Né dans un pays où l’État demeure un acteur central de l’économie, Victor Francisco dos Santos Fernandes a fait partie de ces profils technocratiques que l’exécutif angolais a promus, au tournant des années 2020, pour piloter des portefeuilles directement exposés aux tensions du quotidien: l’approvisionnement, les prix, la production locale, les importations, la vie des entreprises. Son nom est surtout associé à une fonction: celle de ministre, d’abord du Commerce, puis de l’Industrie et du Commerce. Sa trajectoire éclaire un moment particulier de la vie politique angolaise: celui d’un pouvoir qui cherche à réduire la dépendance au pétrole, tout en affrontant les contraintes de l’inflation, du taux de change et du coût des biens essentiels.
Un ministre nommé par décrets, au cœur de l’appareil exécutif
La première balise incontestable de la carrière politique de Victor Francisco dos Santos Fernandes est un texte juridique: un décret présidentiel qui le nomme ministre du Commerce. Le document, daté du 27 mars 2020, précise qu’il est nommé à ce poste par le président de la République d’Angola, João Manuel Gonçalves Lourenço.
Deux ans plus tard, dans la recomposition de l’exécutif qui suit la formation d’un nouveau gouvernement en septembre 2022, son nom figure de nouveau parmi la liste des ministres nommés. Le décret présidentiel du 19 septembre 2022 le désigne alors ministre de l’Industrie et du Commerce.
Cette mécanique institutionnelle dit beaucoup de la manière dont se structurent les responsabilités politiques en Angola. Les ministres ne sont pas élus à leur portefeuille: ils sont nommés, remplacés ou démis par décision présidentielle. Dans ce cadre, la visibilité de Victor Francisco dos Santos Fernandes dépend d’abord des textes qui l’installent dans la fonction et, ensuite, de l’action de son département ministériel, davantage que d’un parcours partisan abondamment documenté dans l’espace public.
La fin de ce cycle ministériel est, elle aussi, actée par écrit. Le 12 juillet 2023, un décret présidentiel met fin à ses fonctions de ministre de l’Industrie et du Commerce; un autre décret, le même jour, nomme son successeur, Rui Miguêns de Oliveira. L’information est reprise par le portail officiel du gouvernement, qui annonce l’exonération et la nomination.
Ainsi, en trois dates, se dessine la séquence officielle: nomination au Commerce en 2020, nomination à l’Industrie et au Commerce en 2022, départ du gouvernement en 2023. Le reste du portrait consiste à comprendre ce que recouvrent ces portefeuilles et ce que l’on peut établir de son profil, au-delà des intitulés.
Formation d’ingénieur et profil technico-managérial: ce que disent les biographies publiques
Les éléments biographiques disponibles décrivent un profil de formation technique. Des notices biographiques publiées en ligne indiquent qu’il est titulaire d’une licence en ingénierie mécanique de l’Instituto Superior Técnico et d’une formation en ingénierie aéronautique à l’Académie de l’Armée de l’air.
Ces détails, relativement précis, s’inscrivent dans une tendance observée dans plusieurs gouvernements: l’appel à des profils perçus comme techniciens, susceptibles de traiter des dossiers économiques et administratifs, dans des ministères confrontés à des arbitrages concrets (disponibilité des biens, cadre réglementaire, importations, production, logistique). Dans le cas angolais, ces ministères sont aussi au carrefour de la stratégie de diversification, enjeu récurrent dans les analyses économiques sur le pays.
On retrouve également, dans des biographies publiques, une liste de postes occupés avant l’entrée au gouvernement, dans des structures à la fois publiques et privées. Il est notamment fait mention de responsabilités de direction dans la banque postale (Banco Postal), à la télévision publique angolaise (TPA), et dans un groupe privé (Grupo Score), ainsi que d’activités de conseil auprès de structures gouvernementales économiques et financières.
Ces éléments, même lorsqu’ils sont synthétiques, contribuent à dessiner une trajectoire typique d’un haut responsable appelé à un portefeuille économique: passage par des fonctions de gestion, expérience dans des entités stratégiques, puis entrée au gouvernement. Ils n’autorisent toutefois pas, à eux seuls, à conclure à une doctrine personnelle ou à un courant politique; ils attestent surtout d’un ancrage dans la gestion et l’administration.
Du Commerce à l’Industrie et au Commerce: un portefeuille exposé aux prix, à l’approvisionnement et à la production locale
Le fait d’avoir été d’abord ministre du Commerce, puis ministre de l’Industrie et du Commerce, place Victor Francisco dos Santos Fernandes au centre de questions qui touchent directement les ménages comme les entreprises.
Le ministère du Commerce, par nature, est associé aux circuits de distribution, aux importations, aux pratiques commerciales, à la surveillance des marchés, et parfois à des politiques de stabilisation ou de contrôle, selon l’architecture administrative du pays. Lorsque la dimension « Industrie » rejoint le portefeuille, l’équation devient plus large: stimuler la production locale, soutenir la transformation, et articuler cette ambition avec la réalité d’un pays dont l’économie est longtemps restée fortement dépendante des revenus pétroliers.
C’est un poste d’équilibriste, particulièrement dans une période où l’Angola affronte des contraintes macroéconomiques documentées: pressions sur la monnaie, épisodes de volatilité et de crise de change, et effets de l’inflation sur le coût des biens importés. Ces variables ne sont pas propres à un ministre; elles structurent néanmoins l’environnement dans lequel un titulaire du Commerce ou de l’Industrie et du Commerce exerce ses responsabilités.
Dans ce contexte, la diversification économique n’est pas un slogan abstrait. De nombreux travaux et analyses institutionnelles soulignent que l’Angola demeure très dépendant du pétrole, et que la croissance hors pétrole suppose des réformes (capital humain, infrastructures, climat des affaires, accès au crédit).
Dit autrement: même si les décrets de nomination ne détaillent pas un programme, l’intitulé même de son poste en 2022, ministre de l’Industrie et du Commerce, signale que le pouvoir exécutif relie explicitement industrie, commerce et stratégie de transformation économique.
Un passage au gouvernement dans une séquence économique délicate
Pour comprendre la visibilité d’un ministre du Commerce ou de l’Industrie et du Commerce, il faut regarder la période. Sa nomination au Commerce intervient en mars 2020.
Les années suivantes s’inscrivent dans une séquence où l’économie angolaise, après plusieurs années difficiles, recouvre la croissance en 2022, mais traverse aussi des turbulences, notamment sur le plan monétaire en 2023, selon des analyses publiques d’institutions et d’administrations économiques.
Par ailleurs, la hausse des coûts mondiaux, les effets de la dépréciation du kwanza et la facture des importations constituent des facteurs régulièrement cités pour expliquer la pression inflationniste et la hausse des prix des biens essentiels dans plusieurs pays importateurs. Sur l’Angola, des analyses évoquent l’impact du coût des importations cruciales (dont l’alimentation) combiné à la dépréciation de la monnaie depuis 2020.
Dans un tel climat, le ministre en charge du commerce devient presque mécaniquement l’un des visages exposés de l’action publique: parce que les questions de prix, de disponibilité des produits, de régulation des marchés ou de lutte contre certaines pratiques commerciales se retrouvent au centre du débat public. L’enjeu est d’autant plus sensible que l’Angola, tout en cherchant à « produire plus localement », ne peut pas, à court terme, se détacher de flux d’importations, de chaînes logistiques, de la disponibilité des devises, et d’un environnement international qui pèse sur les coûts.
Il faut toutefois rester prudent: les sources accessibles publiquement attestent de ses nominations et de son départ, et donnent des fragments de biographie, mais elles ne permettent pas toujours de retracer, mesure par mesure, les décisions prises sous son autorité. Un article de presse responsable doit donc distinguer le contexte, largement documenté, et l’action individuelle, qui ne peut être décrite qu’à partir d’éléments explicitement sourcés.
Départ en 2023: ce que l’on sait, et ce que l’on ne peut pas affirmer
Le 12 juillet 2023, Victor Francisco dos Santos Fernandes est formellement exonéré de ses fonctions de ministre de l’Industrie et du Commerce. Le portail officiel du gouvernement annonce l’acte et la nomination, le même jour, de Rui Miguêns de Oliveira pour lui succéder.
Le décret publié dans une base de droit angolais précise également qu’il était nommé à ce poste par le décret présidentiel du 19 septembre 2022, reliant ainsi les deux textes et confirmant la continuité juridique de la séquence.
Des médias ont relayé l’information du remplacement, en rappelant son départ du gouvernement et l’identité du successeur.
Au-delà de ces faits, les spéculations sur les raisons politiques d’une sortie de gouvernement sont fréquentes dans l’espace médiatique de nombreux pays. Mais, sans déclaration officielle détaillant les motifs ou sans documents publics explicitant une cause, on ne peut pas attribuer une raison précise à cette exonération. Les textes disponibles établissent le fait de la décision, sa date et son auteur institutionnel; ils ne racontent pas l’arrière-scène.
Ce qui demeure, en revanche, c’est la place occupée par ce portefeuille dans la stratégie angolaise. La question industrielle reste centrale dans la communication économique du pays, et la succession au ministère s’inscrit dans la continuité d’un agenda de transformation et de diversification, souvent analysé comme difficile à mettre en œuvre dans un État où le poids des structures publiques et des contraintes administratives demeure important.
Victor Francisco dos Santos Fernandes apparaît ainsi comme un acteur d’une période précise: celle où le commerce, la régulation et l’industrie sont mobilisés comme leviers pour réorienter une économie toujours marquée par la dépendance au pétrole, tout en gérant les contraintes immédiates du pouvoir d’achat et des marchés. Son portrait public est moins celui d’un tribun que celui d’un gestionnaire promu au rang ministériel, dont la trace principale, aujourd’hui, reste gravée dans les décrets qui l’ont nommé et démis.



