Les Championnats d’Afrique de tennis de table 2025 ont offert une nouvelle vitrine au sport malgache sur la scène continentale. Six pongistes représentant Madagascar ont pris part à la compétition, organisée à Tunis du 12 au 19 octobre. Parmi eux, seul le duo masculin composé de Fabio Rakotoarimanana et Antoine Razafinarivo a réussi à décrocher une médaille, en s’imposant jusqu’en demi-finale et en repartant avec le bronze. Une performance solide dans un tournoi d’un niveau relevé, où les grandes nations africaines du tennis de table – l’Égypte, le Nigeria et l’Algérie – ont une fois de plus confirmé leur domination.
Une compétition au sommet du tennis de table africain
Organisés chaque année sous l’égide de la Fédération africaine de tennis de table (ATTF), les Championnats d’Afrique rassemblent les meilleurs joueurs du continent. L’édition 2025, accueillie à Tunis, a réuni une trentaine de nations africaines, venues défendre leurs couleurs dans plusieurs catégories : simples messieurs, simples dames, doubles messieurs, doubles dames, doubles mixtes et épreuves par équipes.
Pour Madagascar, cette participation représentait un défi de taille, mais aussi une opportunité de confirmer les progrès observés ces dernières années. Les six pongistes sélectionnés évoluent tous en France, un atout considérable qui leur permet de bénéficier d’un encadrement et d’un rythme de compétition européens. Le contingent malgache se composait de Fabio Rakotoarimanana, Antoine Razafinarivo, Hanitra Karen Raharimanana, Edena Prévot, Setra Rakotoarisoa et Zayyan Houssein, ce dernier étant d’origine mauricienne mais associé à un joueur malgache pour l’épreuve de double.
Dès les premiers tours, le niveau de jeu affiché a confirmé que la concurrence serait rude. Les représentants d’Afrique du Nord et de l’Ouest – notamment l’Égypte, l’Algérie, le Nigeria et la Tunisie – dominaient les classements et occupaient les têtes de série. Dans ce contexte, les performances du duo malgache Rakotoarimanana-Razafinarivo ont constitué une véritable bouffée d’air pour le camp malgache.
Le parcours héroïque de Fabio et Antoine jusqu’au bronze
Fabio Rakotoarimanana et Antoine Razafinarivo n’en sont pas à leur première apparition sur la scène continentale. Champions d’Afrique en double en 2023 et plusieurs fois titrés dans la zone Est, ils ont su capitaliser sur leur complicité et leur expérience commune pour se hisser à nouveau parmi les meilleurs.
Dès les premiers tours du double messieurs, le duo malgache a imposé son rythme et sa régularité. En quart de finale, ils ont brillamment disposé de la paire tunisienne composée d’Aboubaker Bourass et de Wassim Essid, sur le score sans appel de 3 sets à 0 (11/8, 11/7, 11/9). Leur coordination, leur jeu agressif en retour de service et leur capacité à varier les trajectoires ont fait la différence face à des adversaires pourtant soutenus par le public local.
La demi-finale face aux Algériens Maheidine Bella et Milhane Jellouli a ensuite constitué un tournant. Après un premier set maîtrisé (11/8), les Malgaches ont cédé du terrain dans les trois manches suivantes (4/11, 9/11, 5/11). Malgré de beaux échanges et une belle résistance, la paire malgache s’est inclinée 1-3. Cette défaite, synonyme d’élimination, leur offrait néanmoins la médaille de bronze, partagée avec l’autre duo demi-finaliste vaincu.
Cette troisième place revêt une importance particulière pour Madagascar. Elle prouve que les pongistes de la Grande Île peuvent rivaliser avec les meilleures paires africaines et maintenir leur rang parmi les nations émergentes de la discipline. Le palmarès du duo Fabio-Antoine s’enrichit d’une médaille supplémentaire, qui vient consolider leur statut de références régionales.
Des parcours individuels contrastés pour les autres représentants
Si le double masculin a permis à Madagascar de décrocher une récompense, les parcours individuels des autres pongistes ont été plus mitigés. En simple dames, Hanitra Karen Raharimanana a signé un très beau tournoi, manquant de peu le podium. Après avoir dominé plusieurs adversaires, elle a échoué en quart de finale face à l’Égyptienne Hana Goda, véritable étoile montante du tennis de table africain. La rencontre s’est soldée sur le score de 1-4 (11/9, 1/11, 6/11, 4/11, 2/11).
Avant cette élimination, Hanitra avait démontré une belle maîtrise technique. En huitièmes, elle s’était imposée face à la Tunisienne Mariam Brahimi sur le score de 4-2, au terme d’un match spectaculaire (11/5, 9/11, 8/11, 11/6, 11/1, 11/1). Lors des tours précédents, elle avait balayé la Nigériane Aishat Rabiu (4-0) puis la Rwandaise Chantal Hirwa (4-0). Ce parcours illustre le potentiel grandissant du tennis de table féminin malgache, porté par une nouvelle génération de joueuses expatriées en Europe.
Chez les hommes, Fabio et Antoine ont connu un destin plus cruel en simple. En huitièmes de finale, Fabio s’est incliné après une bataille acharnée face au Tunisien Wassim Essid, sur le score de 3-4 (11/9, 13/11, 7/11, 15/13, 8/11, 7/11, 13/15). Ce match, d’une rare intensité, aurait pu basculer à tout moment. L’olympien de Paris 2024 avait pourtant débuté le tournoi de manière convaincante, dominant l’Ougandais Jonathan Senonga (4-0) puis le Congolais Diawaku Olamungana (4-1).
Antoine Razafinarivo, de son côté, a été stoppé par le Béninois Abdel Kader Salifu en huitièmes de finale (1-4). Il avait auparavant vaincu l’Algérien Sami Kherouf (4-2) au tour précédent. Ces défaites illustrent le haut niveau général du tournoi et le faible écart entre les meilleurs joueurs du continent.
Les autres représentants malgaches – Setra Rakotoarisoa et Edena Prévot – ont été éliminés dès les trente-deuxièmes de finale en simple. En double, les associations Fabio-Hanitra, Antoine-Edena, Hanitra-Edena et Setra-Zayyan Houssein n’ont pas dépassé le stade des huitièmes. Ces résultats, bien que modestes, traduisent toutefois un engagement constant et un niveau de jeu en progression.
Le tennis de table malgache entre espoirs et réalités
La médaille de bronze de Fabio et Antoine constitue un symbole fort pour Madagascar, mais elle met aussi en lumière les défis persistants du tennis de table national. Si les pongistes malgaches réussissent à se distinguer individuellement, c’est en grande partie grâce à leur formation et à leur évolution en France, où ils bénéficient de structures de haut niveau. À Madagascar même, les infrastructures, le matériel et l’encadrement technique restent encore insuffisants pour assurer un développement durable.
Les dirigeants de la fédération malgache, conscients de ces limites, misent sur la diaspora pour maintenir le pays dans la course continentale. Cette stratégie porte ses fruits à court terme, mais elle soulève la question de la relève locale. Sans un investissement accru dans les clubs et les écoles de tennis de table, la base nationale risque de s’éroder au fil des années.
Le succès du duo Fabio-Antoine doit servir d’exemple et de levier. Leur parcours inspire de jeunes joueurs, notamment dans les clubs d’Antananarivo et de Fianarantsoa, où le tennis de table connaît un regain d’intérêt. Des initiatives locales voient le jour, soutenues par des entraîneurs bénévoles et des associations sportives qui organisent des tournois régionaux. Cependant, ces efforts nécessitent un accompagnement institutionnel plus fort, notamment en termes de financement, d’équipements et de détection des talents.
La Fédération malgache de tennis de table envisage de renforcer ses partenariats avec les fédérations africaines et européennes pour former des entraîneurs et permettre à de jeunes joueurs de participer à des stages à l’étranger. De telles initiatives, si elles se concrétisent, pourraient consolider les bases d’un système national de développement sportif à long terme.
Une médaille porteuse d’espoir avant les épreuves par équipes
Les Championnats d’Afrique ne s’arrêtent pas aux épreuves individuelles et en double. À partir du jeudi suivant, place aux compétitions par équipes, qui se poursuivront jusqu’au dimanche. Pour Madagascar, cette deuxième partie du tournoi constitue une nouvelle opportunité de s’illustrer collectivement.
Le moral de la délégation reste positif après la médaille obtenue en double messieurs. Fabio et Antoine, leaders naturels du groupe, tenteront d’entraîner leurs coéquipiers vers une nouvelle performance. Leur expérience du haut niveau, combinée à la motivation de leurs partenaires, pourrait créer la surprise face à des nations plus puissantes.
Ces épreuves par équipes permettront également de jauger la cohésion du groupe malgache. Dans un sport souvent perçu comme individuel, la dimension collective revêt une importance particulière lors des tournois internationaux. Chaque point marqué contribue au résultat global, et la solidarité entre joueurs devient un facteur déterminant.
Au-delà du résultat final, la participation de Madagascar à ce grand rendez-vous continental demeure un motif de fierté nationale. Elle illustre la capacité du pays à figurer parmi les meilleures nations africaines, malgré des moyens limités. Cette médaille de bronze, arrachée avec courage et détermination, symbolise la persévérance d’un sport en pleine reconstruction.
Un avenir à bâtir pour consolider les progrès
Le tennis de table malgache vit un moment charnière. L’émergence de talents tels que Fabio Rakotoarimanana, Antoine Razafinarivo et Hanitra Raharimanana prouve que le potentiel est bien réel. Toutefois, pour transformer ces succès isolés en dynamique durable, une politique sportive cohérente s’impose.
L’un des enjeux majeurs réside dans la création d’un véritable centre d’entraînement national, où les jeunes pongistes pourraient bénéficier d’un encadrement régulier. Actuellement, la majorité des espoirs malgaches s’expatrient très tôt, faute de structures adaptées dans leur pays. Un investissement dans la formation locale permettrait non seulement de diversifier la base de joueurs, mais aussi de renforcer le sentiment d’appartenance et la fierté nationale.
Les résultats obtenus à Tunis démontrent que Madagascar possède des athlètes capables de rivaliser avec les grandes puissances africaines. Il s’agit désormais de capitaliser sur cette réussite, d’attirer des sponsors, et d’inciter les autorités sportives à investir davantage. Une politique de long terme pourrait faire du tennis de table un vecteur d’unité et de reconnaissance internationale pour le pays.
La prochaine étape consistera à préparer les Jeux Africains et les qualifications pour les Jeux Olympiques. Avec un encadrement renforcé et une préparation adaptée, Fabio et Antoine pourraient viser encore plus haut. Leur médaille de bronze à Tunis restera, quoi qu’il arrive, un jalon dans l’histoire du sport malgache : celui d’un duo qui, par son talent et sa persévérance, continue de porter haut les couleurs de Madagascar.



