RANDRIATSAHONY Jean Eugène Dr RAZAFIENDRINTSOA Dieudonné Gabriel
Introduction
Madagascar, avec sa biodiversité unique au monde, abrite une centaine d’Aires Protégées, témoignant de son engagement envers la conservation de ses richesses naturelles. Cependant, malgré la création de ces aires, plusieurs d’entre elles demeurent sans gestionnaires, laissant leurs rôles de conservation et de développement inachevés. La question de l’efficacité et de la pertinence de ces espaces protégés se pose alors. L’héritage des décisions internationales telles que celles prises à Durban soulève également des préoccupations liées aux problèmes fonciers et à la gestion locale des ressources naturelles. En parallèle, la gestion de ces aires génère un flux économique considérable pour le pays. Le rôle de Madagascar National Parks dans l’exploitation et la préservation de ces espaces est crucial, avec un impact notable sur le produit intérieur brut (PIB) du pays. Cette analyse s’intéresse à l’évolution de la gestion des Aires Protégées, à leurs enjeux économiques et sociaux, ainsi qu’aux défis persistants pour leur gestion durable.
Contexte et le cadrage macroéconomiques
Madagascar fait partie des zones les plus riches de la planète en termes de biodiversité. Il contient environ 5% des espèces animales et végétales présentes dans le monde dont 80% de ses espèces terrestres et aquatiques y sont endémiques. Nombreuses études biologiques ont été déjà menées sur le terrain, mais de nouvelles espèces animales et végétales sont régulièrement découvertes.
La situation géographique particulière de la Grande île, détachée des autres continents il y a environ 160 millions d’années, ainsi que sa diversité de climats ont favorisé le développement de ses espèces endémiques.
Par ailleurs, Madagascar fait partie des pays Africains engagés dans la gestion de ses ressources naturelles. La ratification de Madagascar des traités internationaux notamment la convention sur la diversité biologique en 1995, dont les objectifs sont la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable de la diversité biologique et le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques, est une des preuves incontournable pour le pays de son engagement dans la gestion des ressources naturelles renouvelables.
En outre, depuis l’année 1990, l’Etat Malagasy a déjà mis en place des structures de gestion de ses Aires Protégées. Sur ce, il a créé une association Malagasy appelée Madagascar National Parks, une association de droit privé, et qui va s’occuper du côté opération de la gestion ; l’Office National pour l’environnement (ONE), chargé du suivi de la gestion des Aires protégées déjà en place ou à créer, ainsi que l’Agence Nationale d’Action Environnementale (ANAE) chargée de la gestion environnementale. La mission de Madagascar National Parks est de conserver et gérer de manière durable les parcs nationaux et réserves de Madagascar. Ces Aires Protégées devront constituer un levier d’incitations économiques pour la conservation auprès des populations locales, et attirer l’investissement (Bailleurs de Fonds, privé, assistance technique-ONG). Ainsi, outre les activités directes effectuées dans les aires protégées, Madagascar National Parks a aussi l’obligation d’appuyer le développement de la population riveraine pour la faire sortir de la pauvreté.
Dans l’accomplissement de cette mission, Madagascar National Parks obtient beaucoup de financements de la part des plusieurs bailleurs de fonds. Cette étude de retombées économiques consiste à évaluer les impacts de l’existence de Madagascar National Parks sur l’économie nationale. Elle permet de mesurer les impacts directs, indirects et, dans certains cas induits, en termes de création d’emploi, de valeur ajoutée à l’économie nationale des investissements.
Vocation de l’analyse :
La décision de l’Etat Malgache à augmenter jusqu’à six millions d’hectares dans les cinq ans à venir la surface des Aires Protégées, durant le Congrès Mondial pour les Aires Protégées, à Durban, l’année 2003, a créé une grande dynamique sur le mode de gouvernance des ressources naturelles renouvelables Malagasy. Du point de vue gouvernance, des nouvelles typologies des Aires Protégées ont été créées.
A propos de l’organe qui s’occupe de l’opération, la concurrence dans la recherche et maintien de financement ; l’amélioration de la qualité de la réalisation des activités, et dans le partenariat surtout avec les communautés locales a augmenté.
Le tableau ci-dessous met en exergue les six catégories des Aires Protégées Malgaches après la conférence de Durba
Source : Loi COAP 2015-737
Actuellement Madagascar possède 123 aires protégées dont 101 terrestres et 22 marines, d’une superficie totale de 7 612 346 ha couvrant des écosystèmes terrestres, aquatiques et marins. Ce nombre nous incite à penser déjà que la gestion des Aires Protégées à Madagascar a besoin d’un budget colossal.
Nous allons énumérer par la suite le nom de chaque Aire protégée par sa catégorie (Novembre 2017) pour attirer la réflexion. Etant donné qu’il s’agit d’une analyse comparative, toutes les AP de Madagascar seront mentionnées.
Catégorie I : Les Réserves Naturelles Intégrales (RNI)
Source : https//www.fapbm.org
Catégorie II : Les Parcs Nationaux
Source : https//www.fapbm.org
Catégorie III : Le Monument Naturel
Source : https//www.fapbm.org
Catégorie IV : Les Réserves Spéciales
Source : https//www.fapbm.org
Catégorie V : Le Paysage Harmonieux Protégés
Source : https//www.fapbm.org
Catégorie VI : La Réserve des Ressources Naturelles
Source : https//www.fapbm.org
Histogramme des Aires Protégées par gestionnaire :
Source : https//www.fapbm.org
D’après ce graphe, Madagascar National Parks gère le plus grand nombre d’Aires Protégées à Madagascar. Sur ce, ses obligations sont de grande taille et le flux financier lié à son intervention aura un impact significatif par rapport aux autres gestionnaires des Aires Protégées, sur l’économie du pays.
Cette étude d’impact socioéconomique des activités de Madagascar National Parks sert de fournir des éléments d’analyse objectifs quant à l’opportunité pour le pays de son existence et permettre une comparaison entre plusieurs projets sur l’environnement de la Grande île.
Le financement du Parc :
Gestionnaire des 43 Aires Protégées de Madagascar, Madagascar National Parks possède assez de bailleur de fonds. Aussi, il obtient aussi son propre recette, non négligeable, par la vente de produits annexes de l’écotourisme, et le tickets d’entrée dans les aires protégées.
Le tableau suivant détaille le décaissement des cinq dernières années en milliers d’ariary :
Source : Rapport annuel MNP 2023
Partant de ce tableau, la Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW) est le meilleur contributeur financier à la conservation des Aires protégées Malagasy gérées par Madagascar National Parks pour les cinq derniers exercices. Etant donné que la Fondation pour les Aires Protégées et la Biodiversité de Madagascar (FAPBM) prend en charge le salaire de la plupart du personnel du réseau MNP, ce fonds de la FfW a été principalement décaissé pour les investissements.
Apports socioéconomiques :
– Apports directs
Ces décaissements ont été faits pour le paiement :
- des frais salariaux directement versés aux personnels ;
- des divers impôts et taxes ;
- des divers achats ;
- de tous les travaux sous-traités à des entreprises locales, des riverains ou aux Comités locaux du Parc ;
- des frais de guidage payés par les touristes aux guides locaux enregistrés au sein du guichet unique ; et
- de tous les micro-projets effectivement financés à travers la contribution des Droit d’Entrée dans l’Aire Protégée ou les fonds propres de Madagascar National Parks
– Apports indirects
Les ressources naturelles renouvelables et ses services écosystémiques apportent une contribution très importante à l’économie de Madagascar. La dernière étude menée par la Fondation pour les Aires Protégées et la Biodiversité de Madagascar (FAPBM) et Madagascar National Parks avait montré qu’au niveau global, le réseau d’aires protégées terrestre de Madagascar (43 APs, 2millions ha), dans son état actuel et en supposant une conservation efficace, apporte une contribution significative par la régulation du climat, la conservation de la biodiversité et les services culturels connexes (tourisme, recherche, divertissement) d’une valeur économique de 3,67 à 17,27 milliards de dollars par an (valeur médiane 7,74 milliards de dollars).
Opportunités : obtention des Nouveaux labels
L’inscription récemment des forêts sèches de l’Andrefana Malagasy, un réseau de six aires protégées, composées du Parc National du Tsingy de Bemaraha, de la Réserve spéciale d’Analamerana, du Parc National d’Ankarana, du Parc National d’Ankarafantsika, du Parc National de Mikea et de Tsimapesotse dans la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, est une signe de la bonne gouvernance au sein de Madagascar National Parks, son gestionnaire. C’est aussi donc, l’impact de ses efforts à eux-mêmes.
Risques :
Malgré cette valeur inestimable de la biodiversité de Madagascar, et ses apports socio-économiques sans égal, la recrudescence des pressions notamment anthropiques qui pèsent sur les Aires Protégées risque d’être terminé si aucune mesure stricte ne sera prise par les autorités.
La dévaluation monétaire en exponentielle dans le pays crée un risque non négligeable aux investissements effectués par Madagascar National Parks. Ainsi, malgré qu’il a planifié au départ son budget de travail, la montée soudaine des prix de carburants, de matériaux et autres intrants rend insuffisant la disponibilité.
L’éventuelle intervention de l’Etat dans le financement et ou la gestion financière des aires protégées rendrait vulnérable la capacité de Madagascar National Parks à maximiser ses résultats. Dans ce sens, le fonds pour la conservation des Parcs et Réserves sera utilisé pour d’autres fins. En fin, au point de vue qualité de service et efficacité de gestion, l’émergence des Nouvelles Aires Protégées présente un grand risque pour Madagascar National Parks, le gestionnaire du berceau de la biodiversité Malagasy. Pour ce faire, il doit se positionner et améliorer ses actions dès maintenant pour sortir de l’anonymat.
Conclusion :
Nous avons déjà vu que Madagascar possède une centaine d’Aires Protégées. Des gestionnaires existent pourtant une dizaine d’entre elles sont toujours orphelines c’est-à-dire sans promoteur. On se demande pourquoi l’avoir créée ? On arrive même à penser à l’existence des problèmes fonciers nés de la décision du Durban.
Par ailleurs, le flux économique lié par la gestion des Aires Protégées de Madagascar National Parks varie de 25 à 27 milliards d’Ariary par an. Une somme non négligeable, et que nous pensons la plus grande parmi tant d’autres projets dans l’Ile, a un impact significatif au PIB de Madagascar.
Bibliographie :
- Rapport Annuel 2023, Madagascar National Parks
- Koechlin et al, 1974. Flore et végétation de Madagascar
- Etude de l’impact socio-économique du périmètre d’intervention du CNC de 2012 à 2021. Rapport établi par EY, Juillet 2023
- Perrier de la Bathie, 1921. La végétation malgache. Ann. Colon. Marseille, 3 e Sér. 9, 268p.
- CARRIERE-BUCHSENCHUTZ, S., (2006), « L’urgence d’une confirmation par la science du rôle écologique du corridor forestier de Fianarantsoa », Etudes rurales, 178(1), pp. 181-196
- CARRIERE S., BIDAUD C., (2010), « En quête de naturalité : Représentations scientifiques de la nature et conservation de la biodiversité », in Géopolitique et Environnement à Madagascar, Rakoto H., Blanc C., Pinton F. (eds), Paris, IRD, pp. 43-71
- DIALOGUES, N., (2010), Adaptation aux changements climatiques : Forets, espaces naturels et biodiversité, Cycle de séminaires « Adaptation au changement climatique » – Session 3 : Forêts, espaces naturels et biodiversité, Paris, Ed. Environnement, Société.



