Qui est Adnan Fanjari ?

La scène politique égyptienne réserve parfois des trajectoires qui, vues de loin, semblent paradoxales : des figures peu connues du grand public deviennent, presque du jour au lendemain, des visages-clés d’un exécutif confronté à des attentes sociales immenses et à des impératifs de stabilité. Adnan Fanjari Abu Jabal Hussein appartient à cette catégorie. Longtemps identifié d’abord comme magistrat, il s’est retrouvé propulsé au cœur de l’appareil gouvernemental en occupant le portefeuille de la Justice, une fonction stratégique dans un pays où l’État revendique un cap de modernisation administrative tout en conservant un contrôle étroit sur les équilibres institutionnels.

Son nom apparaît régulièrement dans les communications officielles, dans les comptes rendus d’audiences présidentielles, dans les annonces de coopération internationale et dans les présentations de projets de numérisation. En revanche, son profil personnel demeure relativement discret dans l’espace médiatique francophone. Pour comprendre qui est Adnan Fanjari Abu Jabal Hussein, il faut donc croiser plusieurs fils : son parcours de juriste, son ascension dans la hiérarchie judiciaire, le contexte du remaniement gouvernemental qui l’a installé au ministère de la Justice, et enfin les dossiers concrets qui donnent corps à son action depuis sa nomination.

Un juriste formé au Caire, originaire de la Haute-Égypte

Adnan Fanjari Abu Jabal Hussein est né en 1953 dans le gouvernorat de Qena, en Haute-Égypte, plus précisément dans la localité de Hijaza Qibli, rattachée au centre de Qus. Ce point n’est pas anodin dans un pays où la géographie sociale continue de structurer les représentations : les élites administratives et judiciaires sont souvent perçues comme très cairotes, tandis que la Haute-Égypte, région rurale et historiquement moins favorisée, reste associée à d’autres dynamiques de mobilité sociale. Le fait qu’un responsable issu de cette région accède à un ministère régalien est donc fréquemment relevé dans les notices biographiques qui le concernent.

Il obtient une licence de droit à l’Université du Caire en mai 1974. Dans l’Égypte contemporaine, la Faculté de droit du Caire demeure l’une des portes d’entrée les plus prestigieuses vers la magistrature, le parquet et l’administration centrale. Cette formation constitue souvent le socle d’une carrière faite de mutations, de promotions internes et d’affectations successives dans différents ressorts judiciaires.

Les informations disponibles sur sa jeunesse, ses influences, sa vie familiale ou ses premiers engagements publics restent limitées. Il serait donc hasardeux de lui prêter une doctrine personnelle, un courant politique ou une stratégie de communication longuement mûrie. Ce que l’on peut établir de manière solide, c’est qu’il s’inscrit dans la tradition égyptienne d’une élite d’État d’abord façonnée par la carrière judiciaire, avant d’être appelée à des responsabilités gouvernementales.

Cette trajectoire n’est pas rare : dans plusieurs pays de la région, le ministère de la Justice est régulièrement confié à un conseiller, c’est-à-dire à un magistrat de haut rang, dont l’autorité repose sur l’expérience des cours d’appel, la connaissance du parquet et une familiarité avec l’architecture institutionnelle. L’élément distinctif, dans le cas de Fanjari, est que sa nomination intervient dans une période où la question de l’efficacité administrative et de la numérisation des services judiciaires revient au centre du discours officiel.

Une carrière construite dans la magistrature et l’appareil judiciaire

Le cœur du profil d’Adnan Fanjari Abu Jabal Hussein, tel qu’il est présenté dans les biographies accessibles, tient à l’enchaînement de postes de responsabilité dans l’appareil judiciaire. Plusieurs sources indiquent qu’il a occupé des fonctions de direction dans des cours d’appel, à la fois au Caire et dans d’autres gouvernorats, et qu’il a été associé à des organes de pilotage de la magistrature.

Il est notamment mentionné comme ayant présidé la cour d’appel du Caire et comme ayant été membre du Conseil suprême de la magistrature. Il est également présenté comme ayant présidé les cours d’appel de Béni-Soueif et d’Assiout, deux ressorts importants qui couvrent des régions où la justice est confrontée à des dossiers variés, allant du contentieux civil au pénal, avec des enjeux de sécurité et d’administration territoriale.

D’autres éléments reviennent de manière récurrente : son passage par l’inspection judiciaire du parquet général, et une nomination comme procureur général adjoint par décret présidentiel numéroté, daté de 2006. L’inspection judiciaire du parquet est un rouage essentiel dans l’organisation de la justice, puisqu’elle touche aux mécanismes d’évaluation, de contrôle interne et de discipline, ainsi qu’à l’harmonisation des pratiques. En Égypte, où la justice est un espace hautement institutionnel, ce type de poste place un magistrat à la jonction entre technique juridique et gestion de corps.

Plus récemment, au moment de son arrivée au gouvernement, il est présenté comme ayant été à la tête de la cour d’appel d’Alexandrie, et comme membre du Conseil judiciaire suprême à partir de 2022. Cette mention, souvent reprise dans la presse, a une valeur indicative : Alexandrie est l’un des grands centres urbains du pays, et la cour d’appel y occupe une place importante dans la hiérarchie judiciaire. Diriger une telle juridiction suppose une capacité de management, de coordination et de représentation, au-delà de la seule expertise juridique.

Un autre aspect de son parcours est fréquemment mis en avant : sa participation à des conférences et séminaires internationaux traitant de questions telles que la lutte contre le terrorisme, la corruption, les stupéfiants, le blanchiment, la traite d’êtres humains, la migration irrégulière ou encore la lutte contre les violences faites aux femmes. Il est également mentionné comme intervenant dans des formations destinées aux magistrats et professionnels du droit, y compris dans des cadres associés à des programmes de coopération. Ici, un principe de prudence s’impose : il existe un écart entre la présence à des événements et l’influence réelle sur la politique publique. Mais ces éléments donnent au moins une indication sur l’image institutionnelle qui est associée à son nom : celle d’un magistrat technicien, rompu aux dossiers transversaux et aux échanges internationaux.

Ce qui frappe, en revanche, c’est l’absence d’un parcours partisan au sens classique. Fanjari n’est pas d’abord décrit comme un élu, un chef de parti ou un animateur de la vie parlementaire. Son ancrage est celui d’un haut fonctionnaire de justice. Dans le contexte égyptien, cela n’empêche pas la qualification d’« homme politique », au sens où l’entrée au gouvernement, et plus encore dans un ministère régalien, implique une dimension éminemment politique : arbitrer, exécuter, représenter, et porter une ligne d’État.

Une nomination au ministère de la Justice dans un remaniement structurant

L’entrée d’Adnan Fanjari Abu Jabal Hussein au gouvernement se fait dans le cadre d’une nouvelle équipe ministérielle ayant prêté serment le 3 juillet 2024. À cette date, il est explicitement mentionné comme ministre de la Justice. Le contexte est celui d’une recomposition gouvernementale dirigée par le Premier ministre Moustafa Madbouly, dans laquelle plusieurs portefeuilles sont réattribués et de nouveaux équilibres internes sont recherchés.

Sur le plan institutionnel, l’image qui accompagne sa nomination est celle d’un ministre-conseiller, c’est-à-dire un magistrat de haut rang, appelé à piloter un ministère où les enjeux dépassent largement la seule administration des tribunaux. En Égypte, le ministère de la Justice est lié à l’organisation des services judiciaires, à certains dispositifs d’authentification et d’enregistrement, et aux interactions avec d’autres ministères dans des chantiers de modernisation. Sa position est donc, par nature, transversale.

La presse anglophone et arabophone souligne aussi un point politique : Fanjari est présenté comme un défenseur de l’indépendance des juges, et comme ayant exprimé une opposition à la déclaration constitutionnelle de 2012, un épisode associé à une période de fortes tensions entre exécutif et magistrature. Là encore, il convient de ne pas surinterpréter : une position institutionnelle dans un moment de crise peut être invoquée de diverses manières. Mais le fait même que cet élément soit rappelé au moment de sa prise de fonctions indique qu’il sert de marqueur symbolique, destiné à inscrire sa nomination dans une histoire récente où la relation entre justice et pouvoir politique a été particulièrement scrutée.

La place du ministre de la Justice est également visible dans les communications présidentielles liées aux réunions avec les instances judiciaires. L’Égypte dispose d’un Conseil supérieur des instances et autorités judiciaires, dont les réunions, rapportées par des canaux officiels, mettent en scène les priorités de l’État en matière de fonctionnement de la justice, d’efficacité des procédures et de coordination institutionnelle. Le ministre est présent à ces rendez-vous, signe que son rôle n’est pas seulement administratif mais aussi représentatif : il incarne un lien entre l’exécutif, les juridictions et les structures de gouvernance de la magistrature.

En somme, la nomination de Fanjari au ministère de la Justice n’est pas uniquement la promotion d’un magistrat expérimenté. Elle s’inscrit dans une séquence où l’État veut afficher, simultanément, une continuité institutionnelle et une capacité de réforme. Le ministère devient alors une vitrine : on y projette des attentes de modernisation, tout en y gérant des dossiers sensibles où la justice touche à la sécurité, aux droits et à la relation entre citoyens et administration.

Les priorités affichées : services, numérisation et réforme administrative

Depuis sa prise de fonctions, une partie des informations les plus concrètes concernant Adnan Fanjari Abu Jabal Hussein relève d’annonces et d’inaugurations liées à la modernisation des services relevant de la Justice, notamment autour de l’enregistrement immobilier et de l’authentification. Pour le public, ces domaines sont souvent plus tangibles que les réformes juridiques abstraites : ils concernent la vie quotidienne, la capacité à faire établir un document, à enregistrer une transaction, à régulariser une propriété, à obtenir un acte dans des délais compatibles avec une économie moderne.

Un événement illustre particulièrement cette orientation : en juillet 2025, le Premier ministre inaugure à Nouvelle-Alamein un complexe dédié à l’enregistrement immobilier et à l’authentification, avec la mise en avant d’un système d’intégration entre le ministère de la Justice et le ministère du Logement. Dans ce cadre, Fanjari présente les capacités de l’infrastructure, insiste sur l’équipement électronique, sur la rapidité et la précision du traitement, ainsi que sur un modèle de guichet unique. L’objectif affiché est clair : réduire la charge procédurale, accélérer les opérations, et donner à la transformation numérique une traduction visible.

La numérisation n’est pas seulement un slogan : elle s’insère dans un mouvement plus large, souvent rattaché à la Vision Égypte 2030, qui structure la communication gouvernementale sur le développement durable, l’efficacité de l’administration et la modernisation des services publics. Dans le cas du ministère de la Justice, la transformation numérique est un chantier particulièrement complexe : elle touche à la fois aux archives, à la traçabilité des actes, à la sécurité juridique, à la protection des données, et à l’interopérabilité entre administrations.

Le dossier de l’enregistrement immobilier est central parce qu’il se situe au croisement de plusieurs enjeux : sécuriser la propriété, faciliter les transactions, rendre le marché plus transparent, et réduire les frictions qui alimentent la bureaucratie et la contestation. Dans ce type de réforme, la Justice n’agit pas seule : la coordination avec le Logement, les collectivités et les infrastructures numériques est déterminante. C’est pourquoi les inaugurations et les communiqués mettent en scène, à côté de Fanjari, d’autres ministres, notamment celui des Communications et des Technologies de l’information, chargé de fournir l’infrastructure technique et la formation.

Dans ces dossiers, l’action du ministre n’est pas nécessairement celle d’un « réformateur » au sens idéologique, mais celle d’un pilote de système : garantir que les textes, les procédures, les services et les outils numériques soient compatibles, que les circuits décisionnels soient fluides, et que l’État puisse revendiquer des améliorations mesurables du service rendu.

Il faut toutefois rappeler une limite structurelle : la transformation d’un ministère régalien n’est pas un chantier linéaire. Les délais, la formation des agents, la résistance aux changements, et les contraintes budgétaires peuvent ralentir l’application des objectifs. Un ministre peut annoncer un dispositif, l’inaugurer, impulser une coordination, mais la réussite se joue ensuite dans l’exécution quotidienne. Sur ce point, le recul est encore relativement court pour dresser un bilan complet de la période Fanjari, au-delà des annonces et des actes inauguraux.

Une diplomatie judiciaire et des partenariats institutionnels plus visibles

Le rôle d’Adnan Fanjari Abu Jabal Hussein ne se limite pas aux politiques internes. Les documents disponibles montrent qu’il apparaît aussi dans des séquences de coopération internationale, en particulier autour de la justice, de l’entraide judiciaire et des échanges techniques.

L’exemple le plus explicite est une rencontre, à l’automne 2024, avec l’ambassadeur du Kazakhstan, portant sur le renforcement de la coopération bilatérale. Les échanges évoquent des projets d’accords liés à l’entraide judiciaire en matière pénale, à l’extradition et au transfèrement de personnes condamnées, ainsi qu’un projet de mémorandum de coopération entre ministères de la Justice. Ces sujets, techniques mais lourds de sens, illustrent la dimension internationale du portefeuille : la justice n’est pas seulement un service public interne, elle est aussi un instrument de relations interétatiques, notamment lorsque les questions de criminalité transnationale, de mobilité et de procédures pénales sont en jeu.

Par ailleurs, des communications officielles mentionnent des réunions de travail avec des organisations internationales, dont des agences onusiennes. Une rencontre tenue en février 2025 avec la coordinatrice résidente de l’ONU en Égypte, à la Nouvelle Capitale administrative, est rapportée comme un échange sur les modalités de coopération entre le ministère de la Justice et les agences des Nations unies. Là encore, il ne s’agit pas d’un détail anecdotique : la coopération avec des partenaires internationaux peut concerner des sujets aussi variés que la formation, l’accès au droit, la modernisation administrative, ou des programmes thématiques ciblés.

Dans le registre régional, des médias du Maghreb mentionnent également son nom à l’occasion d’entretiens bilatéraux au Caire avec des homologues arabes. Ces rencontres s’inscrivent souvent dans des cadres de coordination ministérielle, où la justice est abordée sous l’angle de l’entraide, de la lutte contre certaines formes de criminalité, de l’harmonisation partielle des procédures, ou de la coopération judiciaire au sens large.

Il existe enfin une autre dimension, plus politique : la présence du ministre de la Justice lors de réunions présidentielles avec les instances judiciaires. Dans ces séquences, l’État met en avant l’efficacité du système judiciaire, l’importance d’un fonctionnement harmonisé et la nécessité de moderniser les mécanismes. La participation de Fanjari à ces rendez-vous inscrit sa fonction dans une dynamique de coordination verticale : le ministère de la Justice n’est pas isolé, il est intégré à une architecture où le sommet de l’exécutif affirme une direction générale.

Ce rôle international et institutionnel correspond, de facto, à un profil de haut magistrat habitué aux échanges techniques, aux négociations de textes et à la représentation d’une administration. Pour autant, il serait excessif de conclure à une diplomatie « personnelle » : les ministres agissent dans des cadres définis, avec des services dédiés, et dans une logique de continuité d’État. Le fait notable est surtout que son nom est associé, dans les informations publiques, à une justice qui se veut à la fois plus moderne et plus connectée au champ international, au moins sur le plan procédural.

Défis, attentes et zones d’ombre d’un ministre discret

Dresser le portrait journalistique d’Adnan Fanjari Abu Jabal Hussein impose de reconnaître une tension : il est à la fois central par sa fonction, et relativement discret par son exposition personnelle. On dispose d’éléments factuels sur son parcours institutionnel et sur quelques dossiers, mais beaucoup moins sur sa vision politique au long cours, sur ses arbitrages internes, ou sur une éventuelle doctrine propre.

Cette discrétion s’explique en partie par la nature même du poste. Dans de nombreux systèmes, le ministère de la Justice se situe entre technique et politique : il exige de la réserve, une maîtrise du langage institutionnel, et une capacité à incarner l’autorité sans se prêter trop facilement aux controverses. En Égypte, où la justice et la sécurité forment un continuum souvent perçu comme sensible, cette prudence est encore plus marquée.

Pour autant, les défis qui entourent son ministère sont considérables. Il y a d’abord l’enjeu de l’accès au service public : délais, complexité des procédures, qualité de l’accueil, harmonisation des pratiques entre régions. La transformation numérique est présentée comme une solution, mais elle ouvre à son tour de nouveaux défis : formation, accompagnement des publics les plus éloignés du numérique, garanties de sécurité et de continuité, capacité à faire fonctionner des systèmes interconnectés.

Il y a ensuite la dimension symbolique et institutionnelle : l’État affirme l’importance de la justice, de la stabilité des institutions et d’un fonctionnement efficace. Dans le même temps, la justice est l’un des espaces où se cristallisent des attentes de transparence, de garanties procédurales et d’équité. Un ministre issu de la magistrature peut être perçu comme un gage de compétence, mais il est aussi attendu sur sa capacité à concilier modernisation administrative et crédibilité institutionnelle.

Enfin, il existe un enjeu de communication publique. Dans un contexte où les réformes sont souvent annoncées par inaugurations, protocoles et communiqués, la perception du citoyen se construit sur des expériences concrètes : obtenir un document plus vite, éviter des déplacements inutiles, comprendre les étapes d’une procédure. La politique de la Justice se mesure donc à l’aune de résultats visibles. Le ministre, même discret, devient alors une figure de référence : son nom se retrouve associé à des réformes qui, si elles réussissent, renforceront l’image de l’État modernisateur, et si elles échouent, alimenteront la critique de la bureaucratie.

À ce stade, les informations disponibles ne permettent pas d’affirmer davantage sur ses positions détaillées, sur d’éventuelles réformes juridiques de grande ampleur qu’il porterait personnellement, ou sur des choix politiques précis au sein du gouvernement. Le portrait qui se dessine est celui d’un magistrat de haut rang devenu ministre, inscrit dans une logique d’État, chargé de piloter des chantiers de modernisation et de représenter l’institution judiciaire à l’intérieur comme à l’extérieur.

En définitive, répondre à la question « qui est Adnan Fanjari Abu Jabal Hussein ? » revient surtout à comprendre ce qu’il incarne : la continuité d’une élite administrative judiciaire, la politisation d’un parcours technique par l’entrée au gouvernement, et une phase où le ministère de la Justice est appelé à prouver, dans des domaines très concrets, qu’un État peut accélérer ses services tout en conservant ses équilibres institutionnels.

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