Refondation de la République : la France renforce son appui à une transition civile et transparente

L’ambassadeur de France à Madagascar, Arnaud Guillois, a rencontré jeudi 23 octobre 2025 les nouveaux dirigeants de la transition, à savoir Michaël Randrianirina, président de la Refondation de la République, et le Premier ministre Herintsalama Rajaonarivelo. Ces entretiens, survenus dans un contexte politique particulièrement sensible, marquent une étape importante dans la recomposition diplomatique en cours après les récents bouleversements institutionnels. La France, par la voix de son représentant, a exprimé sa volonté de soutenir le processus de refondation tout en insistant sur la nécessité d’une transition démocratique claire et d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel à travers des élections jugées indispensables. Cette double rencontre, tenue à Antananarivo, a également permis d’aborder les axes majeurs de la coopération franco-malgache, notamment dans les domaines du développement, de l’énergie, de l’éducation et de la gouvernance.

Une diplomatie en mouvement dans un contexte de transition

Depuis plusieurs semaines, la situation politique malgache attire l’attention de la communauté internationale. Le renversement de l’ancien exécutif et la mise en place d’un gouvernement de refondation ont ouvert une nouvelle période d’incertitude institutionnelle. Dans ce contexte, la France a souhaité manifester rapidement sa position et son engagement. En rencontrant le président de la Refondation de la République et le Premier ministre, Arnaud Guillois s’est inscrit dans une démarche de continuité diplomatique, tout en affichant la volonté de Paris d’accompagner la transition. L’ambassadeur a tenu à rappeler que la France demeurait attachée à la stabilité politique du pays et au respect des aspirations démocratiques de sa population.

Ces entretiens, qui font suite à ceux d’autres diplomates européens et du représentant de la Russie, s’inscrivent dans une séquence diplomatique intense. Les chancelleries étrangères cherchent à comprendre les orientations du nouveau pouvoir et à établir un dialogue direct avec les responsables de la transition. La France, partenaire historique de Madagascar, entend ainsi réaffirmer sa place dans ce processus, en privilégiant une approche équilibrée entre soutien politique et réalisme économique.

Selon les informations communiquées par l’ambassade, les discussions ont porté sur les « défis politiques de la transition en cours et les perspectives de progrès démocratiques ». Arnaud Guillois a souligné la nécessité de « prendre en compte les aspirations démocratiques et légitimes exprimées avec force par la société civile et la jeunesse », cette dernière ayant « payé le plus lourd tribut lors des manifestations des dernières semaines ». Ce rappel, empreint de gravité, traduit une forme d’avertissement bienveillant, insistant sur la responsabilité des nouvelles autorités à respecter les droits et les libertés fondamentales dans cette phase délicate de refondation nationale.

L’appel de la France à un processus civil et électoral encadré

L’un des points essentiels abordés par l’ambassadeur de France concerne la nature du processus politique en cours. Arnaud Guillois a plaidé pour une transition clairement orientée vers le rétablissement d’un gouvernement civil pleinement opérationnel, et pour la tenue d’élections dans un « délai raisonnable ».Cette expression, choisie avec soin, laisse entendre la volonté de Paris d’éviter à la fois une précipitation hasardeuse et une transition prolongée qui risquerait de nourrir les tensions sociales.

Les nouveaux dirigeants malgaches ont, de leur côté, affirmé que les élections ne pourraient être organisées avant la réforme du système électoral. Ce chantier, considéré comme prioritaire, concerne notamment la révision de la liste électorale et la mise à jour des textes encadrant les scrutins. La position du gouvernement de refondation se veut ainsi pragmatique : refonder le cadre électoral pour garantir des élections crédibles et inclusives. Cette orientation semble trouver un écho favorable à Paris, qui privilégie la stabilité et la transparence comme conditions préalables à tout retour à l’ordre constitutionnel.

La double rencontre entre l’ambassadeur français, le président de la Refondation et le Premier ministre traduit également une reconnaissance implicite du nouveau pouvoir par la diplomatie française. Elle illustre la volonté de Paris d’adopter une attitude constructive, sans rompre le dialogue ni donner l’impression d’ingérence. En insistant sur l’importance de la participation des civils et de la tenue d’élections libres, la France se positionne comme un partenaire attentif, soucieux d’encourager la légitimité démocratique tout en préservant ses liens historiques avec Madagascar.

Au-delà de la dimension politique, cette rencontre témoigne d’un repositionnement diplomatique visant à adapter la coopération bilatérale aux nouvelles réalités du pays. La France, tout en rappelant son attachement à la démocratie, semble vouloir inscrire son action dans une logique d’intérêt mutuel, conjuguant engagement économique, exigence démocratique et pragmatisme.

Redéfinir la coopération franco-malgache dans un contexte sensible

La France entretient avec Madagascar des liens multiples, hérités d’une longue histoire commune. Ces relations se traduisent aujourd’hui par une coopération dense dans les domaines économique, culturel, éducatif et humanitaire. La transition politique en cours oblige néanmoins à repenser les modalités de cette coopération, pour mieux répondre aux attentes de la population et des nouvelles autorités.

Les échanges entre Arnaud Guillois et les dirigeants malgaches ont été qualifiés de « riches et constructifs ». Ils traduisent une démarche claire de reconnaissance du gouvernement de transition et une volonté de redéfinir la coopération bilatérale sur des bases actualisées. L’ambassadeur français a tenu à rappeler combien la France restait attachée à sa relation avec Madagascar et à la nation malgache dans son ensemble.

Sur le plan économique, Paris compte parmi les principaux partenaires financiers de l’île. Les investissements français sont présents dans plusieurs secteurs stratégiques, notamment l’énergie, les télécommunications, les infrastructures et l’agroalimentaire. Parmi les projets emblématiques figure celui du téléphérique d’Antananarivo, financé en grande partie par un prêt français de plus de 100 millions d’euros. Ce projet, qui vise à fluidifier la mobilité urbaine, illustre la volonté de la France de contribuer à la modernisation des infrastructures locales tout en favorisant la visibilité de son expertise technique.

Par ailleurs, plusieurs entreprises françaises demeurent solidement implantées à Madagascar depuis des décennies. Elles constituent un tissu économique important, source d’emplois et de transferts de compétences. Le réseau culturel français, incarné par les alliances françaises et les établissements scolaires agréés, est également l’un des plus denses au monde. Cette présence culturelle, associée à une coopération éducative soutenue, conforte l’influence française dans la région et témoigne d’une relation d’amitié durable entre les deux nations.

Dans ce contexte, la diplomatie française souhaite consolider cette relation tout en adaptant son approche. Il s’agit pour Paris d’éviter toute posture paternaliste et de privilégier une coopération fondée sur la réciprocité et la transparence. L’ambassadeur Guillois a d’ailleurs évoqué la nécessité de « réajuster les programmes existants selon les besoins exprimés par les nouvelles autorités et par la population », signalant une évolution vers une politique d’aide plus souple et davantage axée sur l’impact concret.

Les priorités de la coopération : eau, électricité, éducation et gouvernance

Lors de ses entretiens, l’ambassadeur de France a dressé un panorama des principaux projets menés par Paris dans le pays. Ces actions couvrent des domaines essentiels au développement et à la stabilité sociale. Selon le communiqué publié par l’ambassade, les discussions ont porté principalement sur les secteurs jugés prioritaires : l’accès à l’eau potable, l’électricité, l’éducation, l’enseignement supérieur, la formation professionnelle et la lutte contre la corruption.

L’accès à l’eau et à l’électricité demeure un défi majeur pour une grande partie de la population malgache. La France, à travers ses financements et partenariats, contribue déjà à plusieurs programmes visant à améliorer ces infrastructures vitales. Ces efforts s’inscrivent dans une logique de développement durable et d’inclusion sociale. L’éducation et la formation professionnelle constituent également un pilier central de la coopération franco-malgache. En soutenant les établissements scolaires et universitaires, la France mise sur le renforcement du capital humain, facteur indispensable à la refondation du pays.

La lutte contre la corruption, quant à elle, représente un enjeu transversal, essentiel à la consolidation institutionnelle. Paris, en coordination avec d’autres partenaires internationaux, souhaite encourager des mécanismes de transparence et de responsabilité au sein des institutions publiques. Cette approche cohérente traduit une volonté d’accompagner la transition malgache par des outils concrets, tout en respectant la souveraineté du pays.

L’ambassadeur a annoncé que de nouvelles propositions de coopération seraient formulées dans les prochaines semaines, en lien avec les priorités du gouvernement de refondation. Ce calendrier témoigne d’une diplomatie pragmatique, soucieuse de soutenir le changement sans interférer directement dans la gouvernance nationale.

Un repositionnement diplomatique pour une nouvelle ère

À travers cette séquence de rencontres et de déclarations, la France affiche une ligne diplomatique mesurée mais ferme. Il ne s’agit pas pour Paris d’imposer une vision, mais d’accompagner une transition qu’elle souhaite inclusive et apaisée. L’accent mis sur le caractère civil du processus et sur la tenue d’élections à court terme reflète une préoccupation partagée par plusieurs partenaires internationaux : celle de garantir la légitimité du futur pouvoir et la stabilité du pays.

Le ton de l’ambassadeur Arnaud Guillois, ferme mais respectueux, traduit une diplomatie du dialogue, fondée sur la confiance et la responsabilité. En évoquant les « aspirations démocratiques » de la jeunesse et de la société civile, le représentant français fait écho aux revendications populaires qui ont conduit à la refondation actuelle. Il rappelle aussi implicitement que toute transition réussie doit s’appuyer sur une base sociale solide et sur des institutions crédibles.

Ce repositionnement diplomatique s’inscrit dans une stratégie plus large : celle d’une France qui cherche à maintenir son influence dans la région tout en adaptant ses méthodes à un contexte mondial changeant. La période de transition malgache constitue à ce titre un test grandeur nature pour la politique étrangère française en Afrique et dans l’océan Indien. La capacité de Paris à conjuguer exigence démocratique et réalisme économique déterminera la profondeur de sa relation avec les nouvelles autorités malgaches dans les années à venir.

En conclusion, la visite de l’ambassadeur de France, au-delà de sa portée protocolaire, marque une étape symbolique de la transition politique en cours. Elle met en lumière la volonté des deux parties de renouer un dialogue constructif, fondé sur la stabilité, la coopération et la confiance mutuelle. En insistant sur la nécessité d’un gouvernement civil et d’élections dans un délai raisonnable, la France réaffirme son attachement à la démocratie et à la souveraineté du peuple malgache, tout en préparant les fondations d’un partenariat repensé pour l’avenir.

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