Noureddine Ouaddah n’est pas un profil politique classique, au sens partisan du terme. Son itinéraire, tel qu’il apparaît dans les sources publiques, s’inscrit d’abord dans une trajectoire de technicien et d’universitaire devenu haut fonctionnaire, avant d’accéder au rang de ministre. Depuis novembre 2024, il occupe un portefeuille devenu central dans le discours économique algérien : l’Économie de la connaissance, les start-up et les micro-entreprises.
Son nom apparaît aujourd’hui dans deux séquences clefs de la vie gouvernementale récente : sa nomination le 19 novembre 2024, puis sa reconduction le 14 septembre 2025 au sein du gouvernement dirigé par Sifi Ghrieb. Autour de lui, c’est tout un récit public de “modernisation” qui se dessine : accélération des démarches administratives, mise en avant d’un “écosystème” entrepreneurial, et volonté affichée de projeter des entreprises innovantes vers des marchés internationaux. Cette narration est largement portée par les autorités, mais elle se nourrit aussi d’indicateurs avancés dans des entretiens et de rendez-vous internationaux où le ministre est mis en avant.
À l’heure où l’Algérie cherche à diversifier son économie et à structurer une politique publique autour de l’innovation, la figure de Noureddine Ouaddah incarne un type de responsable : à la fois administrateur et porte-voix d’une stratégie qui se veut tournée vers la jeunesse, la technologie et l’entreprise.
Un parcours d’universitaire et de technicien avant l’entrée en politique
Les éléments biographiques disponibles décrivent Noureddine Ouaddah comme un universitaire, passé par l’enseignement et la recherche avant d’intégrer l’appareil d’État. Né en 1978 à Alger, il est titulaire d’un doctorat en génie électrique et informatique obtenu à l’École nationale polytechnique d’Alger.
Cette origine académique est un point régulièrement mis en avant dans les présentations publiques le concernant, car elle le situe dans un registre technico-scientifique, distinct des trajectoires politiques fondées sur la compétition électorale ou l’appartenance partisane. Les sources disponibles le décrivent, avant son arrivée au gouvernement, comme enseignant universitaire et chercheur.
Dans le paysage des responsables publics en Algérie, ce type de profil renvoie à une logique de compétences techniques mobilisées au service d’une politique sectorielle : ici, l’innovation, le numérique, l’accompagnement des jeunes entreprises et la structuration d’un cadre administratif propice aux projets entrepreneuriaux. Il ne s’agit pas, dans les sources consultées, d’un acteur d’appareil partisan connu pour des fonctions politiques antérieures, mais d’un responsable dont la légitimité se construit d’abord par l’expertise et l’action administrative.
Ce point est important pour comprendre la façon dont il est présenté : l’étiquette “homme politique” lui est désormais attachée du fait de sa fonction ministérielle, mais les traces publiques insistent surtout sur le passage du monde académique vers des responsabilités au sein d’un ministère spécialisé, puis vers l’exécutif.
De l’administration à la montée en responsabilité au ministère des start-up
L’ascension de Noureddine Ouaddah vers le gouvernement s’inscrit dans une chronologie liée à la création et à la montée en puissance d’une politique publique dédiée aux start-up. Les sources indiquent qu’à partir de 2020, il occupe “plusieurs postes et responsabilités” au sein du ministère de l’Économie de la connaissance, des start-up et des micro-entreprises.
D’autres publications précisent qu’il a été directeur des start-up et des structures d’appui au sein du même ministère avant de devenir ministre. Cette mention éclaire un point souvent déterminant dans ce type de portefeuille : la continuité. Au lieu d’une nomination “externe”, le choix s’apparente à une promotion interne, issue des équipes déjà engagées dans la conduite des dispositifs publics de labellisation, d’incubation, d’accompagnement et de mise en réseau.
Ce passage par la “machinerie” administrative du secteur est un élément clé : il signifie qu’avant même son entrée au gouvernement, Noureddine Ouaddah était déjà un acteur de la politique publique qu’il est ensuite chargé d’incarner. Dans la pratique, ce type de trajectoire peut répondre à plusieurs objectifs : éviter la rupture, conserver des cadres au fait des programmes en cours, et présenter l’action publique comme une stratégie structurée sur plusieurs années plutôt qu’un simple effet d’annonce.
Il faut aussi rappeler le contexte : depuis le début des années 2020, la promotion des start-up est affichée comme un axe de modernisation économique. Dans un entretien accordé à TSA, le ministre situe explicitement l’“encouragement des startups” à partir de 2020, sous l’impulsion du président Abdelmadjid Tebboune. Quelles que soient les lectures que l’on peut en faire, ce cadre politique explique la visibilité croissante des responsables de ce secteur, y compris au niveau ministériel.
Une nomination en 2024, puis une reconduction en 2025 : ce que disent les annonces officielles
Noureddine Ouaddah est nommé ministre de l’Économie de la connaissance, des start-up et des micro-entreprises à partir du 19 novembre 2024, dans un contexte de remaniement gouvernemental. Il succède alors à Yacine Oualid, un nom souvent associé, dans l’espace public, à la première phase de structuration de ce ministère.
Sur le plan institutionnel, la fonction qu’il occupe est présentée comme un portefeuille dédié : l’économie du savoir, les start-up et les micro-entreprises. Le champ est large : il couvre à la fois la logique d’innovation technologique, l’accompagnement entrepreneurial et des objectifs de simplification administrative, en lien avec la création d’activités.
L’autre étape décisive intervient le 14 septembre 2025 : Noureddine Ouaddah est confirmé dans ses fonctions au sein du gouvernement formé sous l’autorité du Premier ministre Sifi Ghrieb. Cette date a une valeur politique particulière, car elle s’inscrit dans une recomposition gouvernementale où certains portefeuilles changent de titulaire et où d’autres, au contraire, sont reconduits. Le maintien de Ouaddah à ce poste signale, au minimum, une continuité de ligne sur ce secteur.
Les listes publiées à cette occasion mentionnent explicitement Noureddine Ouaddah comme ministre en charge de l’Économie de la connaissance, des start-up et des micro-entreprises. À ce stade, les sources publiques ne détaillent pas davantage les raisons du maintien, mais la logique de continuité apparaît cohérente avec l’orientation affichée : faire de l’innovation un axe durable, et non un chantier ponctuel.
Ce que le ministre met en avant : chiffres, objectifs et réformes annoncées
Dans ses prises de parole publiques, Noureddine Ouaddah insiste sur la dynamique numérique et entrepreneuriale en Algérie, en mobilisant un vocabulaire d’accélération et de changement d’échelle. Un entretien publié en novembre 2025 par TSA le montre déroulant plusieurs indicateurs et objectifs, tout en décrivant des mesures attendues pour 2026.
Parmi les chiffres cités dans cet entretien, l’un des plus repris concerne l’évolution du nombre de start-up : de 200 en 2019 à “plus de 10 000” au moment de l’entretien, avec un objectif affiché de 20 000 d’ici 2029. Ce type de donnée sert une idée centrale : l’existence d’un “pas de géant” dans la structuration de l’écosystème.
Le même entretien aborde aussi la question sensible des échecs. Le ministre cite les résultats d’un sondage réalisé en 2025 sur un échantillon de 1 000 start-up, indiquant un taux de “mortalité” autour de 60 % à 65 %, et des trajectoires plus minoritaires vers des phases de croissance plus avancées, qu’il décrit comme conformes à une “norme mondiale”. Ces chiffres, en eux-mêmes, ne suffisent pas à décrire la santé de l’écosystème, mais ils témoignent d’un choix de communication : intégrer l’échec comme un élément “normal” de la vie entrepreneuriale plutôt que de l’ignorer.
Autre axe majeur : la simplification administrative. Dans cet entretien, Noureddine Ouaddah évoque une ambition de création d’entreprise “100 % en ligne” à l’horizon 2026, présentée comme une généralisation du modèle appliqué aux start-up et au statut de l’entrepreneur à la création d’entreprises plus largement. Il y décrit aussi l’idée que l’arrêt d’activité devrait être simplifié, pour réduire les coûts et frictions administratives. Ce point est souvent central dans les stratégies de formalisation : faciliter l’entrée, mais aussi rendre la sortie moins pénalisante.
Enfin, le ministre insiste sur une définition de l’impact des start-up qui ne se limiterait pas au volume d’emplois créés. Dans l’entretien, il affirme que l’impact “ne se mesure pas en nombre d’emplois”, mais par la création de valeur, la résolution de problèmes industriels, la réduction des importations et la souveraineté technologique, notamment dans le cadre de la digitalisation des services de l’État. Cette manière de cadrer le débat est révélatrice : elle place la question des start-up dans une logique de puissance économique et technologique, et non uniquement sociale.
Dans ce cadre, Noureddine Ouaddah évoque aussi un programme d’apprentissage international, l’ASEP (Algerian Startup Learning Expedition Program), visant à envoyer des responsables de start-up vers de grands écosystèmes (États-Unis, Chine, Corée, Japon). Là encore, l’idée est de positionner l’Algérie dans une circulation internationale des méthodes, des réseaux et des standards d’innovation.
Diplomatie économique et “écosystème” : un ministre au carrefour de l’internationalisation
L’action ministérielle ne se limite pas aux annonces nationales : elle se projette aussi dans des rendez-vous continentaux et des séquences de coopération internationale. À ce titre, plusieurs éléments publics situent Noureddine Ouaddah dans une logique de diplomatie économique centrée sur l’innovation.
L’Algérie a ainsi mis en avant la Conférence africaine des start-up (ASC 2025), annoncée comme devant se tenir du 6 au 8 décembre, à Alger, avec l’objectif de partage d’expérience et d’apprentissage entre pays africains. Dans l’entretien accordé à TSA, le ministre explique vouloir réduire les “frontières” intra-africaines de l’écosystème et contribuer à l’émergence de “champions” africains. Le discours s’inscrit dans une rhétorique de hub régional : Alger comme place de rencontre, de circulation des idées et de mise en relation.
Dans la même logique, une publication de septembre 2025 indique que Noureddine Ouaddah a rencontré Dorothy Tembo, directrice exécutive adjointe de l’Organisation mondiale du commerce, au siège de l’incubateur public Algérie Venture à Dely Ibrahim. Selon ce récit, les échanges auraient porté sur des pistes de coopération via l’International Trade Centre (ITC), autour de programmes visant l’internationalisation des start-up et des formations en entrepreneuriat.
Ce type de séquence est révélateur d’une double ambition : d’un côté, consolider un écosystème interne (incubateurs, dispositifs d’appui) ; de l’autre, se connecter aux circuits internationaux (formations, accès aux marchés, coopération institutionnelle). Cela correspond à l’un des défis récurrents des politiques start-up : la croissance ne dépend pas seulement de la création d’entreprises, mais de leur capacité à accéder à des marchés, à exporter, à attirer des financements, et à soutenir une montée en qualité des produits et services.
Dans la même publication, il est aussi question d’incubateurs universitaires, avec la mention de “près de 100 incubateurs” au sein des universités et grandes écoles, destinés à accompagner étudiants algériens et africains, et d’un défi identifié : la mobilisation effective des universitaires (enseignants et étudiants) vers la création d’entreprises. Au-delà du chiffre, l’enjeu est connu : transformer l’innovation académique en projets économiques, ce qui suppose des passerelles, des incitations et un environnement réglementaire et financier favorable.
Ainsi, la figure de Noureddine Ouaddah se construit à l’intersection de trois espaces : l’administration (simplification, dispositifs), l’écosystème entrepreneurial (incubateurs, labellisation, accompagnement), et l’international (coopérations, conférences, projection africaine). Reste une question, que le temps tranchera davantage que les déclarations : celle de la capacité de cette stratégie à produire des entreprises durablement compétitives, au-delà des annonces et des indicateurs de volumétrie.



