la Commission politique nationale du parti. Ce type d’instance, au-delà de l’organigramme, constitue un signal : il ne s’agit pas uniquement d’un technicien de cabinet, mais d’un acteur reconnu dans la structure politique, intégré à la direction entre les grandes réunions partisanes.

Ce positionnement éclaire sa progression : le passage par des fonctions de confiance (direction de cabinet, conseil) puis l’accès à un portefeuille visible est une trajectoire classique dans les systèmes où l’exécutif valorise la loyauté, la compétence, et la capacité à traduire des priorités politiques en dispositifs opérationnels. Être ministre adjoint rattaché au Premier ministre, c’est aussi bénéficier d’une proximité institutionnelle qui offre une marge de manœuvre pour coordonner, arbitrer et porter des dossiers transversaux.

Sur le plan politique, le portefeuille Jeunesse et Sport est à double tranchant. Il est populaire, car il touche à des passions collectives, à la fierté nationale, aux performances des sélections et à la vie quotidienne des familles. Mais il est aussi exposé : l’état des infrastructures, les attentes des fédérations, les besoins de financement, les tensions liées aux sélections, la pression des résultats, tout cela peut se retourner contre un responsable public. Tenir ce portefeuille, c’est donc accepter une visibilité continue, souvent plus émotionnelle que d’autres secteurs.

La gestion de la visibilité internationale ajoute un autre niveau. Les voyages, les cérémonies, les rencontres bilatérales peuvent être perçus comme indispensables à la projection du pays ou, au contraire, être jugés à l’aune de ce qu’ils produisent concrètement sur le territoire : équipements, programmes, emplois, formation. La question de l’efficacité et de la redistribution interne reste structurante, et c’est là que se mesure la solidité politique d’un ministre.

Enfin, la jeunesse est par nature un sujet politique transversal, car elle porte des demandes de transformation sociale. Un responsable public qui s’y consacre ne parle pas seulement de sport ou de loisirs : il parle de perspectives, de mobilité, d’égalité des chances, de citoyenneté, parfois même de prévention. Dans un pays dont une partie de la population se projette vers l’extérieur, la politique de jeunesse est aussi une politique d’ancrage. Les programmes de formation, les activités structurantes, les opportunités sportives, peuvent contribuer à construire des parcours qui ne passent pas uniquement par le départ.

La figure de Carlos do Canto Monteiro se situe donc à l’intersection de plusieurs dimensions : un profil juridique et de cabinet, une insertion partisane au MpD, et un portefeuille dont le contenu est devenu, ces dernières années, un outil de diplomatie autant qu’un champ social de première importance. Sa trajectoire illustre une tendance de fond : dans les petits États, la spécialisation et la coordination internationale deviennent des instruments indispensables pour construire des politiques publiques robustes, surtout dans des secteurs où les standards mondiaux évoluent vite et où l’attente du public est immédiate.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *