Qui est Petros Hailemariam ?

Dans la Corne de l’Afrique, certains noms sont omniprésents dans les communiqués officiels sans pour autant être familiers du grand public. Petros Hailemariam fait partie de ces responsables dont la visibilité tient moins à une carrière racontée qu’à une succession d’apparitions institutionnelles, au gré d’événements scolaires, de conférences sectorielles ou de rencontres diplomatiques. Son nom circule régulièrement dès qu’il est question d’éducation en Érythrée, un portefeuille à la fois stratégique et hautement politique dans un pays où l’État revendique un rôle central dans la formation, la cohésion nationale et la mobilisation de la jeunesse.

Mais qui est réellement Petros Hailemariam ? Les informations disponibles dessinent surtout le contour d’une fonction plutôt que le portrait d’un homme : on le voit intervenir comme représentant du ministère de l’Éducation, puis comme directeur général chargé des ressources humaines et du développement, et enfin comme responsable présenté, dans certains contextes, comme ministre par intérim. Cette trajectoire apparente, plus administrative que partisane en façade, raconte aussi quelque chose de la manière dont l’Érythrée communique sur ses dirigeants, de ce qu’elle montre et de ce qu’elle laisse dans l’ombre.

Un responsable révélé par les communiqués, plus que par les biographies

Dans beaucoup de pays, l’ascension d’un acteur politique s’accompagne d’une biographie publique : études, débuts militants, mandats, réseaux. Dans le cas de Petros Hailemariam, l’accès à ce type de récit est limité. Les éléments les plus concrets proviennent principalement de comptes rendus d’événements : réunions d’évaluation du ministère, cérémonies liées à la profession enseignante, congrès d’associations scientifiques, conférences sur l’alphabétisation des adultes. Dans ces textes, l’homme est rarement présenté au-delà de son titre du moment.

Cette rareté des données biographiques n’est pas un détail anodin : elle s’inscrit dans un environnement politique où les trajectoires individuelles, surtout au sein de l’appareil d’État, sont souvent moins mises en avant que la continuité des institutions. En Érythrée, la parole officielle privilégie la description des programmes, des priorités nationales et des objectifs sectoriels. Les responsables apparaissent comme des relais de politique publique, plus que comme des personnalités à part entière.

Petros Hailemariam est ainsi identifié, à plusieurs reprises, comme cadre supérieur du ministère de l’Éducation. Dès 2022 et 2023, il est cité comme directeur général rattaché à des fonctions liées à la recherche, au développement des ressources humaines et à la formation, dans le cadre d’activités évaluant l’année scolaire ou valorisant des programmes d’engagement des élèves. À partir de 2025, on le voit aussi intervenir comme représentant du ministre, c’est-à-dire comme porte-voix direct de la hiérarchie politique du ministère lors de réunions nationales. Cette évolution, telle qu’elle ressort des mentions publiques, suggère un élargissement de ses responsabilités ou, au minimum, une centralité accrue dans la communication institutionnelle.

Un point ressort : Petros Hailemariam semble être un homme de l’appareil éducatif, rompu aux annonces de politique publique et aux messages de cadrage. Ses interventions publiques s’articulent presque toujours autour de la qualité de l’enseignement, de la planification, de l’évaluation, de la mobilisation des partenaires et de la cohérence entre programmes scolaires et “agenda national de développement”. Ce vocabulaire, typique des communications ministérielles, renvoie à la dimension éminemment politique de l’éducation dans un État qui insiste sur la construction nationale et la discipline collective.

Les fonctions attribuées : de la gestion des ressources humaines à l’intérim ministériel

Les titres associés à Petros Hailemariam permettent néanmoins de tracer un fil. Dans un compte rendu d’août 2023, il apparaît comme directeur général du développement des ressources humaines au ministère de l’Éducation, intervenant lors d’une réunion d’évaluation annuelle portant sur la qualité et l’équité de l’enseignement, l’état des écoles, la supervision, la vie en internat, les examens nationaux et les activités parascolaires. Il y est alors question de réviser les programmes pour les aligner sur les priorités nationales, signe d’une fonction tournée vers la planification et l’ingénierie des politiques éducatives.

D’autres mentions, en 2022, l’associent à un périmètre proche, parfois formulé comme “recherche et développement des ressources humaines”. Dans le langage administratif, cela renvoie à des responsabilités qui touchent à la formation des enseignants, à la structuration des cursus, à la professionnalisation, aux dispositifs de suivi et à l’adaptation du système éducatif aux besoins du pays. Que ces intitulés varient selon les publications n’a rien d’exceptionnel : la communication institutionnelle traduit parfois la même fonction par des formulations différentes, ou reflète des réorganisations internes.

En 2025, un changement de registre s’observe : Petros Hailemariam n’est plus seulement un directeur général intervenant sur des aspects techniques. Il est présenté comme représentant du ministre lors de conférences et de cérémonies nationales. Dans une réunion d’évaluation du ministère, il insiste sur la nécessité de traiter les difficultés du processus d’enseignement-apprentissage, d’améliorer certains volets organisationnels et de renforcer les efforts intégrés pour produire un changement qualitatif. Dans une conférence sur l’éducation des adultes, il porte un discours historique et politique, reliant la lutte contre l’analphabétisme à la période de la lutte d’indépendance et à l’action du mouvement au pouvoir.

Enfin, une information notable circule dans des communications diplomatiques et dans un document de campagne internationale lié à l’éducation de la petite enfance : Petros Hailemariam y est présenté comme ministre de l’Éducation par intérim. Dans le langage gouvernemental, un intérim peut recouvrir des réalités diverses : remplacement temporaire, délégation de certaines attributions, ou position de facto pendant une période de transition. Quoi qu’il en soit, l’emploi de cette formule place Petros Hailemariam au sommet du ministère, au moins à un moment donné, et confirme qu’il ne s’agit pas uniquement d’un technicien.

Cette trajectoire, telle qu’elle apparaît publiquement, dessine le profil d’un responsable monté en responsabilité par les rouages internes : gestion, planification, coordination, représentation. Elle ne permet pas de conclure sur un parcours partisan précis, mais elle indique une place importante dans l’architecture de l’éducation en Érythrée, un secteur où l’État tient un discours de souveraineté, d’égalité d’accès et d’effort national.

Les thèmes récurrents de ses prises de parole : qualité, évaluation, lutte contre l’analphabétisme

Le contenu des déclarations publiques attribuées à Petros Hailemariam est, en soi, un indicateur de son rôle. Il ne s’exprime pas sur des sujets extérieurs à son portefeuille : pas de tribunes sur la sécurité régionale, pas d’interventions économiques générales, pas de commentaires sur la politique étrangère. Son territoire, c’est l’école, la formation, la jeunesse et, plus largement, le “capital humain”.

Un premier thème revient régulièrement : l’évaluation. Les réunions d’“activity assessment”, qui ressemblent à des bilans annuels et à des exercices de planification, occupent une place importante. On y passe en revue les résultats scolaires, les contraintes logistiques, les difficultés de supervision, les questions d’internat, les examens nationaux, l’inscription des élèves, et l’articulation entre activités éducatives et programmes complémentaires. Dans ces cadres, Petros Hailemariam met l’accent sur l’intérêt de l’évaluation pour identifier les défis, consolider les acquis, résoudre les blocages administratifs, et améliorer la qualité.

Deuxième thème : la réforme curriculaire. Dans une intervention de 2023, il est explicitement question de réviser les programmes pour qu’ils correspondent à l’agenda national de développement. Cette formulation renvoie à une conception instrumentale et politique de l’éducation : l’école n’est pas seulement un lieu d’apprentissage individuel, elle est un levier de développement national, censé produire des compétences utiles, mais aussi des attitudes civiques conformes à un projet collectif.

Troisième thème : la mobilisation sociale. Lors d’une conférence consacrée à l’éducation des adultes et à la lutte contre l’analphabétisme, son propos s’inscrit dans une narration historique : l’éradication de l’analphabétisme est présentée comme un effort entamé dès la période de la lutte armée pour l’indépendance, poursuivi après l’indépendance par l’État, et désormais décliné à travers des feuilles de route et des partenaires. Le discours ne se limite pas à l’efficacité pédagogique ; il associe l’alphabétisation à la transformation sociale, au développement durable et à la participation citoyenne.

Quatrième thème : la reconnaissance du corps enseignant. Dans les événements marquant la journée mondiale des enseignants, il souligne l’investissement public dans l’augmentation du nombre d’enseignants et l’amélioration de leurs capacités. Là encore, la formulation sert un double objectif : valoriser la profession et rappeler que l’État s’affiche comme le pilote principal du système.

Enfin, un thème transversal, moins explicite mais constant, est celui de l’intégration des partenaires. Dans ses interventions, il est question de collaboration avec des acteurs sectoriels (associations scientifiques, institutions éducatives, structures de formation) et, dans certains cas, de coopération internationale. Ce point est important, car il nuance l’image d’un système fermé : sur le terrain éducatif, l’Érythrée affiche des initiatives de partenariat, au moins sous forme de réunions, de conférences et de programmes.

Diplomatie et visibilité internationale : quand l’éducation devient un canal de relations extérieures

Petros Hailemariam n’est pas seulement visible dans des cadres nationaux. Son nom apparaît aussi dans des contextes de diplomatie éducative, qui servent souvent de terrain relativement consensuel pour tisser des liens avec des pays partenaires.

Un exemple significatif est une rencontre rapportée entre l’ambassadeur d’Iran et Petros Hailemariam, présenté comme ministre de l’Éducation par intérim. La discussion, telle qu’elle est décrite, porte sur des bourses d’études et sur des échanges technologiques. L’éducation y est utilisée comme un outil de coopération : former, accueillir des étudiants, partager des compétences. Dans les diplomaties contemporaines, ce type d’échange est un marqueur de soft power, mais aussi une réponse à des besoins internes : renforcer le niveau d’expertise, diversifier les opportunités de formation, et inscrire l’enseignement supérieur dans des réseaux internationaux.

Un autre marqueur international est la présence du nom de Petros Hailemariam dans un document de plaidoyer mondial lié à l’éducation de la petite enfance, qui met en avant l’objectif de scolarisation précoce et la nécessité de soutien international. Là encore, l’apparition de son nom, associé à une fonction ministérielle par intérim, suggère qu’il a été mobilisé pour porter un message à l’extérieur : faire reconnaître une priorité, solliciter des appuis, inscrire l’Érythrée dans des objectifs de développement durable liés à l’éducation.

Ces éléments ne suffisent pas à faire de Petros Hailemariam une figure diplomatique au sens classique. Mais ils montrent que, lorsque l’État érythréen s’exprime dans des espaces internationaux, le canal éducatif est l’un des plus utilisés, et que ce responsable en est l’un des visages. Dans un pays où la communication sur la gouvernance peut être parcimonieuse, la diplomatie éducative offre une scène où l’on parle de formations, d’enfants, d’enseignants, de programmes, un vocabulaire plus “universel” et souvent moins conflictuel.

Cette visibilité internationale renforce aussi l’idée que Petros Hailemariam n’est pas seulement un cadre technique. Porter un message à des partenaires étrangers, représenter un ministère dans des échanges diplomatiques, implique un niveau de confiance politique. Cela s’inscrit dans une logique où le ministère de l’Éducation est à la fois un organe de service public et un outil d’orientation idéologique et sociale.

Ce que son profil dit du fonctionnement du pouvoir en Érythrée : un homme, un système, des zones d’ombre

Poser la question “Qui est Petros Hailemariam ?” revient aussi, en Érythrée, à poser une question plus large : comment le pouvoir se raconte-t-il, comment les responsables émergent-ils, et que choisit-on de rendre public ?

Le premier enseignement est l’écart entre fonction et biographie. Le public dispose d’informations sur ce que Petros Hailemariam fait ou représente, beaucoup moins sur qui il est. Ce phénomène n’est pas spécifique à une seule personne : dans des systèmes où l’institution prime sur l’individu, les responsables sont souvent présentés comme des agents de politique publique plutôt que comme des personnalités politiques à la carrière détaillée. Cela peut avoir plusieurs effets. D’un côté, cela renforce l’idée d’une action collective, d’une continuité et d’une discipline d’État. De l’autre, cela complique le travail de lecture politique, car l’on ne sait pas toujours d’où viennent les décideurs, quels sont leurs soutiens, ni quelle est leur marge d’autonomie.

Le deuxième enseignement est le rôle central de l’éducation. Les interventions associées à Petros Hailemariam montrent un ministère qui se pense comme moteur de transformation sociale. Les réunions d’évaluation ne sont pas seulement des exercices bureaucratiques : elles exposent une vision de l’école comme outil de qualité, d’équité, d’encadrement et de développement. La révision des programmes pour coller à l’agenda national, la lutte contre l’analphabétisme et la valorisation des enseignants traduisent une conception où la formation du citoyen et la préparation au développement économique avancent ensemble.

Le troisième enseignement est la place de l’histoire politique dans le discours éducatif. Relier l’alphabétisation à la période de la lutte pour l’indépendance n’est pas un simple rappel historique : c’est une manière de donner une légitimité idéologique à une politique publique. Cela inscrit l’éducation dans un récit national où l’effort collectif, la discipline et la reconstruction sont des valeurs centrales. Le responsable qui porte ce récit n’est pas neutre : il endosse un langage de continuité, d’héritage et de mobilisation, qui dépasse la seule pédagogie.

Le quatrième enseignement est la logique de représentation. Être présenté comme représentant du ministre ou comme ministre par intérim, apparaître dans des rencontres diplomatiques, prendre la parole dans des cérémonies nationales, signale une position d’interface : entre administration et politique, entre intérieur et extérieur, entre planification technique et narration nationale. Petros Hailemariam semble se situer à cet endroit précis : celui où l’éducation n’est pas qu’un secteur, mais un symbole.

Reste une zone d’ombre : l’absence d’informations consolidées sur son parcours personnel, sa date de naissance, son itinéraire académique, ses postes précédents avant les fonctions visibles, ou encore sa trajectoire au sein des structures politiques du pays. Cette absence limite ce qu’un portrait journalistique peut affirmer sans spéculer. Elle oblige à une approche prudente : décrire ce qui est attesté par des mentions répétées, contextualiser ce que ces mentions signifient, et reconnaître que, pour le reste, le dossier public est mince.

Au final, Petros Hailemariam apparaît comme un responsable politique et administratif de premier plan dans le champ éducatif érythréen, dont l’influence se lit moins à travers une biographie exposée qu’à travers des rôles successifs de représentation et de pilotage. Il est, en quelque sorte, un visage de l’éducation d’État : celui qui parle d’évaluation, de curricula, de lutte contre l’analphabétisme, de reconnaissance des enseignants et de coopération éducative. Et son profil, précisément parce qu’il reste discret, illustre une réalité plus large : en Érythrée, la compréhension des figures publiques passe souvent par la lecture des institutions, des discours officiels et des priorités nationales, bien plus que par la mise en scène des individus.

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